Le Lutetia : un joyau parisien passe aux mains de la Chine

Le 3 avril 2025 marque une étape significative dans l’hôtellerie parisienne : le groupe hôtelier chinois de luxe Mandarin Oriental a officiellement pris la direction de l’hôtel Lutetia, rebaptisé officiellement pour l’occasion Mandarin Oriental Lutetia, Paris. Cela renforce la présence du groupe asiatique dans notre belle capitale à travers ce lieu emblématique de la Rive gauche. Son nom, reprenant l'ancien patronyme latin de Paris, rappelle ainsi l’enracinement historique profond de l’établissement dans l’âme de la ville, faisant du Lutetia bien plus qu’un simple palace : le témoin silencieux d’un chapitre de l’Histoire parisienne.
Histoire d'un palace parisien
Fondé en 1910 par la veuve Boucicaut, également propriétaire du grand magasin Le Bon Marché, l’hôtel Lutetia a été conçu pour accueillir une clientèle aisée visitant la Rive gauche de Paris. Le projet de construction fut confié aux architectes Louis-Hippolyte Boileau et Henri Tauzin. Une fois achevé, l’établissement devint rapidement un symbole du style Art nouveau, avant de s’imprégner d’influences Art déco au fil du temps. Il s’imposa aussi comme un haut lieu de la vie intellectuelle, artistique et politique, accueillant des figures majeures comme Pablo Picasso, Henri Matisse, Charles de Gaulle ou encore James Joyce.
Pendant la Seconde Guerre mondiale, le Lutetia fut réquisitionné par l’armée allemande, qui y installa l’Abwehr, le service de renseignement et de contre-espionnage de la Wehrmacht. À la Libération, l’hôtel changea de fonction : il devint un lieu d’accueil pour les rescapés et les survivants des camps nazis. C’est entre ses murs que certains retrouvèrent, avec une émotion indicible, des proches revenus de l’enfer. D’autres, en revanche, y comprirent dans une angoisse et une peine immenses que les êtres chers qu’ils attendaient ne reviendraient jamais.
Après la guerre, le Lutetia retrouva sa vocation hôtelière de luxe. Il changea également plusieurs fois de propriétaires, chacun apportant sa pierre à l’édifice à travers des campagnes de modernisation ou de restauration. En 2007, le bâtiment fut classé monument historique par le ministère de la Culture en reconnaissance de son importance patrimoniale et architecturale.
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Aujourd’hui, l’hôtel propose 184 chambres, dont 47 suites - certaines ont été décorées par des personnalités de renom comme le réalisateur Francis Ford Coppola. Le prix d’une nuit dans ce palace varie, aujourd’hui, de 1.500 euros à plus de 10.000 euros pour les suites les plus prestigieuses.
La reprise par le groupe Mandarin Oriental
En décembre 2024, Mandarin Oriental annonçait son intention de reprendre la gestion du Lutetia, dans le cadre de sa stratégie ambitieuse visant à doubler la taille de son portefeuille mondial d’ici 2034. Le groupe chinois exploite actuellement 41 hôtels, 12 résidences et 24 maisons dans 26 pays et territoires, dont un autre palace parisien situé rue Saint-Honoré.
L’intégration du Lutetia s’inscrit ainsi dans une volonté claire de renforcer la présence du groupe dans les grandes capitales internationales et de consolider son positionnement dans le luxe. Comme l’a exprimé Laurent Kleitman, directeur général de Mandarin Oriental : « Nous célébrons non seulement le riche patrimoine de la Rive gauche, mais aussi notre vision de l’avenir de l’hôtellerie de luxe – où l’Histoire, la culture et le service légendaire s’unissent pour créer des expériences inoubliables. »
L’inauguration officielle du Mandarin Oriental Lutetia, Paris s’est tenue le 3 avril 2025 en présence de la famille Akirov, qui reste propriétaire des murs. Celle-ci a déclaré, à cette occasion : « La famille Akirov est l’heureuse propriétaire de Lutetia, Paris est Lutetia et Lutetia est Paris ! Nous sommes profondément engagés dans le succès de l’hôtel, l’un des plus grands palaces de Paris et l’un des hôtels les plus distingués d’Europe. […] Nous partageons une vision commune pour Lutetia : honorer son héritage et son esprit, tout en élevant l’hôtel vers de nouveaux sommets d’excellence. »

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27 commentaires
Réponse à ‘Ruth Abaga’ ci dessous :
En effet, il est possible de supposer que ce transfert de gestionnaire serait la conclusion d’une gestion déficitaire ???
Nous allons probablement leur donner une subvention pour gérer l’hôtel.