L’actionnariat salarié pour en sortir

Camembert_(Cheese)

Mantra ? Incantation ? Vœu pieux ? Martingale ? Serpent de mer ? Panacée ? Nous pouvons bien sûr l’imaginer. Le chef d'entreprise et chroniqueur Xavier Fontanet signe une tribune publiée par Le Figaro où il propose l’actionnariat salarié comme une des pistes de sortie de crise à long terme.

Sur l’impératif de mettre en place une espèce de flexi-sécurité qui soit une remise en cause d’un droit du travail trop tatillon est une évidence. Même sans la crise que nous traversons, la compétitivité internationale en berne et en déclin que nous affichons est suffisante pour convaincre que ces rigidités d’un autre âge créent un carcan dont il faut s’affranchir.

Sur l’effort nécessaire de formation et d’adaptation constant de la main-d’œuvre, rien à redire, c’est une évidence.

Sur la menace effective que ferait peser tout alourdissement d’une fiscalité déjà confiscatoire, là encore, cela va sans dire, et encore mieux en le disant.

Sur l’aspect insensé des grèves de la CGT dans des secteurs à même de saboter l’économie globale et, in fine, sur l’aspect obsolète, inopérant et inefficient du paritarisme qui est le dénominateur commun de la plupart de ces déplorables constats, là encore, l’observateur attentif abonde.

Et quand Xavier Fontanet indique que, pour rémunérer cette flexibilité accrue demandée aux salariés, il conviendrait de rémunérer en actions, là encore, accord complet. En quelque sorte, une vertueuse relocalisation de proximité du capital. Sauf que.

Les mécanismes d’association du capital et du travail sont régulièrement torpillés en France. Il n’est besoin, pour s’en persuader, que de faire la liste des divers régimes fiscaux et sociaux qui se sont succédé depuis plus de trente ans sur les stock-options pour confisquer leur intérêt au profit d’un État obèse et des caisses de redistributions sociales.

Bien sûr, l’entreprise y gagne, même beaucoup : elle rémunère une partie du travail avec une monnaie virtuelle, la dilution des actionnaires préexistants dans son capital. C’est une sorte d’abus de bien social commis par l’entreprise elle-même : ce sont les actionnaires qui paient directement cet incrément de coût du travail, pas l’entreprise. Allez, suggérons même de lui faire gagner plus en supprimant à terme, et sur cinq ans, la déductibilité des frais financiers pour que l’écosystème des entreprises ne soit plus durablement et structurellement sous-capitalisé. Mais payer des salariés français avec des titres d’une filiale d’un groupe étranger, ce n’est ni possible ni souhaitable : un groupe n’accepte pas facilement la dilution aux étages inférieurs et peut trop facilement spolier les minoritaires ainsi créés. Réserver aux seuls salariés français d’un groupe présent dans le monde une rémunération en actions a pour inconvénient de ne pas être équitable. Quant à imposer à des têtes de groupes étrangers des dispositions françaises de participation au capital, c’est illusoire.

La solution la plus simple et la plus viable est donc ailleurs : le bon vieux plan d’achat d’actions à l’américaine. Un pourcentage du salaire fixé à l’avance par le salarié qui décide de participer, un prix d’achat variant en fonction de la valorisation de l’entreprise, éventuellement minoré d’un abondement à la charge de l’entreprise. Ainsi est respectée la liberté du salarié qui peut ou non s’associer ou être rémunéré en monnaie sonnante et trébuchante, et l’eau tiède n’est pas réinventée.

Mais qu’il soit ici permis au quinqua que je suis de déplorer que nous soyons toujours incapables d’envisager une révolution culturelle qui nous conduirait à copier « pour de vrai » ce qui fonctionne en Allemagne, cette cogestion impossible dans notre contexte de « lutte des classes » permanente exacerbée par une fonction publique et un personnel politique parasitaires. Alors, bien sûr, Xavier Fontanet a raison, mais sera-t-il entendu ?

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