« Ils sentaient mauvais » : la France périphérique méprisée par Mélenchon

Capture d'écran X
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« Il faut mobiliser la jeunesse et les quartiers. Là se trouve la masse des gens qui ont intérêt à une politique de gauche. Tout le reste, laissez tomber, on perd notre temps. » Ce samedi 7 septembre, dans le cortège d’une manifestation parisienne, Jean-Luc Mélenchon s’est laissé aller à quelques confidences sur sa stratégie politique en vue des prochaines élections. Dans une séquence filmée par les équipes de Quotidien, le leader de La France insoumise explique ainsi à l’une de ses militantes que son parti doit désormais miser uniquement - ou presque - sur les quartiers populaires pour espérer l’emporter. Une stratégie qui ne fait pas l’unanimité, au sein de son propre camp où certains rêvent encore de reconquérir l’électorat ouvrier et rural parti au Rassemblement national.

La stratégie Terra Nova

Treize ans se sont écoulés depuis la publication de la désormais célèbre note de Terra Nova, ce laboratoire d’idées proche du Parti socialiste, qui préconisait à la gauche d’abandonner les ouvriers au profit « d’autres segments électoraux », à savoir « les diplômés, les jeunes, les minorités des quartiers populaires et les femmes ». Cette note n’a pourtant pas pris une ride. Aujourd’hui, Jean-Luc Mélenchon, leader autoproclamé de la gauche, assume en effet ne plus vouloir « perdre [son] temps » à convaincre et à se soucier de la France périphérique pour être élu. Passé à 400.000 voix du second tour en 2022, le chef de file des Insoumis espère puiser auprès des minorités et des banlieues les bulletins nécessaires à son élection.

Cette stratégie n’est pas nouvelle. Cela fait maintenant près d’une dizaine d’années que Jean-Luc Mélenchon la teste et la développe avec un succès non négligeable. Pour s’en rendre compte, il suffit de regarder la carte électorale des législatives de 2024. Le Nouveau Front populaire, et surtout La France insoumise, réalise ses meilleurs scores dans les quartiers dits populaires. Le département de la Seine-Saint-Denis est emblématique. 100 % des douze circonscriptions du 93 ont été remportées par un candidat de gauche, lors du dernier scrutin. Neuf d’entre elles ont même élu un candidat investi par La France insoumise (ou dissident de La France insoumise). Et ce, alors qu’en 2012, Jean-Luc Mélenchon, candidat à la présidentielle, n’arrivait dans ce département qu’en troisième position, derrière François Hollande et Nicolas Sarkozy. Preuve que l’ancien leader du Front de gauche a tout misé sur ces territoires et y a mené une campagne ciblée.

Mépris pour la France rurale ?

En effet, comme le raconte François Ruffin au micro de BFM TV, ce 11 septembre, La France insoumise mène depuis plusieurs années des « campagne[s] au faciès ». En 2022, « dans les immeubles d’Amiens-Nord quand je tombais sur un Noir ou un Arabe, je sortais la tête de Mélenchon en bien gros sur les tracts, c’était le succès presque assuré. Mais dès qu’on tombait sur un Blanc, ça devenait un verrou. » Résultat : les électeurs d’origine africaine placent Mélenchon en tête de leurs intentions de vote (sondage IFOP pour Jeune Afrique). Même constat auprès de l’électorat musulman. Alors qu’aucun autre groupe social n’a voté massivement pour un candidat en particulier lors des élections européennes de 2024, les Français de confession musulmane ont majoritairement (plus des deux tiers) voté pour Jean-Luc Mélenchon.

Mais la stratégie de Jean-Luc Mélenchon, si elle est payante d’un point de vue électoral, ne fait plus l’unanimité, au sein de son propre camp. François Ruffin, allié de La France insoumise, publie ainsi un livre dans lequel il revient sur sa divergence de point de vue avec le leader insoumis. À nos confrères du Nouvel Obs, il explique ainsi qu’un « désaccord électoral et moral s’est creusé avec Jean-Luc Mélenchon ». Celui qui veut « rassembler le peuple de gauche, celui de la France rurale et des quartiers », dénonce aujourd’hui la stratégie mélenchoniste qui consiste, selon lui, à « miser tout sur la jeunesse et les quartiers populaires » et à « découper la France en segments ». Il accuse même le tribun d’avoir méprisé les électeurs d’Hénin-Beaumont (Pas-de-Calais), territoire de la France périphérique, lorsqu’il y était candidat. « Quand il me racontait Hénin, c’était à la limite du dégoût : "On ne comprenait rien à ce qu’ils disaient…", "Ils transpiraient l’alcool dès le matin…", "Ils sentaient mauvais…", "Presque tous obèses…" », écrit le député de la Somme, dans son livre. Les électeurs apprécieront…

Clémence de Longraye
Clémence de Longraye
Journaliste à BV

Vos commentaires

31 commentaires

  1. ENFIN un moment pour me réjouir !! Ruffin se lâche et « crache dans la soupe  »
    y aurait ‘il du Rififi chez LFI ? Camarade ?
    Quel que soit le bord politque, la « caste » méprise le peuple,en a peur .La preuve : référendum de 2005
    c’est Raffarin le 1er qui a utilisé l’expression « les gens d’en bas ; il visitait les restos du coeur et je me suis dit :  » il n’a pas honte ? c’est grace à eux cette misère « (sous SARKO )
    et nous voilà repartis pour 1 tour en plus dur .le Bla bla est la seule chose qui progresse en France

  2. Ce type est méprisable mais il bénéficie toujours d’une grande mansuétude de la part des médias dits mainstream. Quand Chirac avait parlé du « bruit et des odeurs » dans les années 80, les anti-racistes lui étaient tombés dessus. Toujours ce deux poids deux mesures insupportable! Quant à Ruffin… l’attitude de son chef de file ne le dérangeait pas beaucoup jusqu’à récemment. Je me méfie toujours de ces « dissidents » qui crachent dans la soupe pour mieux se faire mousser…

  3. Ah cette bourgeoisie politique bobo de gauche, rappelez-vous: « les sansdents » ! Que des amis des « gens d’en bas » ! Remarquez chez la concurence ils ne sont pas en reste,, je me souviens d’un sarkoziste qui déclarait vis à vis des immigrés:  » quand il y en a un ça va, c’est quand il y en a plusieurs que ça pose problème », et je pense que mélenchon ne doit pas non plus se gêner avec sa base électorale !

  4. Au delà des invectives et des ironies graveleuse, êtes vous conscients qu’il existe une importante population pas blanche et pas Chrétienne ? Le mépris et le rejet ne sont certainement pas la meilleure prise en compte de cette réalité. Attention, en 1789 ce n’était pas les bourgeois qui battaient le pavé.

  5. Et pourtant ils sont encore nombreux, dans les périphéries, à croire encore aux promesses de grand soir de LFI. Melenchon leur crache dessus mais ils continueront à le soutenir. A gauche ou à droite, l’idéologie ne se remet pas facilement en cause et elle fat accepter souvent l’inacceptable. Remettre en cause une idéologie qui nous suit depuis les jeunes années est impossible pour beaucoup car elle signifie que l’on se serait tromper une bonne partie de sa vie. Alors, les gens ne voient et retiennent que ce qui les conforte dans leur « endoctrinement ». La remise en cause, l’éveil de conscience, le retour au réel, c’est à dire d’accepter de sortir de sa zone de confort, font terriblement défaut en France. Les français ne sont pas prêts à faire les efforts intellectuels mais aussi professionnels pour recréer de la prospérité en France. Ils préfèrent s’en remettre à l’Etat ; alors, logiquement, ce dernier leur prendra tout : liberté et économies.

  6. Après la France rance et moisie, voici les Français gros, alcooliques et qui puent. Comme stéréotype raciste, difficile de faire mieux. Mais c’est de gauche … donc forcément justifié et inattaquable. Si M. Zemmour avait le quart du dixième du commencement d’une idée comme celle-là, il aurait déjà été traîné devant les tribunaux par une demi-douzaine d’associations et bien sûr condamné à la peine la plus lourde.

  7. Et oui quoi attendre d’un type qui a usé ses fondements sur les maroquins de la république, gavé à l’argent public . Riche le melenchon ( vous noterez que je n’ai pas mis de majuscule , ça se mérite et comme je n’ai aucun respect du bonhomme j’e l’écris tout en minuscule) sans avoir investi un centime de son propre argent et qui veut dire aux entrepreneurs comment diriger leurs entreprises ??
    Pour les gens du Nord il est très glamour l’inverse d’un Enrico qui leur avait écrit une si belle chanson pour les remercier de leur accueil !! c’était il y à longtemps quand ces gens avaient le respect d’eux même, parce qu’ils avaient du travail , aujourd’hui si il les méprisent autant, c’est qu’il porte avec ses copains de gauche la honte des faux espoirs qu’ils leurs avaient vendu pour continuer à s’enrichir sur leur désespérance !!

    • Parce que s’il est « méprisable », il n’est pas encore « méprisé ». Ces dernières semaines nous avons assisté à deux sortes de séquences de « jeux paralympiques » : ceux flamboyants organisés par le Comité International Paralympique et ceux fades et ennuyeux organisés par les Derniers Mohicans de la Gauche

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