La République en marche : un mouvement démocratique ou une vaste fumisterie ?

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Ça chauffe, à LREM. Non pas au gouvernement, où chacun souhaite garder sa place pour de bonnes ou de mauvaises raisons, ni à l'Assemblée nationale, où les députés de la majorité sont entraînés à se comporter en godillots sous la houlette de Richard Ferrand, mais à la base, parmi les adhérents et sympathisants qui ont sincèrement cru qu'Emmanuel Macron allait changer les choses, y compris la façon de faire de la politique.

Las ! Beaucoup déchantent : ils s'aperçoivent que, si leur présence était appréciée pour faire masse avant les présidentielles, on ne s'embarrasse guère de leur avis, une fois l'élection acquise. Le mouvement, qui revendique 400.000 adhérents (sans obligation de cotisation), n'est pas consulté, le Conseil, instance que l'article 10 des statuts définit comme le « Parlement de la République en marche » et qui doit être convoqué au moins deux fois par an, n'a pas été réuni depuis sa création. Tout est décidé au niveau parisien par Christophe Castaner, délégué général, et quelques proches. Sans même que soit publié un relevé de décisions à l'intention des adhérents, qui se demandent à quoi ils servent. La piétaille n'est pas faite pour penser mais pour suivre le guide suprême !

Sans doute ont-ils fait preuve de naïveté ou se sont-ils laissés trop facilement abuser quand on les a appelés à participer au redressement de la nation en montant dans le train d'En marche ! Le mouvement LREM fonctionne selon le mode jupitérien cher au locataire de l'Élysée. Tout se décide au sommet : "Ça ne vit pas du tout. On a du mal à concevoir notre rôle", se plaint l'animateur d'un comité local, membre du Conseil, dont le journal Sud-Ouest rapporte le propos. Un autre « responsable » provincial ajoute : "C'est une vaste fumisterie." D'autres membres de cette instance déplorent son inertie : "Le mouvement ne vit pas", constate l'un, tandis qu'un autre, soulignant l'inaction des comités locaux, estime que "c'est un encéphalogramme plat".

Pourquoi se plaignent-ils ? Ils n'ont pas besoin de penser : d'autres pensent pour eux ! Voilà qui est commode et évite de se fatiguer les méninges ! Christophe Castaner, ce socialiste devenu l'un des hommes de confiance du Président, prépare avec son cercle d'initiés la rentrée politique de son parti. Non pas en renouant avec quelque université d'été : ça, c'est l'ancien monde ! Dans le nouveau, il est vain, voire nuisible, de connaître l'opinion de la base puisque Jupiter sait, mieux que tous, ce qui est bon pour la France. Curieuse façon de gouverner, qui s'apparente, non pas à la monarchie (le monarque s'entourait de conseillers et tenait compte de l'avis des parlements provinciaux), mais au despotisme « auto-éclairé ».

Cette colère, qui commence à gronder dans La République en marche, est révélatrice du défaut de démocratie et de concertation qui caractérise le mode de gouvernement macronien. Ce dédain de l'opinion des autres, fussent-ils dans le même camp, se retrouve dans l'argument récurrent de l'exécutif selon lequel il ne fait que mettre en œuvre les engagements du candidat Macron, qui auraient été approuvés, une fois pour toutes, par une majorité de Français à l'élection présidentielle, puis aux élections législatives. C'est un mensonge et une imposture !

S'il est vrai qu'Emmanuel Macron a été régulièrement élu et qu'il dispose d'une Assemblée à sa botte, il ne peut en aucun cas prétendre qu'une majorité de Français lui ait donné carte blanche pour appliquer tout son programme. Ne pas le reconnaître, c'est affirmer cyniquement que, dans le régime républicain, tel qu'il fonctionne actuellement, les apparences suffisent à suppléer la réalité de la démocratie.

Les plus grands ennemis de la démocratie ne sont pas ceux qui en dénoncent les failles mais ceux qui en corrompent l'esprit.

Philippe Kerlouan
Philippe Kerlouan
Chroniqueur à BV, écrivain, professeur en retraite

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