Jean-Michel Blanquer projette de restaurer le redoublement : ce ne pourra être que bénéfique pour les familles et les enfants

Arguant de l’inefficacité du redoublement, le précédent ministre de l’Éducation nationale l’avait quasiment interdit, sauf à ce qu’il soit demandé par les parents. Le résultat a été que des élèves passant automatiquement d’une classe à l’autre sans maîtriser les savoirs nécessaires se trouvent en échec à la sortie du collège, voire en passant le baccalauréat.

C’est que cette suppression du redoublement n’avait été accompagnée, pour seul dispositif de remédiation, que de l’aide personnalisée. Cette aide personnalisée, au nom de l’égalitarisme et de la non-discrimination, étant proposée à tous les élèves et sur des heures prises aux disciplines, a non seulement échoué mais a lésé tous les élèves, même ceux qui n’étaient pas en difficulté. Comment prétendre aider les élèves en classe entière (entre 24 et 35) et en enlevant à tout le monde une heure de français ou de mathématique ?

M. Blanquer va soumettre à l’avis du Conseil supérieur de l’éducation un projet de décret restaurant la possibilité du redoublement.

La décision du redoublement sera entre les mains des enseignants et du chef d’établissement. C’est un retour à la logique et à l’humanité. À la logique, car les enseignants sont mieux à même de juger de l’opportunité d’un redoublement. Ce sont eux les professionnels de l’enseignement, pas les parents. On constate d’ailleurs que, dans la quasi-totalité des cas, les élèves passant en classe supérieure malgré les réserves du conseil de classe voient leur difficulté persister, voire s’aggraver. À l’humanité également, car faire peser sur les épaules des parents une décision aussi difficile que celle d’un redoublement, forcément mal vécu par leur enfant, ou d’un passage au risque accru d’échec, le dilemme est douloureux. Mieux vaut que l’enfant et ses parents pestent contre les enseignants, même de manière injuste, que de voir naître des rancœurs ou des remords au sein des familles.

Pour autant, il ne s’agit pas d’un retour au redoublement pur et simple, ce qui serait aussi stupide que sa suppression pure et simple l’a été.

Il faudra que, pendant l’année scolaire, le conseil de classe alerte l’élève sur un danger de redoublement. L’établissement devra alors lui proposer un "contrat de réussite" afin de le prévenir. Cela pourra prendre la forme de stages pendant les vacances ou d’un tutorat assuré par un enseignant (formules qui existent déjà). Ce n’est qu’en cas d’échec de ce dispositif que le redoublement pourra être imposé aux parents. Ceux-ci auront la possibilité de faire appel auprès d’une commission ad hoc.

Mais ce redoublement devra lui aussi être accompagné d’un dispositif d’aide de façon à ce qu’il soit efficace. Il ne s’agit donc pas du retour à un redoublement bête et méchant, comme ne manqueront pas de le caricaturer ses détracteurs.

Nous ne mettrons qu’un bémol à cette mesure. C’est sur la mise en œuvre de l’accompagnement. Il semble qu’il se fera à moyens constants. C’est-à-dire qu’on fera appel à la bonne volonté et à la conscience professionnelle des enseignants pour assister les élèves. Nous ne doutons pas qu’ils le feront parce qu’ils ont à cœur la réussite de leurs élèves. Mais cela sera un alourdissement de leur travail sans beaucoup, voire sans aucune compensation. Le bénévolat a ses limites.

Mais pour les élèves et les familles, cela ne peut qu’être bénéfique.

Pierre Van Ommeslaeghe
Pierre Van Ommeslaeghe
Professeur de philosophie

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