Le coronavirus, ou le retour du patriotisme économique

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Le 28 avril dernier, l’Europe signe avec le Mexique, en pleine crise de coronavirus, un accord de libre-échange sur des viandes bovines, mettant une nouvelle fois à mal nos agriculteurs, et pourtant, notre Président Emmanuel Macron a appellé à faire preuve d’élan patriotique.

Le patriotisme économique est un serpent de mer du débat politique français depuis de nombreuses années. L’avènement de la mondialisation, à la suite de la chute de l’URSS, a mis en place de nouvelles règles économiques : libre-échange, allégeance identitaire multiple, droits de l’homme... Une organisation supranationale qui a très fortement enrichi la plupart des pays se conformant aux règles néolibérales. Cependant, la crise sans précédents de 2008 est la cause d’une remise en cause entière d’un système de dépendance mondiale. John Burton le mettait en évidence : un événement touchant un pays touche désormais l’intégralité du système mondial. La crise du Covid-19 en est une nouvelle preuve, la pandémie mondiale touchant la Chine a causé une déstabilisation sans précédents de notre système international.

Pourtant, de nombreuses personnalités politiques avaient dénoncé les risques encourus par cette dépendance accrue de la France vis-à-vis d’un marché qu’elle ne contrôlait pas. Le livre de 2006 de Bernard Carayon (alors député UMP), intitulé Patriotisme économique : de la guerre à la paix économique, mettait en évidence les contours de dérives incontrôlables ; à savoir dumping social ou encore le concept de guerre économique. L’homme n’agit que par réaction, il n’anticipe pas, il réagit, et c’est justement ça le problème. Bruno Le Maire et Emmanuel Macron ont appelé à une réaction avec le retour de cette notion de « patriotisme économique » pourtant fortement empreinte d’une réputation liée à l’extrême droite et au souverainisme. Ce retournement prouve une nouvelle fois que le gouvernement n’anticipe pas.

La réaction est tardive, nos denrées alimentaires sont fournies pour la plupart par l’Europe, voire par le monde, nos agriculteurs ont du mal à joindre les deux bouts. On constate cette volte-face avec la signature d’accords de libre-échange entre l’Europe et le Mercosur ainsi que les accords de CETA fortement portés par notre gouvernement, et qui ne sont en rien vecteurs de patriotisme. Les réactions ont été vives contre Éric Ciotti et Nicolas Dupont-Aignan : ils réclamaient des frontières moins poreuses, et pourtant, le retour de frontières nationales semble inéluctable. La défense de nos frontières est dépendante de l’Europe avec Frontex. Les marchés publics sont remportés par des entreprises étrangères, en défaveur d’entreprises françaises qui payent, au passage, un dumping social imposé par l’Union européenne. Pire : nous apprenons, désormais, notre dépendance vitale en termes de santé publique envers une Chine qui n’hésite pas à exercer des contraintes économiques contre ces « adversaires » tels que l’Inde ou Taïwan, par exemple. Nous sommes devenus les vassaux des nouvelles grandes puissances économiques.

L’idée de patriotisme économique n’est pas nouvelle, mais elle est désormais essentielle afin de relancer une économie fortement impactée, une nouvelle fois, par un marché mondialisé incontrôlable.

Joseph Gallard
Joseph Gallard
Étudiant en Sciences politiques

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