JDD : la gauche blessée balance entre rage et pulsion dictatoriale

IMG_0307

C’était si bien, dans les années 1980, quand la gauche et ses associations s'exprimaient seules et presque sans contradictions dans tous les médias de France et de Navarre. Personne n’entendait les quelques courageux fanzines parfaitement marginaux sur le plan quantitatif (Minute, Présent...) qui osaient contredire l’avalanche des bons sentiments, appels aux mobilisations de tous poils, larmes de crocodile engagées et appels à vomir sur les Français attachés à leur pays : des beaufs, bêtes, racistes bien sûr, ringards, auxquels on ne donnait la parole que pour rire de leur débilité. Rien ne dure, ici-bas. Les temps sont difficiles pour les nostalgiques de l’unique doxa imposée à tous et pour les laveurs de cerveaux professionnels.

JDD pour Journal D'extrême Droite

La reparution du Journal du dimanche (JDD) sous la houlette de Geoffroy Lejeune, ancien patron de Valeurs actuelles devenu le nouveau vilain méchant loup à gauche, met nos infatigables professeurs de pluralisme et de démocratie sur le gril. Un débat ? Horreur. Pour cacher la rougeur sur la joue administrée par ce média libéré, désormais symbole d’une défaite de la gauche, on ironise. L’entreprise de diabolisation n’est pas en congés payés, elle tourne à plein régime ! On rivalise d’esprit, à l’aide de sauts conceptuels dignes des plus beaux élans de la pensée occidentale. Ainsi, pour la journaliste Pascale Clarke, qui eut longtemps son rond de serviette à France Inter, il faut oublier le JDD et parler du JDE, Journal de la Droite Extrême. Malin ! Edwy Plenel, le fondateur de Mediapart, fait encore plus simple et plus intellectuel : pour lui, JDD signifie Journal D’extrême Droite. Il suffisait d’y penser. Il a sa place dans les dictionnaires des mots d'esprit. Ces attaques feront frémir Geoffroy Lejeune et paniquer Vincent Bolloré, cela va de soi.

Avec sa délicatesse d’analyse devenue proverbiale, Sandrine Rousseau considère tout simplement une partie de l'opinion et de la population françaises comme une émanation polluante et toxique, à éradiquer par tous les moyens. Une forme d’humanisme vert, en somme.

Mais il y a pire que Bolloré et Lejeune réunis en congrès, c’est cette secrétaire d’État qui a accepté de parler au JDD. Alexis Corbière n’en revient pas : la preuve, encore une fois, de la collusion entre le macronisme et l’extrême droite, idée baroque, très prisée à la NUPES.

Ainsi, tout est bon pour décrédibiliser ce média et son nouveau timonier : cabale sur une prétendue confusion des victimes en une et même appels en douce des victimes signataires de la pétition.

Badinter n’est pas encore intervenu, mais c’est une question d’heures.

Ce cirque, auquel la droite s’est maintenant habituée, trahit la panique des tenants de ce qu’il faut bien appeler un totalitarisme médiatique. La télévision, c’est pour la gauche : la présence de CNews est insupportable, et peu importe si la télévision publique diffuse sans faiblesse la doxa ambiante à un tiers des téléspectateurs grâce aux impôts des Français. La radio, c’est pour la gauche : la présence d’Europe 1 est insupportable quand, là aussi, la radio publique s’offre la part du lion. La grande presse, c’est pour la gauche. Hors Le Figaro, installé de longue date, interdit de faire évoluer vers la droite une ligne éditoriale : on a eu moins d’états d’âme lorsque Le Monde de Beuve-Méry est devenu le jouet d’Edwy Plenel, ancien journaliste du journal trotskiste Rouge. Aujourd'hui, on réfléchit très sérieusement dans les officines d'extrême gauche à retirer ou à encadrer les droits des propriétaires de journaux, comme celui de nommer un directeur de la rédaction ou d'être majoritaire au capital. Dans le viseur, un seul homme : Bolloré.

La tentation totalitaire

« La société capitaliste était prédestinée dès sa naissance à devenir la société totalitaire », disait Georges Bernanos. Le degré de mauvaise foi, de colère, l’absurde refus qu’un seul média quitte le sérail, tout ce cirque, ces attaques, ces abominations pour un hebdomadaire diffusé à 131.000 exemplaires en 2022 (chiffre ACPM) dénotent une conception des médias plus proche de la chasse gardée que de la liberté de la presse si souvent brandie.

C’est le destin des totalitarismes, ils pèsent, cadenassent, interdisent, écrasent les libertés, à commencer par la liberté d’expression, jusqu’à susciter la colère qui provoquera leur chute. Pour faire tenir cette chape de plomb à l’heure des réseaux sociaux, il faut soutenir un régime à la chinoise. Verrouiller les actionnaires, les contenus, les médias. La gauche française en rêve à voix haute. Mais la Chine elle-même peine à faire tenir le couvercle de la pensée autorisée. Le savent-ils ? Les années 1980 ne reviendront pas et nos censeurs s’habitueront aux défaites.

Marc Baudriller
Marc Baudriller
Directeur adjoint de la rédaction de BV, éditorialiste

Vos commentaires

59 commentaires

  1. La droite, la vraie, a sans doute gagné une chaîne et un journal grâce à un grand capitaine d’industrie, qui a transmis les rênes, mais a perdu Minute et Présent en partie à cause de la magistrature qui, malgré de brillantes exceptions, penchent vers la gauche extrême.

Commentaires fermés.

Pour ne rien rater

Les plus lus du jour

L'intervention média

Les plus lus de la semaine

Les plus lus du mois