Le Festival Off d’Avignon, une bouée de sauvetage crevée

© J.-L. Châles
© J.-L. Châles

On a compris depuis longtemps que la culture n'était pas la priorité absolue du gouvernement. Mais l'arrivée des Jeux olympiques et leur cortège pharaonique de policiers et gendarmes pour assurer une sécurité brinquebalante a arrêté tous les festivals d'été au 21 juillet ! Le Festival d'Avignon (l'officiel) a démarré le 29 juin et le Festival Off le 3 juillet. C'est donc du 3 au 21 juillet que ce festival hétéroclite est programmé, soit 17 jours, puisqu'il faut retrancher les deux jours de repos imposés par l'URSSAF. D'ordinaire, ce festival offrait (si l'on peut dire, vu le coût exorbitant de la location des salles) quatre jours de plus. Les salles, bien sûr, n'ont pas voulu revoir leurs tarifs à la baisse (compter plus de 5.000 euros pour le festival pour ces créneaux de 1h30, montage, jeu et démontage compris dans une salle de 49 places).

Certains théâtres ont permis de commencer les représentations dès le 29 juin dans un Avignon en sommeil, les vacances scolaires n'ayant pas encore commencé. Avignon s'est réveillée lentement et atteint, maintenant, de belles fréquentations. Les murs se dissimulent sous des amas d'affiches, le moindre poteau promet mille spectacles alléchants. La tête joue les carrousels, l'œil s'escrime à distinguer ce qui peur retenir son attention. La laideur de certains visuels, l'amoncellement de couleurs criardes, de portraits féminins ou masculins qui rivalisent de racolage font rêver de campagne et de petits oiseaux. Dans les rues, les comédiens abordent le chaland pour vendre leur marchandise, les tracts jonchent le sol... Une fête même pas joyeuse. Un marché même pas juteux. Sauf pour les salles.

Plus de 1.600 spectacles par jour

On a l'impression que le festival implose. Cette année, plus de 1.600 spectacles sont représentés chaque jour ! Le nombre de compagnies augmente chaque année, tandis que le public reste stable et même diminue lorsqu'on lui impose des dates improbables. Et pourtant, les troupes se précipitent pour venir y jouer, risquant leur survie, tant une pièce est condamnée au succès si elle veut continuer d'exister. On peut en déduire qu'en régions comme à Paris, faire du théâtre relève d'un pari fou pour tous ces passionnés, souvent talentueux, qui n'ont qu'un seul désir : offrir du plaisir au public, un plaisir charnel, sensuel, partagé avec les autres spectateurs. On rit, on pleure, on rêve, on s'interroge, ensemble.

Les profiteurs bombent le torse, alléguant que ce nombre délirant de spectacles prouve la bonne santé du théâtre. Et si c'était, précisément, le contraire ? Chacun vient ici pour jouer plusieurs jours de suite, trouver un public et séduire journalistes et programmateurs qui leur offriront de mirobolantes tournées. Ce sera vrai pour une petite poignée de compagnies. Fatalement, nombre de troupes quittent les remparts exsangues, ruinées, déçues, un goût très amer dans la bouche.

Cet article a été mis à jour pour la dernière fois le 16/07/2024 à 10:12.
Jean-Louis Châles
Jean-Louis Châles
Professeur honoraire d'art dramatique au Conservatoire à Rayonnement Régional de Nice.

Vos commentaires

12 commentaires

  1. Pourquoi donner un avis si l’on n est jamais venu ? Depuis 20 ans nous avons élu domicile à Avignon 15 jours pendant le festival. Nous enfants et petits enfants la première semaine dès l’âge de 2 ans. Et nous deux ensuite. Quelle merveille ! Toutes les pièces ne sont pas à notre goût…mais quand vous voyez  » le petit prince  » Antigone avec la même actrice ou le secret des ombres ou Marivaux ou les marchands d’étoiles ou Moby Dick ….ou Gorki Tchekhov ou.. alors ne dites pas qu’il n’y a plus de théâtre ni d’acteurs qui vous donnent des frissons. Venez et regardez.
    La critique est facile mais l’art difficile

  2. Dommage ces commentaires négatifs, venant parfois de gens qui n’y ont jamais assisté… Le festival a ses défauts. Certes tout n’es pas de bonne qualité. Mais parler de bobos, wokisme, deconstruits systématiquement, que c’est consternant !
    Des pièces classiques , des créations basées sur des faits historiques, des témoignages de vies, des biographies, des fictions… Beaucoup de belles choses qui valent bien mieux que des blabla de certaines radios, télés.
    Que le festival vive encore longtemps !!!

  3. le in et le off, connais pas, sans doute une nouvelle race d’extra terrestres. Très jeunes mes parents le jeudi m’emmenaient au théâtre Français contempler les spectacles Racine Molières et autre avec en faveur Eugène La Biche, George Feydeau, en somme les auteurs du genre vaudeville mais avec le théâtre moderne tel celui qu’on trouve sur une chaîne public, une tristesse pour la culture Française.

  4. I l y a une large proportion de mauvais comédiens et artistes qui ne survivent que grace aux subventions et du pillages de la poche des français. S’ils étaient si bons il n’en auraient pas besoin. Ils veulent bien ici de la priorité nationale euphémisée en Exception cul turelle. Je connais trop de ces bons à pas grand chose et se prennent pour des artistes de génies .

  5. Le « IN » ou le « OFF » sont dans le même délire ! … SI seulement tous ces « déconstruits » étaient débranchés ça nous coûterait bien moins cher et ça nous enlèverait bien des déceptions ! …

    • Si le théâtre ressemble a la chanson aujourd’hui alors on comprend la désaffection du public. Le talent a disparu de beaucoup de productions pour faire place au wokisme et l’entre soi.

  6. Vous oubliez les rasades de wokisme largement distribuées dans la majeure partie des spectacles. Forces et contraints s’ils veulent rester dans le cercle de la bien pensance. Une visite l’année dernière m’a suffit. Terminé!

  7. Vu le niveau intellectuel de la majorité de ces spectacles le public ne se bouscule pas pour obtenir une place, il en va de même du théâtre que de la décadence de notre pays, tout fout le camp.

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