Indicateur du bonheur de l’ONU : les Français seraient-ils de plus en plus malheureux ?

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Longtemps, les instituts internationaux ont classé les pays en ne retenant que des indicateurs de type PNB ou PIB. Mais depuis 2011, l’ONU parraine le World Happiness Report, censé mesurer, lui, le bonheur des populations. Dans ce classement, la France ne pointerait qu’au 23e rang mondial. En haut du hit-parade de la jovialité ? Les pays nordiques et batave ; ce qui a de quoi laisser perplexes sur les modes de calcul, pour nous Français, en tout cas.

En effet, il n’est pas sûr que nos compatriotes s’épanouissent forcément en ces terres ayant inventé social-démocratie, féminisme niais, invitation au vivre ensemble, pornographie de masse et dans lesquels, pour tout arranger, on passe à table à dix-huit heures tout en ayant sauté la case apéro.

En la matière, un pays fut longtemps précurseur : le royaume du Bhouthan, en Asie du Sud-Est, là où, en 1972, Jigme Singye Wangchuck, monarque absolu, théorisa le Bonheur national brut, entendant au passage protéger les traditions ancestrales de son peuple. On notera que ce joyeux pays – peuplé de boute-en-train, on imagine – dut attendre 1999 pour avoir la télévision et s’ouvrir à Internet. Il n’est pas certain qu’ils y aient gagné au change.

Revenons-en à la France, pays longtemps champion du monde de consommation d’antidépresseurs, là où Emmanuel Macron nous assure le prochain retour des « jours heureux » et de « notre art de vivre à la française ».

Venant de lui, voilà qui laisse pantois, étant l’homme pour lequel « la culture française n’existe pas ». D’ailleurs, comment vanter un « art de vivre » que lui et ses prédécesseurs n’ont cessé de saccager ? Entre ronds-points ignobles, centres commerciaux sans âme, panneaux publicitaires à vomir, ce sont les entrées de nos villes qui ont été consciencieusement défigurées. Qu’on y ajoute les éoliennes et les installations d’art conceptuel et la laideur y règne en maître.

L’art de vivre à la française consiste encore aux plaisirs de la table et de la discussion. Mais l’époque où un solide repas se soldait par un cigare et quelques digestifs est bien révolue. La tyrannie hygiéniste est là et ses sbires chargés de nous le rappeler à chaque carrefour, éthylomètre à la main.

D’ailleurs, échanger opinions et points de vue autour d’une côte de bœuf peut désormais perdre tout son sel. Déjà parce que la viande en question, les vegans entendent nous l’interdire et qu’aujourd’hui, tout un chacun est susceptible d’être choqué, blessé par le moindre propos qu’on aurait jugé anodin il n’y a pas si longtemps. Exemple : « Il y a peut-être trop d’immigrés en France… » L’accusation de « racisme » peut sortir à tout instant. Que dire, alors ? « Il n’y a pas assez d’immigrés en France, ou alors juste ce qu’il faut. » Ça devient compliqué… Surtout quand on tente de détendre une atmosphère déjà plombée par une bonne blague. Tex ? À éviter, car ce signifierait que vous cautionnez les violences conjugales. Coluche ou Pierre Desproges ? Terrain des plus glissants, ces deux-là ayant jadis proféré des horreurs qui ne passeraient plus la rampe en ces temps de grande sensibilité.

Là où ça se complique plus encore, c’est quand on passe de la carte des vins à celle du Tendre. Trousser un compliment à une jolie fille, surtout si vous l’appelez « mademoiselle », est un exercice hautement périlleux. D’abord, il vous sera rétorqué que seuls les mâles blancs nostalgiques du patriarcat utilisent encore le charmant vocable de « mademoiselle » et que la courtoisie fait partie inhérente de la culture du viol. Car tout homme est un violeur en puissance. La preuve ? Il porte toujours l’arme du crime sur lui.

Il n’est pas fait avéré que tout cela puisse rendre les Français malheureux ; mais il ne l’est pas non plus qu’ils en soient plus heureux pour autant. En tous cas, il n’est pas illicite de les trouver forts patients devant un tel acharnement à pourrir, justement, leur « art de vivre à la française ».

Nicolas Gauthier
Nicolas Gauthier
Journaliste à BV, écrivain

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