[LE GÉNIE FRANÇAIS] De Tabarly à la plus grande course du monde
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Le Vendée Globe, lancé en 1989, est actuellement la plus grande et la plus difficile course à la voile autour du monde. On doit ce pari insensé à la rencontre de deux hommes, l’organisateur et navigateur Philippe Jeantot et le président du conseil général de Vendée, Philippe de Villiers, qui y a cru tout de suite. Quelques décennies plus tôt, les Français ne s’intéressaient pas à la course en mer. C’est l’exploit d’un génie de la navigation, Eric Tabarly, qui a tout changé. Le Breton, Éric Tabarly restera sans nul doute dans l’histoire comme le plus grand marin du XXe siècle. Officier et pilote de l’Aéronavale, architecte et concepteur de génie, navigateur exceptionnel, écrivain prolifique, formateur d’autres champions de la voile, il était un skipper respecté de tous. Pas seulement pour son génie mais aussi pour son humilité. Tabarly s’est inspiré de son expérience aéronautique, il a devancé son temps en appliquant ses connaissances de l’air à la mer. Il a permis aux voiliers de course d'aller toujours plus vite.
Le dernier des anciens et le premier des modernes
Considéré comme le père de l’« école française » de la course au large, il a formé les plus grands navigateurs français : le regretté Alain Colas qui a subi le même sort que lui en disparaissant en mer ; Olivier de Kersauzon, son ami, qui le surnommait « l’idole des houles » et disait de lui : « c’est le dernier des anciens marins et le premier des modernes » ; Gérard Petitpas, Marc Pajot, Titouan Lamazou, Philippe Poupon, Michel Desjoyeaux, Jean Le Cam, etc.
Explorateur en hydrodynamique
Avec le temps, Tabarly sera classé dans les grands navigateurs de l‘histoire tels que les explorateurs Vasco de Gama, ou Magellan, mais son exploration à lui restera la vitesse. En 1976, il conçoit un prototype expérimental : l’hydroptère. Les ingénieurs de Dassault Aviation Alain de Bergh et Pierre Perrier s’appuieront sur les croquis imaginés par notre marin breton. Le projet sera ensuite concrétisé par Alain Thébault, skipper et génial inventeur de bateaux volants.
Jamais un bateau n’était allé aussi vite
Le 4 septembre 2009 à Hyères, l'hydroptère de Thébault, trimaran de sept tonnes, battra le record absolu de vitesse à la voile, sur 500 mètres avec 55 nœuds, soit plus de 100 km/heure. Il s’agit d’un voilier pouvant naviguer hors de l’eau à partir d'une certaine vitesse grâce à un ensemble d'ailes immergées qu’on appelle les foils. Les foils ont révolutionné la flotte des monocoques. Vingt-cinq des quarante bateaux, qui prennent le départ de ce 10e Vendée Globe aux Sables-d’Olonne, en sont équipés.
1960, les années bonheur
Revenons au milieu des années 1960. Nous sommes alors à l’apogée des Trente Glorieuses. « Ce sont les années bonheur », comme dirait Patrick Sébastien. Les caisses de l’État sont pleines. Les Français insouciants écoutent la radio qui ne diffuse que des chansons d’amour. Charles Aznavour vient d’écrire un succès pour Sylvie Vartan : « Je serai la plus belle pour aller danser ». Et au cinéma, on est plié en deux avec Le Gendarme de Saint-Tropez.
Le jour où tout a commencé
Le 19 juin 1964, le général de Gaulle est particulièrement fier. Éric Tabarly vient enfin de vaincre les Anglais sur l’eau. Inconnu, il crée la surprise en détrônant l’imbattable navigateur Francis Chichester avec trois jours d’avance lors de la course transatlantique en solitaire (Ostar). Cette course reliant l’Europe et l’Amérique du Nord va surtout faire découvrir le magnifique sport de la voile aux Français qui, jusque-là, ne s’intéressaient pas à la mer… au-delà de la plage ! Notre navigateur sera décoré de la Légion d’honneur par le Général.
La course en mer devient populaire
Ainsi la course en mer bénéficie désormais d'un engouement particulier dans l’Hexagone. Le public admire cet exploit solitaire qui exige un mental et une volonté hors normes, au-delà des qualités physiques indispensables. « Courage, responsabilité, honnêteté et respect de la parole donnée » sont les valeurs de Tabarly.
1967, six courses, six victoires
Dans la seule année 1967, avec Pen Duick III, surnommé « La cathédrale de toile », il remporte les six grandes courses auxquelles il participe. En 1976, il gagnera une deuxième fois la Transat en solitaire à bord de son Pen Duick VI, un bateau pourtant conçu pour naviguer avec un équipage de 15 hommes ! Impossible de dresser ici la longue liste de ses victoires. Le grand marin a suscité un nombre incalculable de vocations. La France peut être fière de compter aujourd’hui dans ses rangs les plus grands navigateurs du monde. C’est dans cette dynamique que le premier Vendée Globe a vu le jour.
« Ce n’est pas l’homme qui prend la mer, c’est la mer qui prend l’homme », chante Renaud. Éric Tabarly va passer par-dessus bord un soir de juin 1998.
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