Le nouveau bac est fini (ou presque) : on fait quoi maintenant jusqu’à l’été ?

Pierre Mathiot

Cette année, Pâques était bien à Pâques, le 1er avril au 1er avril, mais le bac a eu lieu en mars et les notes sont tombées cette semaine, le 12 avril. Non, non, je ne plaisante pas. Et si vous avez des enfants lycéens, vous savez de quoi je parle. Ainsi en a décidé la réforme Blanquer. Pour être précis, ce sont les épreuves de spécialité, qui comptent fortement pour l'obtention du bac, qui ont été passées, corrigées, notées. Et donc les terminale savent déjà, pour la quasi-totalité, que le bac est dans la poche. En effet, le reste de la note est faite du contrôle continu, des notes de français, épreuve anticipée passée en fin de première, de la philosophie et du fameux grand oral.

Mais voilà, nous ne sommes qu'en avril, il reste encore un trimestre. Que faire, dans cette période où la motivation est déjà très relative, maintenant que la réforme a enlevé tout enjeu ? Les élèves n'ont plus devant eux que le grand oral à préparer. Et les vacances !

D'où les conseils que Pierre Mathiot, le père (de gauche) du nouveau bac, par ailleurs directeur de Sciences Po Lille, vient donner aux enseignants, pendant les vacances, pour les aider à traverser ces trois mois qui les attendent. Comme si les choses étaient loin d'aller de soi, comme si ce bac sans queue ni tête, qu'il faudra bien sûr réformer dans ses multiples aberrations, avait besoin d'une explication de texte. D'où ce texte, paru dans la newsletter hebdomadaire que le ministère nous envoie, joliment baptisée « info@professeurs ». Comme s'il fallait prévenir un certain... malaise. Disons-le d'emblée : ce texte est consternant.

Cette interview est un aveu qui reconnaît combien la dernière réforme qui a institué ce bac Mathiot est venue casser le peu qui subsistait encore de sérieux dans cette vieille institution sabotée par quarante ans de gauchisme égalitariste : « Lors du troisième trimestre, les élèves ne doivent pas relâcher leurs efforts et se désinvestir. L’année n’est pas terminée, même si les épreuves de spécialité ont eu lieu. Les choses ne sont pas jouées ! Ne l’oublions pas, il leur faut travailler. » On aimerait aussi que M. Mathiot vienne tenir ce gentil discours de gentil CPE un peu paternaliste à nos terminale STMG.

Deuxième aveu, tout entier contenu dans la question de l'interviewer : « Les élèves auront sans doute moins de notes durant ce trimestre. Ne se démotiveront-ils pas ? » Peut-être que le ministère aurait pu se poser la question un peu plus tôt... Mais devant l'évidence, notre apprenti sorcier du bac se surpasse : ce troisième trimestre du vide qu'il a créé va permettre aux lycéens de se préparer... aux études supérieures !

C'est, pour lui, « un temps de projection vers le futur [...] un temps où les élèves doivent pour partie se déconnecter des notes et se connecter avec l’enseignement supérieur, avec ses attendus [...] pour acquérir des compétences transversales exigées dans les études supérieures : prise de notes, gestion du temps, organisation du travail, lecture personnelle, recherche documentaire… » Tout ce qui n'a donc pas été acquis depuis trois ans va l'être dans ces pré-grandes vacances qui commencent en avril. Il fallait y penser. On admirera aussi le beau jargon de la maison Éducation nationale : se déconnecter des notes, compétences transversales... Comme cela fait déjà dix ans que nos enfants ont appris tout ça, quel besoin d'ajouter encore un dernier trimestre encore plus vide que les autres !

Mais en fait, oui, Pierre Mathiot a raison : les lycéens vont se familiariser avec le vide qui les attend dans les universités, elles-mêmes déglinguées par le même gauchisme et pilotées par des Mathiot sous la pression de syndicats étudiants, pépinières de futurs Mathiot, encore plus gauchistes qu'eux.

Un espoir, tout de même : Pierre Mathiot s'est rendu compte que son bac démembré avait plongé lycéens, parents et professeurs dans une perplexité abyssale, et cela, dans une langue de bois remarquable : « il s’agit d’une transformation importante, que les élèves, les professeurs et les familles s’approprieront avec le temps, elle ne se concrétisera pas en un jour. »

Une dernière réussite, à mettre à l'actif du duo Blanquer-Mathiot : alors qu'on ne parlait que « reconquête du mois de juin », ils ont réussi à mettre une pagaille totale dans les lycées dès le mois de... mars, avec un absentéisme record, des emplois du temps charcutés, et j'en passe. En effet, c'est là que se tiennent ces épreuves de spécialité, et comme il faut à nos chers lycéens une semaine de révision avant, une semaine de repos après, et qu'il faut aussi que les professeurs corrigent ces épreuves, c'est tout le mois qui est dévasté.

Avec un tel bilan, Pierre Mathiot devrait rapidement devenir ministre.

Frédéric Sirgant
Frédéric Sirgant
Chroniqueur à BV, professeur d'Histoire

Vos commentaires

31 commentaires

  1. La France peut-elle encore reculer dans le classement PISA ou a t’elle atteint le fond du bourbier ? En tout cas, nos responsables politiques font tout pour …. Ah non, c’est vrai que ça va s’arranger ! Notre génial ministre de l’éducation nationale, après avoir estimé qu’il fallait imposer la culture wookiste et l’éducation sexuelle à l’école (dès la maternelle ?), va maintenant s’occuper de ce qui fonctionne encore à peu près, en tout cas le mieux, l’école privée … Ca promet !

  2. Quelles économies nous ferions en imprimant sur les Actes de Naissance un encart « BACHOT » à détacher selon le pointillé à l’âge de 18 ans . Professeurs et élèves pourraient ainsi partir en vacances d’été dès Pâques sonnantes , et cet étalement simplifierait le travail de la SNCF .

  3. Ce qui est triste, c’est que ces futurs citoyens se rendront compte à l’âge de raison de l’ineptie de leur enseignement ! Le réveil va se révéler très douloureux pour eux !

  4. Comme le chantait Sheila: L’école est finie. Mais pourquoi donc parler de « Réforme des retraites » quand dès le plus jeune age on apprend à ne pas travailler.
    Mais enfin, quand allez vous vous réveiller, la vie n’est pas que loisir. L’oisiveté est un vice. Croyez vous que papa et maman seront toujours là pour vous nourrir, vous distribuer argent de poche et acheter tous les derniers gadgets à la mode. Lycéens, révoltez vous face à ce traitement qui vous est infligé. Demandez l’excellence, refusez la médiocrité, les séniors vous suivrons.

  5. 6 mois de vacances ça devrait faciliter le recrutement des profs, mais apparemment ce n’est pas encore suffisant.

  6. Vous n’avez rien compris. Il s’agit d’une période dans laquelle les élèves pourront étudier la théorie du genre enseignée par les associations militantes des droits LGBT ou encore subir des ateliers d’éveil à l’inclusivité animés par des drags queens transactivistes. Le tout, débarrassé des infâmes contingences de l’éducation et des notes.

  7. En plein dans la méthode « macron » racheter à très cher ce qu’il a vendu pour une bouchée de pain. Aujourd’hui, nous faisons BIO, soit des produits cultivés comme il y a 100 ans. Macron, une fois les bacheliers arrivés au niveau CM2, nous réinventera l’école d’il y a 50 ans.

  8. Et avec tout ça, on va réindustrialiser, construite une demi-douzaine de centrales nucléaires, etc.
    Non, c’est vrai, on va les acheter aux Chinois, qui grâce à nous savent.

  9. >>> On fait quoi, maintenant ? <<<
    Lorsque ce "on" concerne les enseignants, "on" fait des pancartes et des manifs, voyons !
    Cela tombe sous le sens !
    Sinon, où serait l'intérêt profond, l'intérêt réel, des élèves ?

  10. La gauche c’est Attila : là où elle passe l’herbe ne repousse pas. Ils détruisent tout ce qu’ils touchent avec une fatuité et une insolence incroyables. Et une auto satisfaction qui dépasse tout entendement sans parler de leur auto congratulation. En voulant supprimer les élites ils ont permis l’égalitarisme dans la nullité. Et encore l’élitisme n’est pas supprimé pour tout le monde car à l’exemple de N’diaye ils savent mettre leurs gosses à l’abri. L’égalitarisme c’est pour les gueux. Mais soyons honnêtes jusqu’au bout : les enseignants (je fais partie du corps enseignant) ont bien contribué à la ruine du système, la majorité étant de gauche. Et si on essaye d’aller à l’encontre du système… attention. Heureusement j’étais dans le privé et j’ai quand même réussi à enseigner du mieux que j’ai pu en appliquant a minima leurs réformes toutes plus débiles les unes que les autres.

  11. enseignant 1 an, en 2009, j’ai découvert que l’année se terminait le 1er mai : ensuite, pas une classe complète ; le progrès fait que maintenant, c’est au 1er avril…ne désespérons pas : il reste encore 7 mois depuis le 1er septembre (nota : de « mon temps », c’était le 1er octobre, 1 mois de plus, donc)

    • Oui mais le début des vacances d’été était le 14 juillet. A noter que les vacances d’été étaient synchronisées avec les récoltes et gros travaux estivaux auxquels les enfants des milieux ruraux étaient tenus de participer (et du coup, leurs parents auraient été très réticents à les envoyer à l’école).

  12. Rien , c’est la civilisation des loisirs , on s’entraine pour sa future vie professionnelle , commencer à travailler le plus tard possible , travailler le moins possible , et partir à la retraite le plus tôt possible .

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