Jean-Michel Blanquer va-t-il sanctionner les objecteurs de grammaire ?
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Jean-Michel Blanquer a mille fois raison de déclarer, à propos des 314 professeurs qui s’engagent « à ne plus enseigner » la règle de grammaire selon laquelle "le masculin l’emporte sur le féminin", qu’"on ne peut pas instrumentaliser la langue au nom d'une cause, aussi noble soit-elle".
Ce n’est pas la première fois qu’une telle revendication est formulée. Une semblable pétition avait été adressée en 2015 à Najat Vallaud-Belkacem, à l’initiative de l’association L’égalité, c’est pas sorcier ! et de la Ligue de l’enseignement, cet État dans l’État qui bénéficie de plusieurs millions d’euros de subventions. Elle avait obtenu 1.545 soutiens…
Il est probable que cette nouvelle pétition n’aura guère plus de succès, mais l’important, pour leurs auteurs, est de saper par des coups répétés les fondements de la langue française, à des fins principalement idéologiques. Des raisons avancées, la plus importante est de "[lutter] contre les stéréotypes de genre", ce qui n’est pas neutre – si l’on peut dire – dans la formulation.
Le ministre doit-il prendre des sanctions contre ces provocateurs, qui n’attendent que cela pour crier à la répression et appeler à la solidarité, selon un schéma bien connu depuis 1968 ? Selon L’Express, l'entourage du ministre estime que "[cette question] n'est pas la priorité pour l'Éducation nationale". Il faut, en effet, avoir l’esprit mal tourné – ou plutôt très orienté – pour y voir un frein à l’égalité entre les hommes et les femmes.
On comprend que Jean-Michel Blanquer ne souhaite pas faire de publicité à ce type d’action, ni alimenter le débat par des annonces de sanction. D’autant plus que l’expérience prouve que les directives ministérielles, quand elles sont pleines de bon sens, sont rarement appliquées. Ainsi, en 2005, lorsque Gilles de Robien a recommandé la lecture syllabique plutôt que la méthode globale, il a été contesté par les lobbies pédagogiques.
Les professeurs disposent bien de la « liberté pédagogique », ainsi définie dans le Code de l’éducation : "La liberté pédagogique de l'enseignant s'exerce dans le respect des programmes et des instructions du ministre chargé de l'Éducation nationale […]" Si elle autorise un professeur à adapter ses méthodes d’enseignement aux élèves dont il a la charge, elle ne l’autorise en rien à remettre en question les programmes ou les règles grammaticales. Le faire serait commettre une faute professionnelle.
Si ces contestataires avaient pour premier souci l’intérêt des élèves, ils s’attacheraient plutôt à leur montrer que la règle selon laquelle "le masculin l’emporte sur le féminin" peut s’exprimer par d’autres mots et s’inscrit dans l’histoire de la langue. Elle ne remonte pas au XVIIe siècle, comme ils le prétendent, mais au latin : dans cette langue, on faisait l’accord soit avec le sujet le plus proche, soit, plus couramment, au masculin quand il s’agissait d’êtres animés de genres différents.
Il en est de la langue française comme de la France. Elle a une histoire, avec laquelle on ne peut rompre sans se couper de ses racines. La langue peut évoluer : l’Académie française, qui considère que l’écriture inclusive est un "péril mortel", est précisément chargée de constater ces évolutions et d’en fixer les limites pour éviter les dérives.
Les « féministes » qui refusent ces règles d’accord sont semblables aux idéologues qui refont l’Histoire ou en effacent des pans entiers pour qu’elle corresponde à leur vision. Ils cherchent à abuser les esprits et à leur donner mauvaise conscience.
La meilleure sanction qu’on puisse leur infliger, c’est de dénoncer leur imposture.
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