La bataille de l’hydroxychloroquine et l’âme d’Hippocrate
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L’épidémie de Covid-19 fit tant réagir que la tempête des idées anéantit les esprits pour ne laisser demeurer qu’un vacarme assourdissant.
Cet épisode sanitaire a démontré de façon prégnante l’absence de consensus de ce que l’on oserait encore appeler la communauté médicale. Que l’on prétende que les débats scientifiques ont toujours fait rage dans ce microcosme inconnu jusqu’alors du grand public, on peut l’entendre. Néanmoins, il ne semble pas admissible que le peuple de non-sachants ait pu ainsi visiter à ciel ouvert le nouveau spectacle de l’hystérisation médicale. Les citoyens de toutes sortes purent, eux-mêmes, prendre une part active à ce combat édifiant grâce à l’implacable puissance des réseaux sociaux. Ainsi la nation s'est-elle retrouvée dans une bouillonnante tourmente mêlant approximations médicales, immaturités politiques, fantasmes complotistes, dénis juridiques et, encore, démesures de l’orgueil.
Ce trouble déchaîné fut, de surcroît, orchestré par une invraisemblable médiatisation. Alors, nous assistâmes quotidiennement, aux affirmations des uns, aux invectives des autres, au mouvement des pensées immédiates. Rien qui ne permette le recul nécessaire à une réflexion soignée.
Il est déraisonnable de souhaiter, à première vue, que le médecin doive soigner, que l’homme politique doive décider, que le journaliste doive expliquer. Aujourd’hui, le monde est devenu tel que l’on demande à l’homme politique de soigner, au médecin de décider, au journaliste de juger et au citoyen d’expliquer. Alors, les cris ne cessent jamais, les contradictions s’enchaînent et des hommes meurent sans plus de considération.
J’ignore si le jour d’après sera différent du jour d’avant. En tout état de cause, je constate que le « jour pendant » fut privé d’une sérénité dont il eût bien besoin. Le symbole du brouhaha permanent se concentra dans la polémique sur le traitement du coronavirus. Pour reprendre la métaphore belliqueuse, appelons-la « bataille de l’hydroxychloroquine ».
Il apparaît que certaines réflexions, et notamment juridiques, furent omises dans la conduite du débat sur l’utilisation de ce médicament.
Depuis désormais plusieurs années, la nation française est noyée sous une boulimie législative. Le milieu médical ne fait guère exception à ce débordement normatif. Le médecin, dans l’application quotidienne de sa science, se voit en permanence encadré, notamment par un Code de la santé publique représentant, à lui seul, plus de dix mille articles. Il faut ajouter à ce constat que la rédaction des textes est telle qu’un médecin, profane en droit, peut aisément s’y perdre.
S’agissant de l’hydroxychloroquine, la question était de savoir si ce médicament autorisé dans le cadre de maladies définies pouvait être administré, sans autre autorisation, pour soigner d’autres pathologies. La loi permet, en effet, la prescription d’un médicament hors autorisation de mise sur le marché mais dans des conditions dantesques et parfaitement indéfinies. Ainsi, le monde médical est empêtré de façon ubuesque dans des règles qui le dépassent. Dès lors, le médecin exerce sous une chape de plomb normative, laquelle est prête à tout instant à déverser son lot de contraintes et d’inquiétudes, en cas de poursuites judiciaires.
En période d’urgence sanitaire, face à une maladie quasiment inconnue, et sans traitement, certains médecins décidèrent de ne se raccrocher qu’à leurs valeurs profondes. L’urgence et le peu de temps dont ils disposaient durent les conduire à prendre des décisions fondées évidemment sur leurs connaissances scientifiques, mais également sur leur force d’âme.
« Je ferai tout pour soulager les souffrances », délivre avec puissance le serment d’Hippocrate. Il s’agit là d’une promesse fondatrice qui protège l’humanité depuis tant d’années.
Ainsi pourrait-on reprocher au médecin qui, se rappelant en lui-même ses profondes convictions, choisit au rythme d’une épidémie mortelle, de se départir des règles de droit et des morales légalistes afin de ne laisser subsister que son engagement inconditionnel de soulager les souffrances ?
L’esprit libre et pur d’Hippocrate survit encore chez certains comme un espoir lumineux dans l’âme des médecins de conviction.
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