La délation, un sport national ? Une honte, plutôt…
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L’obligation de confinement donne l’occasion, à certains de nos concitoyens, de se livrer au sport national : la délation. Cette triste tradition, qui n’a jamais totalement disparu de nos mentalités, semble ressurgir à chaque fois que les Français n’ont rien d’autre à faire que d’espionner leurs voisins.
C’est ainsi qu’on apprend par la presse que Police Secours est débordée d’appels : untel dénonce celui qui fait un barbecue dans son jardin réunissant trois personnes ; unetelle signale que la fille d’à côté est sortie à plusieurs reprises dans la journée sans son laissez-passer ; un autre, enfin, demande ingénument s’il est prévu une prime en cas de verbalisation d’un contrevenant. Cela laisse sans voix.
On savait qu’à d’autres époques, ce comportement lamentable avait connu un certain succès. Durant la Révolution, combien de malheureux arrêtés parce qu’ils ne semblaient pas se conformer aux objurgations des pouvoirs en place ? Combien de guillotinés par simple dénonciation, considérée comme une preuve de civisme ? Et par la suite, combien d’innocents interpellés par les sbires des régimes successifs sur la simple foi d’un témoignage souvent mensonger. Ne parlons pas de l’Occupation, quand de « bons Français » anonymes signalèrent qui un résistant, qui un communiste, qui, enfin, un juif voué dès lors aux sinistres trains vers l’Est… À la Libération, ne sont-ce pas les mêmes qui citèrent les collabos, ou présumés tels, et qui se réjouirent de voir des femmes tondues dans les rues ?
La pratique n’a, hélas, jamais cessé. On ne dénonce plus le juif ni le résistant. On écrit au fisc au sujet de celui qui ne paye pas sa redevance télé. Ou pour faire part de ses soupçons sur une taxe foncière sous-évaluée. Les divorcés aiment jeter un doute auprès de la Caisse d’allocations familiales à propos des véritables ressources de leur ex. Parfois, hélas, c’est une mère ivre de colère qui n’hésite pas à accuser le père de ses enfants d’agression sexuelle. Tout ceci est quotidien. La délation est dans les gènes de certains d’entre nous.
L’occasion actuelle est trop belle. Les esprits bornés, les rétrécis du cerveau, les aigris, les paranoïaques, les redresseurs de torts, les Zorro de cages d’escalier, les hystériques, les collabos dans l’âme et les imbéciles s’en donnent à cœur joie. Il faut, sans doute, y voir une forme de jalousie et la conséquence de cette passion si française de l’égalité. On ne supporte pas que son voisin bénéficie d’un avantage auquel on n’a pas droit. Et l’État, jamais à court d’idées lorsqu’il s’agit de restreindre nos libertés ou de surveiller la population, s’accommode très bien de cette infamie.
L’Histoire montre, hélas, que ces ignobles pratiques se retournent rarement contre leurs auteurs. L’anonymat les protège, et tant qu’on est du côté du manche… On nous parle d’unité nationale, de vivre ensemble et autres fadaises. Mais peut être faudrait-il simplement décider, une bonne fois pour toute, que tout délateur encourt la même peine que celui qu’il a dénoncé.
Sport national ? Honte, plutôt…
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