Insolite : Aymeric Caron préfère habiter Versailles que le XVIIIe

Aymeric Caron

La péripétie, croustillante, a fait beaucoup gloser sur les réseaux sociaux. Aymeric Caron, en retard pour accompagner sa fille à l’école, aurait forcé le portail pour emmener celle-ci dans la salle de classe, en dépit du règlement de l’école et de l’interdiction notifiée par la directrice. Excédée - il s’agirait du troisième épisode de ce type depuis la rentrée, sans compter l’an passé -, la directrice a appelé la police. Lorsque celle-ci est arrivée, le député était déjà parti.

Sur X (anciennement Twitter), Aymeric Caron tente de se justifier, excipe de la pluie qui l’avait poussé à ne pas laisser sa fille dans la cour avec les autres retardataires et laisse entendre - complotisme, quand tu nous tiens - qu’il s’agirait d’une diversion médiatique de l’académie de Versailles au moment où celle-ci est pointée du doigt. On imagine, bien sûr, la directrice de l’école appeler en douce Charline Avenel avec un petit rire sardonique.

Cela peut arriver à tout le monde, d’emmener ses enfants après l’heure, mais il est d’usage, alors, de faire profil bas, de présenter ses excuses et de laisser son enfant entre les mains de l’adulte qui vous ouvre la porte. Certes, qu’un député apparenté à La France insoumise ait du mal avec l’ordre établi, y compris celui de l’école maternelle, n’est pas très étonnant. Mais ce qui a fait réagir est moins l’altercation avec la directrice de l’école que l’école elle-même, ou plus précisément sa localisation : à Versailles, dans le quartier Notre-Dame. C’est donc dans le quartier le plus chic de la ville royale que vit et scolarise son enfant un élu du parti zélateur de Robespierre et de la mixité sociale.

Certes, il n’est pas le seul dans son cas ! 

Aymeric Caron déserte le XVIIIe arrondissement, dans lequel il est élu, a tourné le dos à l’enrichissement de la diversité et du vivre ensemble pour rejoindre catholand. Le célèbre député d'extrême gauche a fait le choix des jolies façades en pierre de taille, des parcs où s’ébattent des blondinets habillés chez Cyrillus et des myriades de scouts en uniforme, des paroisses pleines comme des œufs, des rues pavées où il n’est pas rare de croiser des curés en soutane. On le comprend. Mais pourquoi impose-t-il à d’autres, et bâtit-il par son action politique, le cadre de vie auquel il tourne le dos ?

Certes, il n’est pas le seul dans son cas. Au premier tour de l'élection présidentielle, si Éric Zemmour, avec ses 18,48 %, a obtenu à Versailles un résultat bien supérieur à sa moyenne nationale, extrême gauche et gauche cumulées - Mélenchon, Jadot, Hidalgo, Roussel… - le dépassent, réunissant 22,49 % des suffrages. On peut être de gauche et malin, n’est-ce pas ? Ricaner des catholiques pratiquants et des conservateurs, les conspuer et les mépriser, mais préférer leur progéniture à d’autres sur les bancs de l’école aux côtés de ses propres enfants, la sachant généralement bien élevée et studieuse.

C’est si vrai que la sociologie de la ville royale change peu à peu. Les Parisiens, fuyant le maire qu’ils ont pourtant élu, plébiscitent Versailles. « Dans les Yvelines, Versailles enregistre un afflux de Parisiens attirés par le cadre de vie de la ville du Roi-soleil », pouvait-on lire dans le JDD du 1er novembre 2019. S’ils n’y cherchaient que des espaces verts, Trappes ou Plaisir feraient aussi bien l’affaire. Cela va donc bien au-delà : c’est tout un art de vivre bourgeois, une tranquillité provinciale - « Versailles, c’est la ville de province la plus proche de Paris », dit souvent Franc Ferrand - qu’ils recherchent et que, pourtant, les politiques qu’ils portent au pouvoir n’ont de cesse de dénigrer.

Carpe diem. Aymeric Caron a raison de profiter de Versailles…

Sous la pression immobilière et dans un mouvement centrifuge similaires aux grandes métropoles, les familles traditionnelles versaillaises nombreuses, souvent mono-actives (selon les critères du PIB, car si vous dites à une mère de famille nombreuse au foyer qu’elle n’est pas active, vous risquez de vous retrouver avec son plat à gratin sur la tête), décrochent et refluent aux périphéries (Rambouillet, Villepreux, etc.).

Comme dans les villes où la cote immobilière est prohibitive, ne resteront bientôt que les très hauts salaires - plusieurs patrons du CAC 40 vivent à Versailles et, selon un agent immobilier local, les maisons à trois millions d'euros du quartier des Prés ou Glatigny, autour du plateau Saint-Antoine, s’arrachent… - et les logements sociaux. Aucune raison que la ville royale ne suive pas la trajectoire des autres villes bourgeoises jadis réputées trop tranquilles, telles Bordeaux et Nantes. Versailles a déjà ses quartiers « sensibles » populaires - loin de celui d’Aymeric Caron -, ses barres d’immeuble mal famées en nombre et ses problèmes de drogue - Jussieu-Petits-Bois, par exemple. Chantiers ne doit sa relative tranquillité qu’à la présence de logements sociaux habités par des militaires et leur famille. Mais c’est non loin de la gare du même nom, derrière le cimetière des Gonards, qu’il y a quelques jours, une femme de 67 ans a été séquestrée et violée durant toute une nuit.

Carpe diem. Aymeric Caron a raison de profiter de Versailles, tant que les élus de son espèce ne l’ont pas défiguré.

Gabrielle Cluzel
Gabrielle Cluzel
Directrice de la rédaction de BV, éditorialiste

Vos commentaires

53 commentaires

  1. voilà le type même de l’écolo, rat des villes qui vous explique comment vivre à la campagne et que les éoliennes est l’électricité de l’avenir, c’est pourquoi il est à Versailles, bien planqué, les gueux lui serviront l’électricité en perdant chaque jour un peu plus de liberté,

  2. Quoi d’étonnant ? Par ailleurs, une question me taraude. Le défenseur des moutiques _ il nous a bien émus avec maman moustique qui nourrit son petit etc _ va t-il réagir , et comment ? , face à la programmation de lutte contre les puces , comment ce M. va t-il réagir ? ( puces ou autre espèce ; punaises de lit je crois ). S’il est cohérent et conséquent, sa prise de position _ contre ses camarades ? _ devait être implacable. Nous attendrons cette prise de position.

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