Le cimetière du Père-Lachaise, un lieu de recueillement et de mémoire  

© Peter Poradisch Wikipedia Creative Commons Attribution-Share Alike 3.0 Unported
© Peter Poradisch Wikipedia Creative Commons Attribution-Share Alike 3.0 Unported

La fête de la Toussaint est l’occasion, pour beaucoup d'entre nous, de rendre hommage à nos chers disparus lors du Jour des morts. Chaque année, de nombreux visiteurs se rendent dans les cimetières qui parsèment la France pour honorer la mémoire des défunts. Si ces lieux sont souvent associés au deuil et au chagrin, certains d’entre eux, comme le cimetière du Père-Lachaise à Paris, dégagent une atmosphère bien plus riche et paisible qu’on ne le croit. En effet, l’aménagement soigné des allées arborées invite à la promenade et fait de ce lieu un endroit de quiétude, mais aussi un panthéon méconnu où l’Histoire et les enjeux mémoriaux se révèlent au détour des chemins.

Un cimetière chargé d’Histoire

Le cimetière du Père-Lachaise porte le nom de François d’Aix de La Chaise, dit le père Lachaise, ancien confesseur de Louis XIV, qui acquit ce terrain en bordure de Paris au XVIIe siècle. Il embellit le domaine en y ajoutant jardins et résidence, créant ainsi un espace de beauté et de calme. Plus d’un siècle plus tard, en 1804, alors que Paris manque cruellement de sépultures, le Premier consul Bonaparte ordonne la création de grands cimetières comme ceux de Montparnasse, de Montmartre, de Passy et, enfin, du Père-Lachaise. À ses débuts, le Père-Lachaise n’attire pas les foules en raison de sa localisation en périphérie de la ville et de sa proximité avec les quartiers populaires. Pour remédier à cela et donner un peu d’éclat à cette nouvelle nécropole, les dépouilles de Molière et de La Fontaine y sont transférées en 1817. Cet hommage posthume à ces grands écrivains rend le cimetière plus attractif, incitant les Parisiens à se faire enterrer à leurs côtés. Aujourd’hui, le Père-Lachaise s’étend sur 44 hectares et abrite plus d’un million de sépultures, devenant ainsi un lieu incontournable du patrimoine parisien.

Le repos des grands noms de l’Histoire de France

La tombe de Parmentier, sur laquelle des passants déposent pieusement des pommes de terre. DR.

Le Père-Lachaise, avec ses allées sinueuses et ses arbres majestueux, abrite ainsi les tombes de nombreuses figures ayant marqué l’Histoire de France. Parmi elles se trouvent des maréchaux d’Empire comme Pierre Augereau et André Masséna, qui ont joué un rôle crucial lors des guerres napoléoniennes. Certains descendants de Joachim Murat, roi de Naples et beau-frère de Napoléon, reposent également dans ce cimetière emblématique. Le Père-Lachaise est aussi le lieu de repos de scientifiques et d’historiens célèbres, tels qu’Antoine Parmentier, pionnier de l’agronomie et promoteur de la pomme de terre, et Jean-François Champollion, le déchiffreur des hiéroglyphes qui a ouvert la voie à l'égyptologie moderne. Les écrivains et les poètes comme Honoré de Balzac ou Guillaume Apollinaire résident aussi au sein de la nécropole. De nombreux artistes reposent également au Père-Lachaise : des acteurs comme Yves Montand et Sarah Bernhardt, des chanteurs comme Édith Piaf et Jim Morrison, et des musiciens comme Frédéric Chopin et Georges Bizet. Ce sont, ainsi, plus de 500 personnalités, voire davantage, qui reposent au cœur du cimetière parisien.

Entre mémoire de la gauche et hommage aux victimes des totalitarismes

Le Père-Lachaise abrite également plusieurs mémoriaux, notamment en hommage aux victimes des camps de concentration et d’extermination nazis. Non loin de ces monuments, on trouve les sépultures de nombreux membres et dirigeants du Parti communiste français (PCF), comme Maurice Thorez, figure emblématique du mouvement ouvrier en France. Ces tombes en marbre, parfois imposantes, créent un contraste avec l'idéologie d’égalité sociale défendue par le PCF. L'idée de rendre hommage à toutes les victimes des totalitarismes pourrait être améliorée par l’installation d’un mémorial dédié aux victimes des goulags soviétiques de l’URSS pour laquelle le PCF n’était qu’une antenne en France. Les tombes de ces figures de gauche, souvent situées près du mur des Fédérés où de nombreux communards furent fusillés en 1871, témoignent aussi de l’héritage politique du Père-Lachaise. Ce mur est un véritable monument sacré et un symbole pour la gauche révolutionnaire. Si on laissait faire certains intellectuels et politiciens de gauche, comme Thomas Guénolé, ces derniers pourraient vouloir enrichir cet endroit d’un mausolée fait avec les pierres de la basilique du Sacré-Cœur de Montmartre.

Le Père-Lachaise est, ainsi, bien plus qu'un simple cimetière. Ce lieu, chargé d’Histoire, est un témoin de la mémoire collective et un panthéon en plein air, où les grands noms de l’Histoire côtoient des œuvres d’art funéraire. Sa singularité réside dans cet entrelacement de recueillement, de patrimoine artistique et de mémoire collective, en faisant de ce lieu l’un des plus emblématiques de Paris, si ce n’est de France.

Eric de Mascureau
Eric de Mascureau
Chroniqueur à BV, licence d'histoire-patrimoine, master d'histoire de l'art

Vos commentaires

6 commentaires

  1. J’y ai travaillé pendant quelques années. A l’heure su déjeuné j’en parcourais les allées. Ce lieu pousse à la réflexion et à l’introspection.
    Il y rêgne une ambiance presque irréelle. C’est un lieu de mémoire très bien entrenu par la Mairie de Paris. Ca change du reste.

  2. Ce cimetière est un lieu particulier où l’on ressent la présence de bon nombre d’esprits. Rien n’y laisse indifférent et tout y amène à s’émouvoir et se remémorer.

  3. Il y a une tombe au Père Lachaise ou il est écrit  » Revenez quand vous voulez , je ne bouge pas d’ici  » !!! Authentique !!

  4. Cher Eric de Mascureau, vous avez oublié de signaler une chose importante : Le 11 novembre 2018, date du centenaire de l’Armistice, la Ville de Paris a inauguré son Monument aux 94 415 morts et 8 000 disparus parisiens, de la Grande Guerre. Il est installé à l’horizontale sur le mur d’enceinte du cimetière du Père-Lachaise, le long du boulevard de Ménilmontant.
    Et puis, parce que sa sépulture est à quelques mètres du caveau de ma famille, je me fais un devoir de signaler la tombe de Fernand Braudel, dont un ouvrage exceptionnel au moins « L’identité Française » devrait être appris par cœur par tous les lecteurs de BV !

Commentaires fermés.

Pour ne rien rater

Les plus lus du jour

Un vert manteau de mosquées

Lire la vidéo

Les plus lus de la semaine

Les plus lus du mois