Italie : comment Meloni met les ONG pro-migrants en échec

Valeria Ferraro/SOPA Images/Shutterstock
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Le gouvernement de Giorgia Meloni vient de remporter une victoire décisive sur le front migratoire. Depuis l'annonce, le 13 décembre dernier, de la suspension des opérations du navire Geo Barents de Médecins sans frontières (MSF), engagé depuis 2021 dans le sauvetage de migrants en Méditerranée, Rome ne cache pas sa satisfaction. L’association a dénoncé un cadre juridique devenu « intenable », notamment à cause du décret Piantedosi, adopté en 2023 et durci récemment pour faciliter la confiscation des navires humanitaires.

Ce texte a entraîné une immobilisation répétée du Geo Barents de MSF : il a passé 160 jours à quai en deux ans, souvent dans des ports éloignés. MSF a pointé une volonté délibérée de Rome de rendre ses opérations impossibles. Si cette décision marque un coup dur pour les ONG, elle reflète une stratégie bien rodée du gouvernement italien, qui a aussi drastiquement réduit les arrivées de migrants : 64.846 en 2024 contre 153.585 en 2023, soit une baisse de près de 60 %, selon les chiffres du ministère de l’Intérieur italien. Une baisse largement encouragée par les Italiens qui étaient encore 67,7 % à réclamer la limitation du nombre d’arrivées de migrants sur le territoire national.

Un arsenal législatif dissuasif

Depuis son arrivée au pouvoir, Meloni n’a cessé de durcir les règles concernant les interventions des navires humanitaires. Le décret Piantedosi impose des débarquements dans des ports éloignés, augmentant les coûts et les délais pour les ONG. En juin 2023, par exemple, le Geo Barents a dû parcourir plus de 1.000 kilomètres pour débarquer seulement 13 migrants à La Spezia, alors que l'Italie disposait de ports bien plus proches. Ces directives visent à rendre économiquement et logistiquement insoutenables les missions des ONG.

Parallèlement, le gouvernement a renforcé les inspections et accru les sanctions administratives. La saisie temporaire ou définitive des navires est désormais une arme privilégiée pour limiter les interventions en mer. Les ONG dénoncent un cadre législatif oppressant, mais pour Rome, ces mesures sont nécessaires pour tarir les flux migratoires. En réduisant l’activité des associations humanitaires, l’Italie cherche à décourager les départs, au motif que les ONG jouent malgré elles un rôle d’aimant pour les traversées. Forte de cette politique, Giorgia Meloni a fait une apparition très remarquée au festival conservateur Atreju, à Rome, où étaient présents le président argentin Javier Milei et le premier ministre libanais Najib Mikati. La Présidente du conseil des ministres italien estime être la garante de la « stabilité politique » qui elle-même « rend l’Italie plus crédible à la fois au niveau national et international ».

Une stratégie européenne ambitieuse

Au-delà de ses actions en Méditerranée, Meloni mise sur des accords bilatéraux avec des pays de départ et de transit. L’accord signé avec la Tunisie en 2023, a permis de renforcer les contrôles maritimes et d’intensifier les interceptions. En échange, Tunis bénéficie d’un soutien financier italien et européen pour moderniser ses infrastructures et lutter contre les réseaux de passeurs.

Un partenariat similaire a été établi avec l’Albanie, où des centaines de migrants ont été réinstallées dans centres de rétention italiens bâtis dans ce pays. Ces initiatives, saluées par une partie des dirigeants européens, pourraient inspirer d’autres nations confrontées aux pressions migratoires. Meloni entend aussi peser dans les négociations sur le Pacte européen sur la migration et l’asile, défendant une répartition plus équitable des responsabilités entre les États membres.

Avec des résultats impressionnants et une popularité intacte, Giorgia Meloni confirme sa stature de leader du conservatisme européen. Si ses méthodes suscitent la controverse, son approche ferme, appuyée sur des chiffres en forte amélioration, pourrait bien redéfinir les politiques migratoires en Europe, faisant de l’Italie un modèle pour le reste des patriotes européens.

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Julien Tellier
Journaliste stagiaire à BV

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