Le marché libéral gère mieux l’énergie que la politique publique

© Samuel Martin
© Samuel Martin

En cette rentrée morose caractérisée par un contexte socio-politique inédit, la baisse du prix de l’énergie est la seule bonne nouvelle pour des Français dont le pouvoir d’achat reste en tête de leurs préoccupations. Une embellie parfois en demi-teinte pour les citoyens. Car si la baisse du prix des produits pétroliers est bien perceptible (depuis le printemps, le prix du SP95 est descendu de 15 centimes, le diesel de 20 centimes et le fioul domestique de 30 centimes), les prix du gaz et de l’électricité longtemps censés être protégés par les boucliers tarifaires et les prix régulés ne reflètent pas les baisses récentes.

L’exécutif démissionnaire utilise ces baisses comme marqueur, prétextant qu’elles seraient liées à des décisions politiques pertinentes. En réalité, la baisse des prix est principalement liée à une normalisation des marchés internationaux.

Le baril entre questions politiques et taux de change

Prenons l’exemple des produits pétroliers. Leurs prix reflètent d’abord les cours du pétrole ayant atteint des sommets lors du déclenchement du conflit russo-ukrainien. Depuis début 2023, ils se sont normalisés, oscillant entre 80 et 90 dollars/baril. Le ralentissement de la croissance chinoise a légèrement impacté le baril à la baisse au cours des derniers mois. Après un plus haut à 90 dollars, en avril, il est retombé sous les 80 dollars, fin août.

Le pétrole étant payé en dollars, son cours est fortement dépendant du taux de change euro/dollar. Le taux actuel (1,11 fin août, contre 1,06 en avril) a mécaniquement abaissé le prix du pétrole en euros. Baril et change justifient, en moyenne, une baisse de l’ordre de 8 centimes à la pompe.

Les cours des produits raffinés (essence, diesel, fioul domestique) dépendent de l’offre et de la demande sur leurs propres marchés. Ils sont gouvernés par la « marge de raffinage » égale à la différence de prix entre le produit raffiné et le pétrole brut. Ces marges, qui avaient atteint aussi des sommets en 2022, ont fortement baissé depuis un an à la suite de la normalisation des marchés. Après un plus haut annuel, début février, pour le diesel, et début avril, pour l’essence, elles se sont réduites de dix centimes pour l’essence et de douze centimes pour le diesel.

La marge de distribution (qui intègre le transport, les frais d’exploitation de la station ainsi que la concurrence sur les marchés nationaux) n’a quant à elle quasiment pas varié au cours des derniers mois (elle est restée comprise entre 0,2 et 0,25 €/l). Enfin, pour ce qui concerne les taxes, la TICPE (0,69 €/l pour le SP95 et de 0,61 €/l pour le diesel) n’a pas varié. En revanche, la TVA a mécaniquement baissé dans l’absolu, puisqu’elle s’applique à la somme prix HT + TICPE. La part des taxes compte pour un peu plus de la moitié du prix global des carburants.

De trompeurs boucliers tarifaires

Le gaz, qui avait atteint des sommets lors du déclenchement du conflit russo-ukrainien (jusque 150 €/MWh), s’est aussi stabilisé, autour de 30 €/MWh, un cours qui reste quand même le double de ce qu’il était avant le conflit. Fortement impactée par les prix du gaz, l’électricité a aussi retrouvé des couleurs raisonnables avec un MWh oscillant, sur les marchés de gros, entre 50 €/MWh et 100 €/MWh (il avait dépassé les 500 €/MWh durant l’été 2022). Comme déjà mentionné, ces baisses ne sont pas perceptibles pour le particulier, qui a vu sa facture de gaz et d’électricité s’accroître significativement au cours des trois dernières années. Ainsi, entre 2022 et 2024, les tarifs régulés de l'électricité ont certes connu une hausse historique de +40 %. Toutefois, sans bouclier tarifaire (tel fut le cas chez nos principaux voisins européens), la hausse en 2022 aurait été de 99 %.

Si les boucliers tarifaires et les prix régulés sur le gaz et l’électricité protègent en apparence le consommateur en période d’instabilité, en revanche, ils abusent le consommateur sur les prix et l’inflation. Nous en prenons pour preuve le prix du kWh électrique insidieusement multiplié par 2,5 depuis 2007 au mépris du consommateur, et ce, sans raison objective de marché. Sachant que l’inflation cumulée 2007-2024 a été de 34 %, en toute logique, le prix du kWh devrait être aujourd’hui de 0,135 € et non de 0,25 € (tarif régulé 2024). En appliquant le même raisonnement à l’essence (1,271 €/l en 2007 et 1,72 €/l en septembre 2024), l’augmentation est de 35 %... soit exactement le taux d’inflation 2007 à 2024. Cela conduit à deux remarques.

D’une part, ce sont donc principalement des facteurs exogènes à la France (prix du baril, taux de change et marges de raffinage) qui expliquent la baisse récente des prix de l’énergie. Ils sont liés à la stabilisation de la situation internationale et non à des décisions de politique intérieure, comme nous le laisse entendre l’exécutif. D’autre part, le marché libéral profite bien davantage au consommateur que des prix décidés par une politique publique censée le protéger. Le contraire de ce qui est ancré dans l’imaginaire collectif.

Philippe Charlez
Philippe Charlez
Chroniqueur à BV, ingénieur des Mines de l'École polytechnique de Mons (Belgique), docteur en physique de l'Institut de physique du globe de Paris, enseignant, expert énergies à l’institut Sapiens

Vos commentaires

9 commentaires

  1. Seul bénéfice de ces hausses de l’électricité , c’est que la baisse des consommations est devenue réelle et tempère, l’augmentation des tarifs !! des économies sur la consommation devenue plus judicieuse et écolo, les gens surveillent grâce à des applications performantes et favorisent plus le tarif de nuit !! N’était ce pas d’ailleurs un des buts cachés ?

  2. Il fut un temps où une partie de mes impôts, comme bon nombre de concitoyens, étaient destiné a construire des centrales nucléaires avec le bénéfice que nous avons pu nous en rendre compte alors ces politiciens que l’on nomme « vert » suivi par des chef d’état que nous avons peine a considérer comme tel, sans demander aux citoyens leur avis comme le devait le faire en toute démocratie ont fermés une centrale et arrêtes des réacteurs qui a eux seul représentaient la production de la plus par des éoliennes.

  3. Nous pourrions ajouter le terme « escrocrie en bande organisée ». Les profits des revendeurs d’énergie, ceux de l’électricité en particulier, lesquels nous ont été vendus pour faire jouer la concurrence, rappelons-le, sont stratosphériques. Rien ou presque n’a été fait pour tenter de freiner cette spoliation des peuples et de nos entreprises : l’objectif étant avant tout de préserver la compétitivité de l’industrie allemande et de certains pays de l’Est dépendants alors du gaz russe, alors que la France dispose elle d’un prix de l’électricité bien plus compétitif grâce au nucléaire. Nous pouvons remercier entre autres le « moi président », celui qui ne doit pas s’aimer lui-même puisque bien évidemment riche, et qui n’a pas hésité à sacrifier la compétitivité de la France en pactisant avec les écologistes, et particulièrement C. Duflot, pour pouvoir être élu.

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