Le groupe corrézien se sépare : Trois cafés gourmands, et l’addition ?

En attendant, Trois cafés gourmands, c’était un groupe qui faisait du bien aux gens. Ce n’est pas si fréquent...
trois cafés gourmands

Trois cafés gourmands était un chouette groupe, comme il n’y en a pas assez, et qui vient fortuitement de se séparer. Enracinés dans leur terroir de Corrèze, tout comme Francis Cabrel l’est dans le Lot-et-Garonne ou le regretté Jean-Louis Murat le fut en Auvergne, ils chantaient leur terre natale. Avec bonne humeur et sans afféterie.

D’où ces quelques vers issus de leur plus grand succès, À nos souvenirs : « Comment puis-je oublier/Ce coin de paradis ?/Ce petit bout de terre/Où vit encore mon père/Comment pourrais-je faire ?/Pour me séparer d’elle ?/Oublier qu’on est frères/Belle Corrèze charnelle. » Et cette dernière strophe, pour la fin : « Vous me trouvez un peu con/N'aimez pas ma chanson/Vous me croyez bizarre/Un peu patriotard/Le fruit de ma réflexion/Ne touchera personne/Si vos pas ne résonnent jamais dans ma région. » Le tout sur une chouette mélodie, gaie, chic et sautillante.

Les raisons de leur séparation ? Tout aussi vieilles que l’industrie du spectacle : la chanteuse, Mylène Madrias, entend poursuivre une carrière en solo, se débarrassant au passage de ses deux acolytes historiques, Sébastien Gourseyrol et Jérémy Pauly. Logique, sachant qu’il vaut toujours mieux se partager les droits d’auteur à une plutôt qu’à trois. Officiellement, le trio existait depuis dix ans ; mais cela en faisait au moins vingt qu’il arpentait les bals de province, la meilleure école qui soit.

Il va sans dire que ce triste dénouement n’a pas agité la presse musicale plus que de raison, des Inrockuptibles à Rock & Folk. Dommage. Il est vrai que cette chanson française traditionnelle, entre terroir et coups à boire entre amis, n’a jamais véritablement eu la cote en nos contrées.

Et pourtant… Rappelez-vous le millésime 1986. Là, le tube ultime, « Viens boire un petit coup à la maison », signé du groupe au nom plus qu’approprié, Licence IV, détrône, l’année suivante, « La Isla Bonita » de Madonna durant de longues semaines. Ce n’est certes pas du Georges Brassens, mais la France d’alors plébiscite la chose, en même temps que ces hymnes de camping permettant de jouer à la chenille tout en faisant tourner les serviettes.

À l’époque, la gauche médiatique se pince le nez. Claude Sérillon, qui n’est pas encore le conseiller particulier de François Hollande, sera ainsi vite remis à sa place par un Maxime Le Forestier, l’homme de « La Maison bleue » (ode à d’autres substances qui font rigoler), qui lui assure que la chanson avinée fait partie intégrante du patrimoine français. Grand moment télévisuel et gros malaise sur le plateau.

Depuis, les Trois cafés gourmands auront néanmoins poursuivi leur petit bonhomme de chemin des années durant. Tout comme Soldat Louis, chansons gaillardes, ou Tri Yann, chansons de marins, groupes qui, loin des radars parisiens, n’en finissent plus de chanter leurs terroirs respectifs tout en emplissant les salles. Avec des paroles simples et joyeuses, entre pont des bateaux et zinc des bistrots. Bref, tout ce que ne doit sûrement pas goûter Sandrine Rousseau. Étrange, tout de même, que cette détestation des sentiments doux et des petits bonheurs au quotidien, devenue nouveau bréviaire médiatique.

Et après, une petite dernière tournée pour la route ? Ces quelques vers issus de « L’Année prochaine », l’un de leurs derniers succès, par exemple ? Pourquoi pas : « Les années filent comme des secondes/On n’a pas vu passer le temps/Si on a fait le tour du monde/Qu’est-ce qu'on a compris du présent ?/Qu’est-ce qu’on a retenu de la ronde/Des hommes, des femmes et des enfants/Que la vie mon grand, oui la vie mon grand/C’est s’aimer. » C’est joli et sans prétention. Comme une sorte de marque de fabrique.

Après, on peut toujours préférer Christine and the Queens. Oups, pardon, « Chris », depuis que monsieur/madame se prend pour un homme après s’être pris pour une voiture, lorsqu’il/elle exigeait de se faire appeler « Red Car ». Tous les goûts sont dans la nature. Même ceux prônés par Libération et Télérama. En attendant, Trois cafés gourmands, c’était un groupe qui faisait du bien aux gens. Ce n’est pas si fréquent, par les temps qui courent. À défaut de fêter leur célébration, qu’on serve au moins le pousse-café !

Picture of Nicolas Gauthier
Nicolas Gauthier
Journaliste à BV, écrivain

Vos commentaires

8 commentaires

  1. Ils font partie de ces groupes qui passent totalement sous les radars de la presse musicale essentiellement parisienne mais sont connus comme les loups blancs dans leurs provinces . Ils ont le tort d’utiliser le patois du coin et de raconter le quotidien de leur province . Dans le secteur des Charentes , il y avait le groupe saintongeais « les binuchards  » qui sévissaient pendant toute la première partie des années 2000 jusqu’en 2017 . Ils faisaient un rock festifs en s’inspirant des histoires locales tout cela avec les expressions bien charentaises . Ils étaient incontournables et animaient toutes les fêtes nombreuses dans cette région et souvent associées aux productions viticoles . J’ai l’impression que la disparition de ces groupes et chanteurs locaux es consécutive à l’arrivée de Macron au pouvoir. Les gens n’auraient plus envi de faire la fête ensemble ?

  2. Je pense à une autre chanson plutôt terroire elle aussi mais tellement adulée par tous, même et surtout la gauche, « Pourtant, que la montagne est belle… » et ce fut un sacré succès, mais, mais, il s’affichait communiste je crois bien…

  3. Même vous, mon cher Gauthier, êtes complice de cette extinction de la chanson française en nommant Correzien ce groupe Limousin. Une rivière peut séduire mais ne fera jamais une Province .

  4. Il est évident que la gauche (caviar ou pas) préfère le rap afro-maghrébin et la musique arabe qui monte crescendo sur les radios. Même s’il ne comprennent pas qu’ils sont insultés à longueur de rimes.

    • Être détesté de Ruquier est un signe de qualité !
      Je les aime bien, ils apportaient joie et légèreté dans leurs chansons. Tout comme Vianney, pas aimé des gauchos lui non plus..

  5. J’ai maintenant 71 ans et grâce à ce magnifique groupe j’ai retrouvé un moment de ma jeunesse m. Merci à eux et bonne route

Commentaires fermés.

Pour ne rien rater

Les plus lus du jour

Il est plus facile de faire du sociétal que de réindustrialiser
Gabrielle Cluzel sur CNews
Lire la vidéo

Les plus lus de la semaine

Les plus lus du mois