[ÉDITO] Ils ont eu la peau de C8. Qui ça, « ils » ?

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Georges Fenech, chroniqueur à CNews, ne cache pas sa colère, sur le plateau de Pascal Praud, après l’annonce du rejet, par le Conseil d’État, de la requête de la société C8, confirmant ainsi l’arrêt de mort de C8 pris par l’Arcom. « Je voudrais vous parler très franchement, lance l’ancien député. Est-ce que le Conseil d’État était obligé de rendre cette décision ? Non, sur un principe fondamental, celui de la liberté d’expression, il y avait le principe de proportionnalité entre quelques dérapages qui ont été lourdement sanctionnés et la préservation de la liberté d’expression. » Conclusion, pour cet ancien magistrat : « Pour moi, il n’y avait pas photo pour conserver cette chaîne. »


Tout est légal, puisque le Conseil d’État en a jugé ainsi.

Proportionnalité ? Tiens, justement, une notion que l’on découvre, au milieu des six pages de l’arrêt du Conseil d’État. Rappelant les dispositions de la loi de 1986 relative à la liberté de communication pour justifier la régularité de la procédure de l’Arcom, cet arrêt précise très sérieusement que « ces dispositions transposent les objectifs de la directive du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2018 établissant un Code des communications électroniques européens, dont l’article 45 dispose que "les États membres […] veillent à ce que l’attribution des droits d’utilisation individuels du spectre radioélectrique pour les réseaux et les services de communications électroniques […] soient fondés sur des critères objectifs, transparents, favorables à la concurrence, non discriminatoires et proportionnés" ». Au passage, un exemple très concret qui tend à démontrer, d’une part, que le Parlement n’est qu’une chambre d’enregistrement des directives européennes (on dit « transposition » !), d’autre part, que la boussole du Conseil d’État pour rendre la justice administrative de notre pays est à Bruxelles et non à Paris. Pour une institution qui rend la justice administrative « au nom du peuple français » et s’enorgueillit d’être l’héritier du Conseil du roi, c’est pour le moins singulier. Mais tout ça est légal, il n’y a rien à dire. De même qu’il n’y a rien à dire sur la décision de l’Arcom : tout est légal, puisque le Conseil d’État en a jugé ainsi.

Beaucoup de socialistes, tout de même...

Mais revenons aux propos de Georges Fenech qui n’en reste pas aux apparences et qui va gratter un petit peu, pour reprendre ses propres mots. « Vous parlez des petits hommes gris. Moi, j’aime bien connaître mon adversaire, car c’est un adversaire qui a pris cette décision. » Qu’insinue Fenech ? Rien. Il n’insinue pas – il n’est pas comme Juliette Méadel, lui ! -, non, il affirme.

Qui est président de la section du contentieux, au Conseil d’État, chargé comme son nom l’indique de juger les conflits entre citoyens, associations ou entreprises (en l’occurrence C8) et l’administration (en l’occurrence l’Arcom) ? Christophe Chantepy, nommé à cette haute fonction en 2019 par Édouard Philippe. L'homme a servi dans les cabinets ministériels de Michel Charasse, Édith Cresson, Pierre Bérégovoy, a été directeur de cabinet de Ségolène Royal puis de Michel Sapin, animateur de la campagne présidentielle de Ségolène Royal, directeur de cabinet du Premier ministre Jean-Marc Ayrault. Que des socialistes. Il est vrai que Chantepy entra au PS en 1980. Petit geste commercial de la maison rose : en 2015, alors qu’il n’avait jamais été diplomate, il se voit offrir l’ambassade de France en Grèce.

Qui est au-dessus de M. Chantepy, dans l’organigramme du Conseil d’État ? Didier-Roland Tabuteau, vice-président (le titre de président n’existe pas, lointain souvenir des temps où le Conseil d’État était présidé par le chef de l’État), nommé en 2022 par Emmanuel Macron. Lui aussi présente un parcours semé de roses : cabinets de Claude Évin et Martine Aubry, directeur de cabinet par deux fois de Bernard Kouchner. Que des socialistes. Encore.

Mais on est bien d’accord : tout cela n’a rien à voir avec la décision de justice prise par « le Conseil d’État statuant au contentieux (section du contentieux), sur le rapport de la 5e chambre de la section du contentieux, au nom du peuple français ». Tiens, justement, le peuple. Cyril Hanouna, commentant, mercredi soir, cette condamnation à mort de C8, voyait les choses un tantinet différemment : « À chaque fois qu’on a pris le parti du peuple, on a dérangé. » Dérangé qui ? Qui est cet « adversaire », pour reprendre le mot de Georges Fenech ? Hanouna a sa petite idée. Le PS, Macron ? Même pas, à écouter l'animateur-vedette... Quel qu'il soit, quoi qu'il en soit, un adversaire, voire un ennemi de la liberté d'expression.

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Georges Michel
Editorialiste à BV, colonel (ER)

Vos commentaires

89 commentaires

  1. . Cette « décision » signe un arrêt de mort. En apparence celui de la chaîne C8. En réalité celui d’un président de la République (et de son « système de copinage » que les Français dans leur immense majorité jugent incapable de les défendre et de défendre leurs liberté publiques fondamentales : sécurité, identité nationale, liberté d’expression, laïcité, Pire de conduire des politiques qui les détruisent à petit feu. Mais sûrement.

  2. Nous sommes entré dans l’ère du procès d’intention et du délit d’opinion, on est même dans certains cas proche du Kompromat soviétique. Depuis 2019 la répression accélère, le carton rouge fascisant ne fonctionnant plus, la censure devient légitime.

  3. Comme le rappelle Sarah Knafo, les trois plus importantes instances non élues de not « République » (on peut dès lors douter de cette république) sont tous des PS avérés : Au Conseil d’Etat comme cité, à l’ARCOM ,ainsi qu’au Conseil Constitutionnel (Fabius bientôt remplacé par un autre socialiste sur nomination de Macron). Or, comme cette charmante dame le précise, le PS a obtenu aux dernières élections présidentielle le score remarquable de 1,75% ! Et c’est avec ce score magistrale qu’ils trustent toutes les instances dirigeantes, y compris l’Assemblée Nationale par ailleurs ! République bananière où les moins représentatifs sont les plus haut placés.

  4. L’ARCOM est devenu le Ministère de la Vérité d’Orwell. Comment peut-on admettre (quand je dis « on » je parle évidemment de tous nos chers politiques, Macron en tête) qu’une administration soi-disant indépendante soit gangrénée par la gauche « bien-pensante » et soit téléguidée par ce pseudo camp du bien qui fait taire les oppositions de façon systématique ? Non content d’avoir matraqué C8 d’amendes mirobolantes, cet organisme signe la double peine du non renouvellement de la chaîne. Si une telle chose venait à se produire dans un pays comme la Russie ou la Hongrie, « on » hurlerait au scandale. JD Vance a eu mille fois raisons de tancer les minables dirigeants européens qui, pour la plupart, n’ont même pas obtenu leur mandat démocratiquement. Ah, elle est belle la liberté d’expression quand on vous impose une idéologie gaucho-wokiste qui fait l’apologie de la culture de l’effacement. Relisez Orwell, messieurs-dames de Bruxelles : vous êtes les (in)dignes héritiers de la Police de la Pensée ! En tout état de cause, le peuple français n’est plus souverain en France car il n’est plus dirigé démocratiquement – l’Etat Profond (qui n’a rien à envier au Deep State américain) a pris le dessus et ce sont des instances non-élues (grassement payées par nos impôts) où sont recasés les copains-copines qui, au final, ont systématiquement le dernier mot. Vincent Bolloré devrait pousser le paradoxe quasi dystopique jusqu’au bout et faire appel de la décision à la CEDH… après tout, pourquoi pas ?

  5. Mon cher Georges,
    Pardonnez cette liberté que je prends de vous traiter en ami mais quand on est effondré il arrive que l’on ait besoin de se raccrocher à des repères sains.
    Cette décision est une honte pour la France , une insulte à l’intelligence et sera pour Roch-Olivier Mestre rien d’autre qu’une monumentale bêtises qui ne sera jamais sanctionnée ,et comme dirait Macron , couac il en coûte aux 400 salariés qui collaborent à cette belle aventure.
    Et Macron n’était pas au courant ? Avec Alexis Kohler aux commandes ( encore pour quelques jours) mais on se moque du monde et comme dirait Jean Yann  » Tua fouttere gueulam mea « .
    Merci pour la pertinence et la propreté de vos propos , vous diffusez autant de bienêtre que de bon sens.
    A bientôt.

  6. Toutes les réalisations ont un auteur et des acteurs…le cinema au début ou fin du film la liste des intervenants, une pièce de théâtre, un édifice..son architecte, une équipe nationale…son sélectionneur, une loi prend le nom du député qui l’ a porte, Etc….Alors faire pareil pour les auteurs des grandes décisions, ceux qui décident dans le noir ou ceux qui se pensent les maitres du monde comme les magistrats, lors des procès les médias doivent faire la liste des juges et des présidents des tribunaux. Pas d’ anonymat pour les décisionnaires d’engagements dans la suite des politiques, « ils » sont identifiables autant les faire connaitre.

  7. Il ne faut pas feindre de s’interroger sur le « ils ». C’est très bien décrit dans l article. L’état profond tient encore les rennes opérationnels du pays, alors qu’il a perdu la bataille des idées. Il y a encore du chemin à faire pour reprendre les rennes… Et encore, méfions nous de nous même et de notre ennemi intérieur. Le morcellement de la droite avec ses partis, ses chapelles, ses courants et ses candidats n’a pas fini de nous faire perdre…

  8. Après avoir noyauté toutes les instances de pouvoir sans autre réaction de la part de la droite, la gauche, par l’intermédiaire d’un Macron dépourvu de tout pouvoir, sauf celui de nuire, continue son oeuvre de destruction de la France.

  9.  » Ils », c’est un système. Mais quel système ? Bon, on le sait maintenant. Ce sont des « politiques » ( idéologues ) qui sont dans les Institutions les plus importantes. Le Conseil d’ Etat existe pour le peuple contre l’arbitraire, ou les abus de l’Etat envers le citoyen. En l’espèce, C8 plaisait à une majorité du peuple. D’autres étaient neutres ( ne connaissaient pas), et enfin d’autres_une poignée_ militent contre M. Bolloré… / C8 a reçu une amende ! Non contents, « ils » ferment la chaine. Tout cela ressemble bien à une opération politique ( quant à l’Arcom, pas besoin de beaucoup développer. Par qui sont-ils nommés ? ) Abusif que tout cela.

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