Il n’y a pas de privilège blanc. Il n’y a que le privilège d’être français

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« Privilège blanc » : les deux mots font florès, sur les pavés et les réseaux sociaux, portés par les tonitruants représentants de la LDNA, l’ineffable Rokhaya Diallo ou encore l’indignée de cocktail mondain Virginie Despentes.

Le mensonge, on le sait, peut prendre de multiples oripeaux : occultation, focalisation, euphémisation… Celui-ci pourrait s’appeler mensonge par métonymie, figure de style bien connue des lycéens de première - quand ils passaient encore le bac français - consistant à prendre le contenant pour le contenu, la partie pour le tout : je bois un verre, Paris est en liesse, il a enfin trouvé un toit.

Essentialiste, raciste, puisque enfermant chacun dans son déterminisme biologique,
le concept est aussi indigent. Combien d’ouvriers au teint d’anglaise troqueraient bien leur insigne avantage contre l’odieux préjudice d’un Yannick Noah ou d’un M’Bappé, combien de filles de mécanicien (comme Rokhaya Diallo) de la France périphérique (pas comme Rokhaya Diallo) ne bénéficieront jamais de la même notoriété ni du même tapis rouge sur les plateaux télé.

Le vrai privilège (car il y en a un), convenons-en, n’est pas épidermique mais géographique : celui d'être né sur une terre (l’Europe) ayant eu l’insigne avantage d’être hellénisée, romanisée, christianisée - c’est même ainsi que Paul Valéry la définit - sur laquelle est éclos un joyau de civilisation, une culture magnifique, émancipatrice au sens noble du terme, féconde tant sur le plan philosophique qu’artistique, littéraire qu’économique, magnifiant le cœur autant que la raison, le cœur par la raison, la raison pas le cœur.

Et il se trouve - pardon pour la lapalissade,- qu’en Europe, on a(vait) plutôt le type européen. En l'occurrence, cette métonymie s'appelle même synecdoque.

Mais le propre de cet avantage est qu’il se transmet en héritage, et surtout se partage, sans s’arrêter aux frontières ni aux dermes. C’est bien le droit latin, par exemple - même s’il tend, aujourd’hui, à s’effacer devant le droit anglo-saxon -, qui prévaut en Afrique.

Le vecteur de ce rayonnement a été, on me pardonnera ce mot obscène, la colonisation. Sans doute celle-ci n’a-t-elle pas été exempte de tous reproches, sans doute a-t-elle eu ses « petits Blancs » cruels et profiteurs, ses décisions arbitraires et ses iniquités patentées, mais les Romains (demandez donc à Vercingétorix) n’ont pas toujours été non plus très affectueux ni miséricordieux. Les Italiens doivent-ils, à deux genoux, nous demander pardon ? Devons-nous, de ce fait, nier en bloc les bienfaits qu’ils nous ont apportés et exiger réparation ?

Un autre moyen de partager ce privilège avec ceux qui ne l’on pas reçu au berceau pourrait-être l’école. Sauf que celle-ci est exsangue, vidée de sa substance, et quand on y parle de notre civilisation, c’est pour en faire l’alpha et l’oméga de l’indignation. Il faut que les « racisés » restent des révoltés bien disciplinés - attention, en rangs serrés, pas une tête qui dépasse, les chaînes idéologiques aux pieds pour ne pas s’écarter du modèle imposé - parce que les cultivateurs du politiquement correct ont besoin d’eux dans leur champ de coton. Ce coton hydrophile dont on remplit la tête des Français pour leur éviter de penser. Ce salariat de substitution importé et exploité par le capitalisme pour remplacer les ouvriers français est devenu un électorat de substitution importé et exploité par les enfants du marxisme pour les mêmes raisons. Ils sont les petits soldats dociles de la gauche, et gare à eux s’ils ne filent pas droit. Assignés non pas à résidence mais à bien-pensance. Renvoyés sans arrêt à leur couleur de peau, et aux présupposés qui y sont attaché sans avoir le droit de s’en affranchir : si tu soutiens Trump, tu n’es plus un Noir, avertit Joe Biden. Un Noir ne vote pas pour qui il veut. Il ne fait pas, non plus, ce qu’il veut : certains métiers lui sont interdits. Un flic noir est un traître, c’est ce qu’ont fait comprendre certains récents manifestants - sans être contredits par les autres - à l’un d’entre eux. Un ministre noir est un collabo. C’est ainsi que le représentant de la Ligue de défense noire africaine a longuement conspué Sibeth N’Diaye lors d’un autre de ces rassemblements interdits.

Mais de ce joug détestable personne, bien sûr, ne parle.

Gabrielle Cluzel
Gabrielle Cluzel
Directrice de la rédaction de BV, éditorialiste

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