Italie : comment un juge sabote la politique migratoire du gouvernement Meloni

Lampedusa

Le 21 septembre dernier, un décret du gouvernement italien établit que les clandestins entrés irrégulièrement en Italie doivent être mis dans des centres de séjour et de rapatriement, le temps de juger leur recours porté devant les tribunaux, lorsque leurs demandes d’asile ont été rejetées. Et pour ceux qui refusent cette forme d’internement administratif, une garantie de près de 5.000 euros leur est demandée. Une mesure dont l’objectif est évidemment de dissuader les migrants dits « économiques » de prendre la mer en Tunisie ou Libye, d’alimenter le trafic des passeurs et de venir ensuite bénéficier de toute la générosité « obligatoire » européenne. Cette mesure ne s’applique qu'aux migrants dépourvus de papiers d’identité et qui viennent de pays considérés comme sûrs (c’est-à-dire de pays qui ne sont pas en guerre).

Las ! Toute l’intelligentsia politico-médiatique italienne de gauche s’est levée contre une mesure qui, à l’évidence, visait essentiellement à dissuader les candidats à la migration économique de risquer leurs vies en mer pour un futur plus qu’incertain en Europe, et singulièrement en Italie.

Gouvernement des juges

De façon prévisible, l’Union européenne a aussitôt freiné sur cette mesure, à vrai dire très limitée, prise par le gouvernement italien dans une tentative d’exercer sa souveraineté nationale en matière migratoire : expliquant qu’il fallait valider ce chiffre de garantie financière alternative à l’internement administratif au cas par cas, selon un critère de proportionnalité. Tout en reconnaissant que le principe de solution alternative à l’enfermement tel que ces cautions était légitime. Le diable est dans les détails…

Visiblement très bien conseillé, un clandestin tunisien a porté un recours devant le tribunal de Catane, refusant la rétention dans le centre administratif et refusant également de payer le dépôt de garantie prévu par la nouvelle loi. Il a été suivi par trois autres clandestins, tunisiens également, et dont deux avaient déjà été expulsés, mais étaient revenus, clandestinement toujours, en Italie.

Et que croyez-vous qu’il arriva ? La juge Iolanda Apostolico, dont les liens avec des formations et syndicats de gauche affleuraient sur les réseaux sociaux (comptes fermés, depuis), a déclaré illégal le décret pris au mois de septembre par le gouvernement, en appelant à la Constitution italienne et surtout aux normes de l’Union européenne… créant ainsi une jurisprudence dans laquelle les clandestins, dont la défense sera certainement prise en charge par les ONG pro-migrants, vont s’engouffrer.

Une décision qui fragilise de facto le décret Cutro et les décrets ministériels successifs pris par le gouvernement Meloni pour tenter d’endiguer l’élan migratoire dont les débarquements à flots continus à Lampedusa depuis un mois sont le symbole.

C’est un cas d’école : jamais il n’a été aussi pertinent de parler de « gouvernement des juges », ces « législateurs abusifs », comme le dit Mario Sechi, directeur du quotidien Libero. La magistrature, aussi politisée en France qu’en Italie, peut fragiliser voire défaire en une journée la politique migratoire d’un gouvernement. Le régalien n’est plus l’apanage de ceux qui gouvernent.

Des clandestins quasiment inexpulsables

Georgia Meloni a aussitôt réagi, déclarant : « J’ai été abasourdie par la sentence du juge de Catane qui, avec des motivations incroyables [...] remet en liberté un immigré illégal, déjà destinataire d’une mesure d’expulsion, en déclarant unilatéralement la Tunisie pays non sûr (tâche qui n’appartient pas à la magistrature) et en s’attaquant aux mesures d’un gouvernement démocratiquement élu. […] Ce n’est pas la première fois que cela arrive et malheureusement ce ne sera pas la dernière. »

De quels motifs invoqués par la juge parle-t-elle ? La notification du tribunal explique, en effet, que le Tunisien qui réclame la protection internationale est victime de ce que, selon une croyance répandue dans son pays, il aurait les bonnes caractéristiques pour faire un chercheur d’or, caractéristiques représentées dans les lignes de sa main. On apprend aussi que l’autre requérant demanderait la protection internationale parce qu’il serait poursuivi par la famille de sa petite amie qui le considère comme responsable de sa mort. Des motivations de décisions judiciaires aux lourdes conséquences qui démontrent par l’absurde à quel point le droit d’asile est dévoyé et doit être complètement refondu. Et qui sonnent, en creux, comme un avertissement pour tous les pays européens : une fois sur le sol européen, les clandestins sont quasiment sûrs d’y rester.

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Marie d'Armagnac
Journaliste à BV, spécialiste de l'international, écrivain

Vos commentaires

29 commentaires

  1. On se rend compte quasiment au quotidien que la justice est un état dans l’état qui plus est de façons dictatorial.

  2. Les juges ne font qu’appliquer les lois promulguées par les États sous l’injonction de l’Union Européenne et de la jurisprudence issue de certains traités et accords internationaux signés ou pas mais in fine validés par des dirigeants trop peu soucieux de l’intérêt de leur population. Peut-être faudra-t-il que la majorité au parlement européen change pour sauver la cohésion européenne aujourd’hui bien malade.

    • Pas tout à fait …. Les juges interprètent la LOI. Les juges « fabriquent » une jurisprudence. Les exemples sont innombrables. Au Conseil Constitutionnel et au Consiel d’Etat notamment.

    • Un changement de majorité n’y fera rien, car l’ensemble des « représentants » ont pieds et poings liés par l’état profond. L’affaire des vaccins et sa note faramineuse décidée par 1 SEULE PERSONNE illustre parfaitement la main mise de l’état profond. Je pense même que sortir de l’UE est devenu pratiquement impossible tant l’ensemble du système est vérolé et verrouillé par l’idéologie mondialiste. Le conflit Ukrainien démontre assez bien l’incapacité des peuples à modifier la trajectoire, sauf à….mais cela nécessiterait une entente entre les peuples tant il n’ont pas encore pris la mesure de la situation et de leur futur.

    • « Les juges ne font qu’appliquer les lois » Si c’était vrai! Mais en fait ils choisissent les lois qu’ils vont appliquer, s’assoient sur les autres, et interprètent les textes dans le sens qu’ils ont choisi, sans craindre l’aberration car ils sont irresponsables.

  3. Tout juge, dans tous pays, est assermenté. Un juge qui n’applique pas la loi est parjure : on doit donc lui appliquer les sanctions du parjure : pénales et administratives (révocation sans droits).

  4. Si deux pays fondateurs de l’Europe, comme la France et l’Italie, envoie Bruxelles se faire voir, « l’union européenne » telle qu’elle est n’existe plus. Une bonne occasion pour en refaire une autre, qui soit respectueuse de la souveraineté de chaque état membre, qui ne seraient plus soumis aux dictats de la commission de Bruxelles.

  5. On peut débattre jusqu’à la fin de l’éternité : nous sommes poings et pieds liés par l’EU en matière d’immigration. Trois solutions : réformer les lois européennes, quitter l’Europe ou changer notre constitution. Méloni nous montre que même avec l’appui du peuple, elle ne peut rien changer. Le Brexit nous montre qu’il faudra des années pour reprendre en main la souveraineté d’un pays en matière d’immigration tellement les textes successifs paralysent encore leur champ d’action sans compter l’idéologie immigrationniste inculquée depuis des décennies dans tous les domaines.

  6. Meloni a été élue en faisant la promesse d’établir un blocus maritime de l’Italie. Elle n’a pas tenu sa promesse et ce blocus n’a pas eu lieu. Cela, ce n’est pas un juge qui lui a interdit de le faire ! De plus, elle a déclaré en août 2023 que l’Italie et l’Europe ont besoin d’immigration. Ce n’est pas un juge qui l’a obligée à le dire. En vérité, Meloni a trahi ses promesses et se moque des électeurs. Orbàn ne s’est jamais couché comme elle le fait devant la commission de Bruxelles bien que la Hongrie ait besoin des subsides de l’UE.

  7. Cet article et la fourberie de ce juge, dont la décision, n’en doutons pas, fera comme il est dit plus haut, jurisprudence en Italie, me fait penser que si Marine Le Pen accède au pouvoir en 2027, nombre de juges rouges du syndicat de la magistrature, voire l’ensemble, vont se mettre en rangs serrés pour faire obstruction dans tous les domaines touchant leurs chers protégés : les migrants.

  8. L*union Européenne est très malade, ça est le moment de voter RN pour mettre de l*ordre à tous les étages.

    • La France a une arme terrible pour imposer sa volonté :sa situation géographique. Si la France menaçait de sortie de lUE tout l’édifice s’écroule.

  9. Mettre fin à toutes les allocations , punir sévèrement ceux qui financent ces bâteaux , les empêcher d’accoster , rétablir des frontières , et ramener illico ceux qui débarquent .

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