La rupture conventionnelle des fonctionnaires va-t-elle coûter cher à l’État ?

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Depuis le 1er janvier 2020, les fonctionnaires titulaires peuvent bénéficier d’une rupture conventionnelle : leur contrat est rompu et, en échange, ils obtiennent une indemnisation.

Ce dispositif est interdit à ceux qui ont 62 ans et remplissent les conditions pour toucher une pension de retraite à taux plein. S’ils ont moins de 10 ans d’ancienneté, les fonctionnaires toucheront un quart de leur rémunération brute mensuelle (primes comprises) multipliée par le nombre d’années de service. On passe à 2/5 entre 10 et 15 ans, à la moitié entre 15 et 20 ans et, enfin, à 3/5 entre 20 et 24 ans. 24 ans est le nombre maximal d’années pouvant être prises en compte. Par exemple, un professeur engagé à 25 ans qui veut partir à 60 ans et qui perçoit un salaire net de 3.000 € (soit 3.300 € bruts) touchera 47.520 euros. En dessous de 82.000 €, l’indemnité est exempte de CSG et est, le plus souvent, exonérée de l’impôt sur le revenu. Le fonctionnaire ou sa direction peuvent prendre tous les deux l’initiative de la rupture, une négociation est prévue. Il n’est pas nécessaire d’avoir un projet de reconversion, mais si le démissionnaire remplit certaines conditions (notamment s’il doit se former pour une nouvelle activité), il peut, en outre, toucher des indemnités chômage.

Le pouvoir escomptait autour de 1.500 ruptures conventionnelles par an pour une dépense moyenne de 69.000 € par départ. En deux mois, il y a eu 5.000 demandes de dossiers. Toutes ne seront pas acceptées, l’administration conservant le droit de refuser le départ de son agent. Les syndicats prétendent (c’est de bonne guerre) que cette explosion de demandes est la marque d’un profond malaise dans la fonction publique. En fait, si le nombre de 5.000 dossiers déposés peut paraître important, il faut le mettre en perspective avec les 5,5 millions d’agents du public (0,09 %) et même avec les 100.000 agents en détachement administratif : ils ne touchent plus de rémunération, peuvent tester une autre activité dans le privé ou acquérir un statut d’auto-entrepreneur avant, éventuellement, de revenir au sein de la fonction publique si leur reconversion a échoué et si la suspension du contrat de fonctionnaire date de moins de trois ans. Avec la rupture conventionnelle, le départ sera définitif.

Le statut de fonctionnaire reste donc une valeur sûre et même si les agents souffrent parfois au travail, ils ne se précipitent pas pour en sortir. En réalité, les ruptures conventionnelles concerneront d’une part les fonctionnaires proches de la retraite ayant la totalité de leurs annuités et qui souhaiteront cesser leur activité autour de 60 ans en partant avec les deux tiers de leur ancien salaire. Cependant, l’État va probablement s’opposer à ce qui ressemble trop à un dispositif de retraite anticipé. Autre grande catégorie concernée par la rupture conventionnelle : les fonctionnaires en conflit avec leur direction. Néanmoins, le scandale des fonctionnaires territoriaux sans affectation qui touchent la moitié de leur rémunération en restant chez eux ne cessera pas pour autant, vu qu’ils doivent impérativement accepter les conditions qui leur sont faites. Pour finir, aucune économie n’est à prévoir avec la rupture conventionnelle.

Christian de Moliner
Christian de Moliner
Professeur agrégé et écrivain

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