Ismaël Emelien quitte l’Élysée : sauve qui peut en Macronie !

Ismaël Emelien

Il fallait "gouverner autrement", car c’était "son projet". Si l’on résume, Emmanuel Macron entendait tout révolutionner de la pratique d’un pouvoir tenu pour "vertical", mais auquel il s’agissait encore d’ajouter de "l’horizontalité". Et c’est ainsi qu’on finit par se retrouver cul par-dessus tête.

On les surnommait "les mormons" – et pourquoi pas les Castors juniors, les adventistes du septième jour ou les Rapetou ? –, ces premiers Marcheurs ayant accompagné la victoire fulgurante de l’actuel Président et squatté, des mois durant, les couloirs du Château. De ce dernier carré, il ne reste quasiment rien, depuis le départ d’Ismaël Emelien, l’un de ses plus proches factotums.

Officiellement, ce dernier partirait écrire un livre. "On est bien seuls aujourd’hui à défendre le progressisme, on a besoin de relais dans la société et au-delà de nos frontières, et je pense que c’est dans cette position que je serai le plus utile", affirme-t-il sans rire.

Officieusement, les têtes ayant de trop près approché celle d’Alexandre Benalla, décidément de plus en plus encombrante, tomberaient les unes après les autres. En effet, ce serait Ismaël Emelien qui aurait procuré à ce même Benalla des bandes vidéo susceptibles de le disculper lorsqu’il avait pris sur ses congés pour bousculer un couple de gauchistes. Il va sans dire que l’Élysée dément "tout lien" entre ces deux événements.

Hormis les versions "on" ou "off" de l'affaire, il n’est guère besoin d’être fin analyste de la chose politicienne pour avancer que les rats quittent un navire en voie de perdition. Sylvain Fort, plume présidentielle, est retourné à sa carrière universitaire. Stéphane Séjourné à la campagne des prochaines élections européennes.

Heureusement pour l’avenir d’Emmanuel Macron en particulier et celui de la France en général, demeure la meilleure d’entre eux : Sibeth Ndiaye, très précieuse conseillère en communication d’Emmanuel Macron, qui porta la parole élyséenne à des sommets himalayens en tweetant, à l’occasion de la mort de Simone Veil : "Yes, la meuf est dead." Louis XIV avait Louis de Rouvroy de Saint-Simon pour chroniquer son règne ; le mec à Brigitte Trogneux, lui, a Ndiaye Sibeth. C'était si bête pour assurer sa postérité vis-à-vis des générations à venir, mais encore fallait-il y penser.

C’est, d’ailleurs, là que le jeunisme, aussi ambiant que béat, régnant dans des bureaux jadis occupés par le général de Gaulle – là, on se pince, juste histoire d’éviter le cauchemar éveillé – semble atteindre ses limites. La preuve en est que même un François Bayrou, revenu de tout puisque n’étant jamais allé nulle part, se serait inquiété en privé et en ces termes : "Cela dysfonctionne !" Vraiment ?

Et quand il y a le feu au lac, quoi de mieux que de faire appel aux vieux briscards ? D’où l’arrivée, le 4 février dernier, de Philippe Grangeon, sexagénaire connu pour avoir conseillé Nicole Notat et Dominique Strauss-Kahn. "The right man in the right place", comme on dit chez les Anglo-Ricains. Gageons que ce grand communicant ne fut pour rien dans le torpillage de la CFDT et de l'imperdable candidature de DSK en 2012, et que l'on tient sans doute là l’expert propre à anticiper un avenir radieux et sauver la planète de la "lèpre populiste"...

Bref, la Macronie se met en ordre de marche pour cette bataille, mère de toutes les batailles. En attendant le ralliement d’autres spécialistes incontestés en matière de renaissance politique ? Alain Carignon ou François Fillon ? Fripounet ou Marisette ?

Le suspense est insoutenable.

Nicolas Gauthier
Nicolas Gauthier
Journaliste à BV, écrivain

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