Il y a le bon et le mauvais prophète

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Le métier de prophète n'est pas des plus faciles. La fin est souvent douloureuse et la carrière, comme le dit un célèbre lieu commun, mal assurée pour qui exerce en son pays. Il y a de petits et de grands prophètes, et le dernier d'entre eux, saint Jean-Baptiste, incarne au plus haut degré les difficultés terrestres que doit traverser celui qui, contre l'esprit du temps, ose dire la vérité. Et puis, de même que si, contre Élie, il y eut tous les prêtres de Baal, il y a toujours, contre les vrais prophètes, une foule d'imposteurs que la foule se presse d'écouter avant de reconnaître, comme dégrisée, qu'elle a eu tort et qu'on ne l'y reprendra plus. Mais il est alors trop tard.

En politique, cette variante discount de la religion, c'est un peu pareil. Il y a les bons prophètes que l'on couvre d'injures et les mauvais, les menteurs, que l'on encense jusqu'à ce que les masques tombent. Sauf que cette fois, on a le replay vidéo. C'est un des rares avantages de la modernité.

En 1992, Philippe de Villiers affrontait, sur le plateau d'Anne Sinclair, Alain Juppé et Jack Lang coalisés contre lui. Villiers s'opposait à Maastricht, vous vous souvenez ? Parmi ses arguments, il y avait celui-ci, qui nous donne aujourd'hui la chair de poule : « Un Libyen qui entre en Sicile le 2 janvier 1993, c'est comme s'il était en France... » Lang et Juppé eurent beau jeu de se récrier, de plaider l'excès, face à un Philippe de Villiers tout sourire et qui, se revoyant trente ans plus tard sur CNews, se marre carrément, beau joueur.

Avant Villiers, il y eut ce débat entre Max Gallo et Jean Raspail, quand sortit Le Camp des saints. Gallo, encore de gauche à l'époque, en appelle à l'humanisme et n'a pas de mots assez durs pour critiquer Raspail, là aussi, comme Villiers, droit dans ses bottes et n'ayant jamais changé de pensée.

C'est peut-être à cela que l'on reconnaît un bon prophète, d'ailleurs : pour paraphraser Les Inconnus, le bon prophète, il dit des trucs, mais c'est un bon prophète... et surtout, lui, il ne change pas au gré du vent. Voyez Jean-Marie Le Pen face à Bernard Tapie, en 1989 : Tapie, bateleur sans fidélités, avait gagné le match sur la forme, mais son fils Laurent reconnaît lui-même aujourd'hui que c'était le Menhir qui avait raison. Voyez Zemmour et Attali, également : on connaît le célèbre débat entre eux, dans l'émission « Ce soir (ou jamais !) », en 2014, qui se conclut par le monologue de Zemmour sur « l'homélie du père Attali ».

Zemmour, à l'époque, disait la même chose que maintenant... et ce, depuis les années 80. Attali, lui, commença sous Mitterrand, puis se rendit indispensable à tous les Présidents français, imposant, sous tous les masques possibles, sa petite musique libérale-libertaire, qu'il déguisait en humanisme, un peu comme il aurait vendu un pantalon à une jambe plié sur la tranche. Aujourd'hui, il se confie à Livre noir et regrette la déferlante migratoire...

Terminons cette évocation des prophètes, vrais et faux, avec cette inquiétude de Raphaël Glucksmann, pour qui l'extrême droite serait une menace bien plus grave que l'islamisme. Eh bien, voyez-vous, ce ne serait pas surprenant qu'on découvre que finalement, Raphaël Glucksmann a toujours été un identitaire, un défenseur de la longue mémoire de l'Europe, et que seul un front uni face à l'islamisme pourra nous sauver. On verra ça.

Arnaud Florac
Arnaud Florac
Chroniqueur à BV

Vos commentaires

57 commentaires

  1. ça ne nous rajeunit pas, les vrais de la politique ont toujours été palcardisés par ceux qui voulaient garder leurs prébandes, regardez lang à 84 ans toujours président de l’institu du monde arabe, on a pas trouvé plus jeune à ce qu’il parait, tout comme quand il était maire de Blois en laissant aux restaurateurs des notes faramineuses parce que monsieur invitait ses amis sans bourse déliée, mais qui pénalisait les pauvres restaurateurs qui pensaient avoir un restour de pub, comme la bande à Miterrand qui se déplaçait à Hossegor en croyant qu’ils ne paieraient pas, couler les restaurateurs était uen marque de fabrique de la miterrandie.

  2. Nos responsables politiques français sont de piètres prophètes, d’ailleurs on ne leur en demande pas tant, on leur demande simplement d’être perspicaces, intellectuellement honnêtes, d’être capables d’anticiper, d’essayer de gérer la France comme ils nous demandent de gérer notre budget familial et d’être résolument à l’écoute du peuple français. Depuis quelques décennies on attend.. . M. Juppé n’a pas été – loin de là – le pire de ceux qui ont considéré les français comme des imbéciles. Quant à Jack, il a été un ministre de la culture acceptable mais hors de ce domaine il n’a que très très rarement été pertinent dans ses analyses.

    • Avec la «  Gay pride » il a surtout marqué son époque c’est pourquoi il est resté un indéboulonnable ministre de la culture dans les esprits de certains et à fait oublier en d’autres temps un certain Malraux, mais évidemment c’était il y a for longtemps, un temps où le mot « culture » avait un sens !

  3. Drapé dans leurs certitudes les faux prophètes ont un avantage de taille la communication et les médias subventionnés . Et avec internet la propagande s’est développée sans compter avec l’éducation nationale qui fait office d’éducation parentale . A partir de là il est vain pour le citoyen lambda de s’autodeterminer. L’être humain va toujours vers la facilité alors qu’on l’encourage il devient flasque et ne peut plus réagir face à l’abondance de belles paroles et pour couronner le tout l’argent qui va avec.En 2021-2022 le seul vrai prophète qui s’est dressé contre cette appauvrissement moral de ces élus c’est bien Éric Zemmour et le RN qui en reçu les Fruits. Les Le Pen père et fille furent aussi des prophètes mais sans pour autant avoir de l’ouverture vis a vis de la droite. Le génie de Philippe de Villiers et Éric Zemmour sont des hommes
    d’ouverture et de terroir qui ne transgressent pas notre belle culture que des générations entières par le sang et la sueur nous on transmis . rien n’est perdu ayons confiance dans notre destin travaillons a la restauration de notre pays.les élections de 2024 seront un élément majeur de cette restauration.

  4. Je vais juste commenter deux choses. Déjà, il faut constater que M. de Villiers n’a jamais cédé aux opportunismes et n’a pas « changé » ( ce qui est rare et notable _ ce n’est donc pas , selon moi, un « vrai » politique-politicard , toujours d’accord avec le dernier qui lui cause. Plutôt ce qu’on appelle un Homme d’ Etat ). L’échange avec Attali est drôle ( gonflé même de le remettre ainsi en place ). Mais surtout, le commentaire de Glucksmann est surréaliste ( Arno Klarsfeld _ qui a presque adoubé chez Rochebin LCI _ Marion Maréchal, est « situé » lui aussi à l’extrême droite dans ces conditions ). A t-il conscience que des propos de certains gens de gauche ou centre ( si ces mots ont encore un sens ) , aujourd’hui, sont ceux du FN il y a 30 ou 20 ans ! ? Totalement déraisonnable !

  5. « l’extreme droite » ! Un prétexte pour nous faire regarder ailleurs. C’est dans notre dos que cela se passe et toutes les forfaitures sont bonnes pour qu’on y regarde pas. Gluksmann et Salamé (et BHL) pourquoi ne sont-ils pas sur le front à Gaza ?

  6. Est-il vraiment pertinent et réaliste de mettre au même niveau Zemmour et Villiers ? Philippe de Villiers a toujours été un pilier, il s’est dressé envers et contre tous les vents mauvais sans jamais varier d’un iota. Zemmour, lui, se dresse comme un coq sur ses ergots, prétentieux arrogant et sûr de lui : « Je serai président, c’est inéluctable », « La Russie ne va pas envahir l’Ukraine », « Marine Le Pen est une idiote, elle est bête et incompétente », etc. Les électeurs, eux au moins, ont compris, ils l’ont gratifié de moins de 10% tandis que « l’idiote incompétente » frisait la première place. Sans l’intervention de Zemmour, elle serait aujourd’hui à l’Élysée. On peut dire merci à monsieur Zemmour, les Français n’oublieront pas son coup de pouce à Macron. Il en sera récompensé au niveau qu’il mérite.

    • Stupéfiant d’opposer deux intelligences de ce niveau, nullement ennemies de surcroît. Dommage qu’ils appartiennent à une droite qui reste la plus bête du monde par la faute de certains…

  7. « Celui qui dit la vérité, il doit être exécuté » chantait Béard…
    En tout cas, il ne faut jamais perdre une occasion pour mettre tout ces idéologues gaucho, face à leurs contradictions…

  8. Glucksman a aussi été le « Cohn-Bendit » en Ukraine en 2013, chargé de « foutre le bazar » place Maïdan pour déstabiliser le pouvoir ukrainien (comme DCB l’avait fait 45ans avant en France pour contrarier DeGaulle) et subventionné par Soros. Il en a été récompensé puisque le PS (quel intérêt ?) l’a présenté comme tête de liste aux dernières européennes et lui a donc offert un fauteuil et un salaire conséquent (payé par les contribuables).

  9. Quand je pense que Juppé fait partie des « Sages » du conseil constitutionnel, je préfère rester dans le rang des débiles.

  10. Il en est dans le politique comme dans le privé : les bons et mauvais prophètes . Dans le privé, des cadres s’inquiétaient, s’interrogeaient sur les effets de la désindustrialisation programmée. Perte du savoir faire, de l’emploi… Ils n’ont pas été écoutés. Dans le privé, vous émettez une idée qui sort du cadre entendu, convenu, vous devenez « hors la loi » , le petit canard qui dérange. L’Homme qui détient le pouvoir est ainsi fait. Il croit sa parole divine alors qu’il n’est que du commun des mortels. Lorsqu’il est ouvert, peu imbu de sa petite personne, il peut se montrer à l’écoute. Mais dans bien des cas, il ne prend même pas le temps de réfléchir à la proposition, à l’idée qui sort du cadre habituel. Il la rejette, trop innovatrice pour être comprise d’entrée, pour être inscrite en perspective. C’est la France vers laquelle nous conduit le macronisme. Rien de nouveau dans ce petit monde de progressistes qui me fait penser à cette fable de La Fontaine où il est question d’une grenouille qui veut se faire aussi grosse voire plus que …. Des petits à la tête enflée dirions nous dans nos provinces.

  11. Ne dit on pas « nul n’est prophète dans son pays », ou je me trompe ? Alors il ne peut y avoir de prophète qui dicte sa loi à l’univers, mais restons terrien. Les religions on pourrait presque dire qu’elles ont été faites pour « se battre ». Mais c’est probablement l’appât du gain, ou de notoriété, ou pire de domination universelle, de beaucoup de leurs représentants qui nous même à ce problème.
    Tout compte fait les politiques ou les religieux seraient sur un même mode de fonctionnement !
    L’actualité dans ces diverse religions nous le montre.

  12. Merci de nous dispenser des références à Zemmour, Attali, et Glucksmann ! Zemmour n’a rien à voir avec Philippe de Villiers, qui n’a jamais tourné casaque ! Quant à Attali et Glucksmann, ces pourfendeurs de la France, ils ont suffisamment de pub sur d’autres médias pour nous en passer !

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