Le livre de l’été : La Reconquête (20)
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Salon Murat, palais de l’Élysée
Les ministres étaient calmes, souriants, confiants. Laurent Wauquiez les regarda un à un.
À sa gauche était assis Robert Ménard. Il avait été appelé pour occuper la Place Beauvau. Le ministère de l’Intérieur lui allait bien car il venait du terrain. En tant que maire de Béziers, la population l’avait réélu à 60 %, en particulier grâce à sa politique sécuritaire et à ses actions en faveur de la police et à l’encontre des délinquants. Wauquiez n’avait d’abord pas été favorable à cette nomination, mais Marion avait insisté. Il le trouvait trop grande gueule, il manquait de calme sur les plateaux et il était du genre à faire cavalier seul. Mais il lui reconnaissait un grand courage politique et un vrai sens du bien commun. Ménard était en pleine discussion avec Guaino, qui avait obtenu d’être garde des Sceaux. Ce dernier connaissait bien les rouages et savait qu’il ne devrait pas faire trop de vagues. Sa place était l’une des plus risquées car la réforme de la Justice allait être considérable. À l’Éducation nationale, ils avaient nommé François-Xavier Bellamy. Lui serait un atout sérieux, il était brillant, jeune, parlait bien, était mesuré, il bénéficiait d’un énorme capital confiance et on lui prêtait une sincérité pour partie liée à son visage poupin. Lui et Wauquiez s’estimaient mutuellement depuis leur défaite commune aux européennes. Bellamy avait de belles idées pour renouveler le système éducatif français. Il attendait, silencieux, sagement même, que débute le Conseil. En face de lui, plongé dans la lecture d’un premier rapport, Pierre de Villiers avait hérité de la Défense et des Armées, Wauquiez savait pouvoir compter sur l’ancien chef d’état-major des armées. Son voisin de table, Maxime Juvin, avait, quant à lui, la charge du ministère de l’Industrie, du Travail et de l’Écologie. Ses deux grands objectifs dans les cinq ans à venir seraient la baisse du chômage et la protection de l’industrie française pour permettre sa renaissance. Il aurait du boulot. Cet ex-chef d’entreprise avait la légitimité nécessaire. À l’Immigration, ils avaient mis Mariani, qui avait du cran et qui ferait bien le job. Il était passé des Républicains au RN en 2018 et avait des connexions dans les deux partis. Ils avaient placé à l’Économie et aux Finances Hervé Gaymard, qui avait accepté la charge, et un grand chef d’entreprise aux Comptes publics. Le ministre de l’Agriculture était le dirigeant de l’une des plus grandes coopératives françaises. Enfin, aux Affaires étrangères et européennes, c’est Dupont-Aignan qui avait été choisi.
Wauquiez regarda l’ensemble de son gouvernement : pas une seule femme. Il avait appelé sept candidates, toutes avaient refusé, et Marion se moquait de la parité : « Si on me reproche à moi, une femme, d’avoir un gouvernement trop masculin, ce sera le comble ! »
La porte s’ouvrit, elle entra, il la laissa s’installer et lui donna la parole d’un simple regard. Elle les regarda avec fierté, certaine que cette équipe pouvait réussir à redresser la barre avec courage, quelles que soient les tempêtes à traverser. En leur souriant, elle leur dit :
– Merci. Merci à chacun de vous car je sais que vous êtes conscients que l’engagement que vous prenez en entrant au gouvernement ne sera pas une partie de plaisir. Merci d’avoir pactisé avec le diable.
La plupart des nouveaux ministres sourirent à ces mots.
– Je suis très heureuse que vous ayez accepté de faire partie du gouvernement de Laurent. Nous vous avons choisis parce que nous vous estimons, nous avons confiance en vous et nous vous pensons à la hauteur de l’enjeu. C’est aujourd’hui que notre mission commence, elle est collective, elle va durer cinq ans, elle va être complexe, longue. Nous allons souffrir car nous allons prendre des décisions graves, radicales, sans appel. Chacun de vous aura une feuille de route avec des enjeux lourds à porter et à défendre devant les Français. Nous allons agir au mieux, dans l’intérêt de notre pays, mais nous allons aussi devoir prendre des risques. Vous le savez, j’ai porté un programme précis et exigeant durant la campagne, je compte bien l’appliquer à la lettre, tant que cela sera bénéfique à nos concitoyens. Certaines mesures vont être très impopulaires, d’autres nous mettront en conflit avec des pays qui se disent nos alliés ; la plupart seront, de toute façon, attaquées par les médias. Nos porte-parole seront donc absolument nécessaires à la réussite de nos actions, je vous les présenterai dans un second temps. J’attends de chacun de vous une loyauté totale, toute personne qui fera cavalier seul sera immédiatement renvoyée du gouvernement. Si nous ne jouons pas collectif, nous n’arriverons à rien. Vous savez tous ce que nous allons faire. Si vous êtes ici, c’est parce que vous soutenez la totalité de notre programme. J’aimerais maintenant laisser Laurent vous expliquer notre feuille de route jusqu’aux législatives.
Laurent et Marion avaient réparti leurs rôles entre eux, de façon à éviter les dysfonctionnements qu’avaient connus Sarkozy et Fillon ou encore Hollande et sa gestion du gouvernement par SMS.
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