La trente-quatrième nuit des Tartuffes en trois actes

Rimal Abdul Malak

Tartufferies en chaîne à la « Nuit des Molières ». Dans le cadre de la 34e mouture de cet exercice annuel d’autocongratulation théâtrale, deux piètres comédiennes et militantes CGT ont donné un très mauvais spectacle en interpellant Mme Rima Abdul-Malak, ministre de la Culture. Saisissant un micro, cette dernière leur a répondu vivement en montrant une remarquable connaissance de ses dossiers : enfin un ministre compétent ! Voire. Car un journaliste du journal Challenges, dont l’information a été relayée par Cyril Hanouna, a donné une autre version des faits. La pièce s’est jouée en trois actes, sur un scénario plutôt médiocre.

Acte I : l’intervention « inter-minable » des deux intermittentes du spectacle. L’une est comédienne, l’autre « danseuse verticale ». Toutes deux étaient jusqu’à présent inconnues du grand public et auraient mieux fait de le rester. Plus pathétiques que dramatiques, elles débitent laborieusement un discours contre Macron et sa réforme des retraites « ultralibérale », prononcé en langue inclusive (féminisme oblige), à grand renfort de « travailleurs et travailleuses », de « cheminots et cheminotes », de « celles et ceux qui ramassent nos ordures » (comprenez : les éboueurs) et même de « chiens et chiennes » ? Niant, en conclusion, toute similitude avec ces canidés, elles concluent en annonçant, assez logiquement, leur refus de « rentrer à la niche ». Ce qui ne les empêche pas de réserver un chien de leur chienne à Rima Abdul-Malak, apostrophée dans un français quelque peu éloigné des canons de la langue de Molière : « Madame la ministre de la Culture, quand est-ce que vous allez vous décider à sortir de votre silence ? Pendant que vos collègues du gouvernement se répandent de mensonges, vous ne dites rien. »

Acte II : Rima les prend au mot et sort de son silence. Le ministre prend un micro, le tapote comme pour vérifier qu’il marche et commence par un aveu concernant sa fonction, qui consiste apparemment à faire de la figuration : « D’habitude, le rôle du ministre, c’est de rester assis à ne rien dire, mais là, c’est pas possible ! » Un ministre de la Culture, ça Rima quoi ? Ça Rima rien ! Elle n’en prononce pas moins un vibrant plaidoyer en faveur de son propre travail, de sa défense de « l’exception française » et des aides « exceptionnelles », « massives », « historiques », consenties au secteur de la culture pour faire face à l’inflation, à l’augmentation du prix de l’énergie, sans oublier l’époque récente où l’État-Providence casquait pour les théâtres fermés pour cause de Covid. Il faudrait être ingrat pour se plaindre. Et quelle belle ambition culturelle !

Acte III : ce qu’il s’est passé en coulisses. Malheureusement pour le ministre, quelques détails attirent l’attention d’un journaliste de Challenges. D’une part, les deux militantes cégétistes de l’acte I, professionnelles du spectacle, mais par intermittence seulement, n’ont pas cru bon d’apprendre par cœur un texte dont le temps de lecture ne prenait pourtant pas plus de trois minutes. Elles l’ont lu sur un prompteur : bravo, les artistes ! Ledit texte leur aurait d’ailleurs été fourni, clé de lecture en main, par la CGT. Il aurait été transmis l’après-midi même, vers 18 heures, aux organisateurs de la « Nuit des Molières », qui l’auraient ensuite sagement transmis au ministre. Rima Abdul-Malak aurait ainsi pu préparer tranquillement sa réponse – toute spontanée, on l’aura compris – et montrer sa grande maîtrise des dossiers. Dans un enregistrement audio, l’indiscret journaliste Jean-François Arnaud explique : « Du côté de l’organisation des Molière, du côté de l’organisation de la soirée, on savait que la ministre allait répondre et c’est pour ça que le fameux micro était à proximité, prêt, branché. On voit qu’elle fait le geste, comme si elle s’étonnait que le micro fonctionne, mais ça fonctionne très, très bien. Elle le sait parfaitement, puisqu’elle parle depuis plusieurs secondes dans ce micro. C’est le petit coup pour faire croire aux téléspectateurs que c’est improvisé – alors que ce n’est pas improvisé. »

Précisons que le ministère de la Culture a démenti. Mentir et démentir sont les deux faces du Janus politicien. Et qui oserait soupçonner de mensonge un ministre d’Emmanuel Macron ? Qui pourrait imaginer que les syndicats comme le gouvernement prennent les Français pour des idiots ? Rideau !

Éric Letty
Éric Letty
Journaliste

Vos commentaires

30 commentaires

  1. La ministre a eu raison de répondre mais ses arguments ne sont pas les bons. Il faudrait supprimer le statut d’intermittent du spectacle qui est forcément déficitaire (normal c’est une création de jack Lang qui adorait les déficits) et donc cela parasite les autres systèmes. De plus ces activités du spectacle ne sont pas essentielles à la société (elles ont été jugées comme cela lors du confinement COVID par contre les caissières de supermarché étaient essentielles par exemple)

    • Là, vous êtes injuste, les intermittents du spectacle sont essentiels à la vie artistique. Tout le monde n’a pas la chance de paraître en vedette de façon permanente, et ceux-là même qui le font risquent aussi de voir leur carrière finir du jour au lendemain…

  2. Ne m’appelez plus « Nuit des Molières ». L’ancienne grandeur culturel de la France, elle a disparu pour faire place à une autre culture tel, par exemple, celle du rap. C’est une honte qui fait la risée de la population international, soyons tranquille, la France disparait à leur yeux, d’ici quelle que temps, cette communauté international ne saura plus ce qu’est ce pays que l’on a nommé, il fut un temps, la France. Merci Hollande, merci Macron.

  3. Quelle mascarade ! Pathétique ! Communication, manipulation ! Ce gouvernement passe leur temps à faire de la com! de la mauvaise com !
    Quant à l’avenir de ces « mauvaises comédiennes » incapables d’apprendre un petit texte par cœur , sera certainement plus que précaire !

  4. Et ces mêmes opposants de pacotille appelleront à nouveau à voter pour la macronie aux prochaines élections.
    Avec une « opposition » comme celle-là, pas besoin de majorité.

  5. Une cérémonie des quoi ? ( pauvre Molière ! ) : c’était vraiment d’urgence et d’actualité, en ce moment, les divertissements entre habitués du divertissement !

  6. Décidément, ce gouvernement laissera dans l’Histoire l’image de la ruine de la France. Nous avons eu Louis XIV qui rayonnait et a porté la France au sommet. Nous avons aujourd’hui un « président qui plonge la France dans l’obscurité et mène la France à sa perte. La seule chose rassurante est qu’après la pluie vient le beau-temps, mais il serait temps que la tendance s’inverse.

  7. La macronie, gourou et adeptes, spécialisée dans la mauvaise com à deux balles démontre les passerelles entre le gouvernement et la CGT..

  8. Tout comme Molière, les professionnels de la profession ne sont que des flagorneurs.
    C’est bien normal, sans les subventions du ministère et le scandaleux régime des intermittents, financé par les salariés du privé, ils ne gagneraient pas un rond !

    • Entièrement d’accord ! cela permettrait de faire le tri entre les bons et les mauvais comédiens !

  9. Cette cérémonie des Molières n’est qu’une triste pantalonnade. On le sait depuis longtemps. Merci à Jean-François Arnaud qui a démonté pour nous ce lamentable subterfuge.

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