L’Alliance atlantique n’est-elle pas morte un certain 24 février 2025 ?

@ROBERTO SCHMIDT / AFP
@ROBERTO SCHMIDT / AFP

On se souvient des propos d’Emmanuel Macron en 2019 : « L’OTAN est en état de mort cérébrale. » Depuis, visiblement, l’OTAN bouge encore. OTAN : Organisation du traité de l’Atlantique nord. Lorsqu’on parle de l’OTAN, en général, on pense d’abord Organisation avant de penser Alliance. L’Organisation, c’est la grosse machine otanienne avec, notamment, son Grand Quartier général des puissances alliées en Europe (sous l’acronyme anglais SHAPE), implanté à Mons en Belgique. Magnifique appellation qui n’est pas sans rappeler, à juste titre, le Grand Quartier général des forces expéditionnaires alliées (SHAEF), créé en 1943 et commandé par le général Eisenhower.

La machine otanienne et ses grosses tuyauteries

En 1943, il s’agissait de vaincre l’Allemagne de Hitler. Lorsqu’en 1949 fut signé le traité de l’Atlantique nord, il s’agissait de mettre en place une alliance défensive entre les nations d’Amérique du Nord (USA et Canada) et les nations européennes qui avaient échappé au joug communiste pour faire face à la menace soviétique. Globalement, les pays de l’Alliance partageaient à peu près les mêmes valeurs (démocratie et économies libérales). Bien sûr, l’Alliance n’était pas une « Sainte-Alliance », les nations avaient leurs intérêts propres et les États-Unis, leader de l’Alliance, n’ont jamais fait de cadeaux à leurs alliés et vassaux. Les relations, notamment avec la France du général de Gaulle, furent souvent rudes et même tendues. La décision de quitter le commandement intégré en 1966, accompagné de l’exigence que les troupes américaines décampent du territoire français en 1967, fut l’un de ces épisodes « compliqués ». Néanmoins, cinq ans plus tôt, lors de la crise des missiles de Cuba, de Gaulle avait été le premier à assurer le président Kennedy du soutien indéfectible de la France.

Ce rapide rappel survol historique pour en arriver à cette question : si l’OTAN et ses grosses tuyauteries, dans lesquelles, du reste, sont insérés des militaires français (près de 800 en 2023, selon un rapport de la Cour des comptes), existent encore, l’Alliance, elle, n’est-elle pas, non pas en état de mort cérébrale, mais de mort tout court, par arrêt de l'arbitre ? En clair, sommes-nous encore vraiment alliés avec les États-Unis ? Pourquoi poser cette question qui peut sembler incongrue ? À cause du numéro de pantomime qui s’est joué, lundi, dans le Bureau ovale de la Maison-Blanche ? Oui, évidemment, car Donald Trump, à aucun moment, n’a fait allusion à l’Alliance atlantique qui, pourtant, fonde les relations entre Amérique du Nord et Europe occidentale depuis plus de 70 ans. Or, si l’Ukraine ne fait pas partie de l’OTAN (et c’est heureux !), elle est frontalière, tout comme la Russie, de nombreux pays appartenant à l’Alliance.

Pendant que Macron faisait le malin…

Mais surtout parce que, pendant que notre Président faisait le malin en baragouinant anglais, à moins de 400 kilomètres de la Maison-Blanche, à New York, se jouait au siège de l’ONU une autre pièce dont on a moins parlé. États-Unis et France, alliés et amis « de toujours », ont voté de façon divergente à l’ONU et, à l’inverse, Américains et Russes ont voté de concert. Et sur quel sujet ? Sur l’Ukraine. Ainsi, une résolution, à l’initiative des États-Unis a été adoptée par le Conseil de sécurité. Par dix voix pour, aucune voix contre et cinq abstentions (dont la France, le Royaume-Uni, le Danemark, la Grèce et la Slovénie), le Conseil de sécurité a demandé « instamment qu’il soit mis fin au conflit dans les plus brefs délais et plaide pour une paix durable entre l’Ukraine et la Fédération de Russie ». « Déplorant les tragiques pertes en vies humaines qu’a causées le conflit entre la Fédération de Russie et l’Ukraine », le Conseil de sécurité a donc évacué la question des responsabilités russes dans le déclenchement de cette guerre ainsi que celle du retour à l'Ukraine des territoires récupérés par la Russie, ce à quoi, évidemment, Moscou se serait opposée en usant de son droit de veto. Américains et Russes se sont donc bien entendus par-dessus les Européens, c’est un fait, et cette résolution qui est en principe contraignante au plan du droit international, à la différence de celles prises en Assemblée générale des Nations unies, en est la preuve éclatante. Il n’y a donc plus d’Alliance atlantique.

Bien évidemment, lorsqu’il s’agira d’envoyer des troupes d’interposition, « pas pour aller sur la ligne de front, pas pour aller à la confrontation, mais pour être à un endroit défini par le traité comme une présence pour maintenir la paix », comme l’a déclaré, de façon un peu simpliste (voire naïve), Macron, au micro de Fox News, on saura venir trouver la France et surtout ses soldats. Comme d'habitude. En espérant que nous ne nous ferons pas embarquer par nos « amis » ukrainiens. Par exemple, à l'occasion de ce qu'on appelle pudiquement des « incidents » sur cette ligne qu'il reste à définir - puisqu'elle ne sera pas de front, à en croire Macron. Pendant ce temps, les États-Unis feront du business. As usual

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Georges Michel
Editorialiste à BV, colonel (ER)

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