Il ne suffit pas d’un coup de menton pour reconquérir la confiance des Français
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On ne s'étonne guère que l'opposition se soit montrée critique après l'allocution télévisée d'Emmanuel Macron. Il faut faire preuve de quelque naïveté intéressée pour saluer, comme le maire de Bordeaux, une "excellente intervention". Pour qui prétend rassembler les Français, fustiger les "porte-voix d'une foule haineuse", qui s'en prend "aux élus, aux forces de l'ordre, aux journalistes, aux juifs, aux étrangers, aux homosexuels", c'est une bien étrange méthode, qui consiste à généraliser, à partir de quelques cas particuliers, dans l'objectif de déconsidérer.
Du reste, il n'y a pas que l'opposition politique pour critiquer Macron. D'après un sondage réalisé par OpinionWay, 60 % des Français ont trouvé que le Président n'avait pas été convaincant, 26 % l'ont trouvé convaincant et 14 % « très » convaincant. Selon un autre sondage, seuls 50 % des personnes interrogées estiment que le gouvernement tiendra partiellement compte des avis émis lors du « grand débat ». On ne peut pas dire que la confiance règne.
Malgré son "vœu de vérité", quelle vérité peut-on attendre d'un homme qui, confronté au mouvement des gilets jaunes, a tout dit et son contraire ? Qui, un jour, fait acte de contrition et, le lendemain, assure qu'il va garder le cap ? Qui, en difficulté, prend un air chattemite, mais donne un coup de griffe dès qu'il croit sa position plus solide ? Comment, surtout, accorder la moindre confiance à quelqu'un qui n'a jamais voulu apporter d'explications claires sur ses relations avec Alexandre Benalla ?
Car cette affaire est loin d'être anecdotique. Le secrétaire d'État Mounir Mahjoubi, invité de Jean-Jacques Bourdin ce mercredi matin, a éludé la question en expliquant que le temps qu'on y consacrait était autant de temps perdu pour les problèmes essentiels. Un peu facile ! Dans un entretien à Mediapart, ledit Benalla déclare avoir continué d'échanger régulièrement avec le chef de l'État, via la messagerie Telegram, et qu'il en a gardé la preuve sur son portable. Selon Le Parisien, il aurait même eu des contacts par SMS avec la première dame.
L'Élysée ne saurait se contenter de démentir et d'accuser l'ancien chargé de mission d’entretenir "tout un faisceau de contre-vérités et d’approximations" pour "se venger". On n'est pas entre garnements dans une cour de récréation. S'il veut avoir une chance de retrouver quelque crédit, Emmanuel Macron doit dire toute la vérité sur cette affaire. Faute de quoi, les Français ne pourront qu'entretenir des soupçons légitimes sur sa manière de gouverner. Ajoutez l'histoire incroyable des passeports diplomatiques, qui auraient été restitués à Benalla par un "membre de la présidence" (avec, pour seul commentaire : "Tu ne fais pas de bêtises avec"). C'est encore plus grave si c'est avéré !
Si la présidente de la commission des Lois de l'Assemblée a opposé, sans surprise, une fin de non-recevoir aux députés socialistes qui réclamaient une réunion en urgence, la commission des Lois du Sénat ne lâchera pas le morceau : elle a exigé des explications de l'Élysée et n'exclut pas de procéder à de nouvelles auditions, voire de saisir la Justice. La majorité est-elle consciente qu'en favorisant le black-out, elle alimente les rumeurs et pourrait, si l'on découvre un dysfonctionnement ou une connivence, passer pour complice ?
Emmanuel Macron a perdu la confiance des Français. Sa seule chance de s'en sortir honorablement serait de remettre en jeu sa légitimité. S'il se contente de donner des coups de menton, il risque fort de se mettre lui-même KO.
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