Indépendance de la justice : attention à ne pas tout casser !
3 minutes de lecture
Régulièrement, sous la pression d'événements politico-judiciaires, la question de l'indépendance de la Justice dans notre pays est remise en question. C'est ainsi qu'une nouvelle polémique, mettant en cause un ancien ministre de la Justice (Jean-Jacques Urvoas) et un député nouvellement "marcheur" (Thierry Solère) vient de relancer le débat. Les faits sont maintenant connus. Le second, alors qu'il était député, aurait demandé au garde des Sceaux de François Hollande de l'informer sur une enquête judiciaire en cours le concernant.
De telles pratiques, qui attestent de la collusion qui existe entre les acteurs du monde politique et de la Justice, sont et ont toujours été des plus courantes. Le passé est en effet porteur de nombreux exemples ayant défrayé la chronique, l'un des plus marquants ayant même valu, il y a peu de temps, à un ancien président de la République d'être mis en examen pour "trafic d'influence" et "corruption". Mais au-delà de ces faits divers qui entachent la République, la question demeure de savoir comment mettre un terme à des pratiques qui contribuent à éloigner les Français de la vie politique et à se montrer de plus en plus critiques vis-à-vis de leurs élus.
L'indépendance de la Justice et des magistrats serait donc une réponse aux dysfonctionnements que l'on constate régulièrement. Aujourd'hui, la Constitution et les lois qui concourent à l'organisation judiciaire française consacrent l'indépendance des magistrats du siège. Ces derniers, chargés de rendre des jugements "au nom du peuple français", sont inamovibles et leurs décisions ne peuvent être contestées que dans le cadre de l'exercice des voies de recours. Les magistrats du parquet, en revanche, sont soumis à l'autorité hiérarchique, le ministre de la Justice étant l'ultime maillon d'une chaîne qui peut parfois se montrer pressante. C'est donc l'indépendance des seconds qui se pose à nouveau. Et la question qui sous-tend ce débat est bien de savoir si, une fois totalement détachée du pouvoir exécutif, donc politique, la justice y gagnerait en efficacité, en objectivité et surtout en impartialité.
Tout d'abord, il convient de rappeler que les procureurs généraux et de la République, sont les représentants de la société au nom de laquelle, lors du procès pénal, ils exercent l'action publique. Une indépendance effective leur donnerait-elle la même dimension ? Ensuite, la subordination du parquet à l'exécutif permet, même s'il existe des possibilités d'adaptations locales, la mise en œuvre d'une politique pénale cohérente au niveau national. Là encore, qu'en serait-il en cas d'autonomie des procureurs ? Enfin, l'indépendance de l'autorité judiciaire, telle qu'elle est reconnue dans nos textes fondamentaux, ne nécessiterait-elle pas, à brève échéance, des réformes institutionnelles beaucoup plus larges ? En effet, dans ce contexte, deux questions surgiraient aussitôt. D'une part, le devenir de l'action de la police judiciaire. Il y a fort à parier que le rattachement, à la Justice, des services de police et de gendarmerie, ne serait-ce que pour donner de la cohérence à une réforme qui ne peut qu'être globale, se poserait aussitôt. D'autre part, l'avenir de l'action syndicale au sein d'une institution qui, devenue indépendante du pouvoir politique, ne saurait demeurer soumise à des influences forcément partisanes.
Certes, les politiques sont responsables des errements auxquels nous assistons. L'instrumentalisation de la Justice à laquelle ils se sont livrés au cours de ces dernières années en est la preuve. Mais l'équilibre indispensable à une bonne administration de la Justice doit être préservé. Il en va de l'avenir de notre démocratie.
BVoltaire.fr vous offre la possibilité de réagir à ses articles (excepté les brèves) sur une période de 5 jours. Toutefois, nous vous demandons de respecter certaines règles :