La Big Tech lance un coup d’État numérique

Ce qu’il s’est passé, au soir de l’élection présidentielle américaine, à savoir la censure totale par les principales chaînes de télévision de l’allocution du président des États-Unis d’Amérique contestant les résultats, n’était donc qu’un hors-d’œuvre. C’est maintenant que les GAFAM attaquent le plat de résistance. En effet, dans la nuit du 9 au 10 janvier, prenant prétexte du mouvement de colère populaire qui s’est déroulé au Capitole à Washington mardi, Twitter, réseau social privilégié du président américain sortant, a décidé de supprimer purement et simplement le compte privé de ce dernier. Dans la foulée, ce sont plus de quatre millions de comptes Twitter de partisans de Donald Trump qui viennent d’être censurés.

C’est une véritable approche systémique des géants du numérique qui s’est mise en marche à des fins militantes et politiques. Car les GAFAM (Google, Amazon, Facebook, Apple, Microsoft) et leurs nombreux affidés ont tous, de concert, pris de véritables mesures de censure généralisée. Ainsi, Facebook, Instagram et les autres réseaux sociaux les plus populaires ont embrayé le pas pris par l’entreprise de Jack Dorsey. Il serait, dès lors, possible de se dire qu’il suffit simplement de changer de réseau social pour continuer à s’exprimer par d’autres voies et qu’après tout, Twitter étant une entreprise privée, elle fait bien ce qu’elle veut selon les conditions d’utilisation qu’elle impose sur son espace.

Mais c’est là qu’on touche au cœur du problème posé par le Golem numérique qui s’est créé ces vingt dernières années. Car si Donald Trump et 200.000 utilisateurs des réseaux sociaux viennent de s’inscrire sur l’application Parler, réputée pour sa politique de non-censure, les GAFAM montrent leur caractère désormais omnipotent et incontournable. Dès que ces transferts massifs d’utilisateurs se sont fait jour, Apple comme Google ont imposé un ultimatum à Parler afin de l’obliger à la même politique de contrôle de l’expression, sous peine de ne plus laisser l’application être téléchargée depuis leurs plates-formes. Ce n’est donc plus seulement les réseaux sociaux en eux-mêmes qui décident de ce qui doit se dire ou non, mais directement les patrons de ces plates-formes dont la quasi-totalité de l’Occident est désormais dépendante.

Alors que la Chine et la Russie ont, il y a des années, créé leurs propres plates-formes et réseaux totalement autonomes des géants américains, toute l’Europe est désormais soumise à la politique idéologique progressiste de la Silicon Valley américaine. Vous avez dit vassalisation ? Le mot est faible.

Face à cette véritable prise de pouvoir de l’économie numérique américaine sur la politique occidentale, nous ne pouvons rester amorphes. La France et l’Union européenne doivent d’urgence se séparer de leur dépendance aux GAFAM, leur opposer leurs propres plates-formes numériques permettant à nos concitoyens d’utiliser, comme ils ont en le droit, leurs libertés d’opinion et d’expression.

Ce qui se joue, en ce moment, dans cette époque ubuesque n’est rien d’autre qu’une lutte pour le contrôle de l’opinion. Si nous refusons de livrer ce combat aujourd’hui sur tous les fronts qui nous sont opposés, nous finirons, demain, tous « effacés », « annulés », « bannis » par des geeks californiens qui veulent imposer leur idéologie à tous les patriotes d’Occident.

Virginie Joron
Virginie Joron
Virginie Joron est député français au Parlement européen, membre de la délégation pour les relations avec l’Afghanistan

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