USA : le planificateur du 11 septembre accepte la perpétuité sans procès

Capture d’écran © CBS News
Capture d’écran © CBS News

Khalid Cheikh Mohammed ne sera donc pas jugé. L'architecte des attentats du 11 septembre aux États-Unis vient d'accepter, par la voix de son avocat, de passer le restant de ses jours à Guantánamo plutôt que d'affronter un procès qui, en vertu du droit américain, pourrait lui valoir une condamnation à mort. C'est peut-être frustrant pour les familles des victimes, mais c'est une belle illustration des méandres du système judiciaire américain.

Celui que les Américains avaient surnommé KSM (en anglais, « Cheikh » s'écrit avec un S) s'était vanté d'avoir suggéré à Oussama ben Laden, dès 1996, de faire s'écraser des avions sur le sol américain. Pakistanais élevé au Koweït, un temps employé par une compagnie américaine, cet homme avait, selon les enquêteurs, l'intelligence et les capacités de planification nécessaires pour monter les attentats du 11 septembre, mais il ne disposait pas des financements. Alors, après avoir convaincu ben Laden, il l'aurait aidé à échafauder patiemment son monstrueux projet. Il aurait également été à l'origine d'une trentaine d'autres attentats, aboutis ou non, avant d'être capturé en 2003 par les Américains.

Des aveux obtenus sous la torture

Ces éléments s'écrivent au conditionnel, pour une raison simple : les aveux complets de KSM, en 2006, lui ont été arrachés sous la torture. Emmené, dès son arrestation, dans une prison secrète de la CIA en Pologne, il a par exemple été soumis à 183 simulacres de noyade en un mois. Privation de sommeil, mauvais traitements, sévices divers : rien ne lui a été épargné. Il s'agit, à coup sûr, de l'un des prisonniers les plus torturés de Guantánamo. Un rapport du Sénat américain a conclu qu'une grande partie des aveux qui lui avaient été extorqués en 2003 s'étaient avérés être complètement faux. Il voulait juste que ça s'arrête.

Par conséquent, quel crédit peuvent avoir les aveux qu'il a faits par la suite ? Que penser des racontars d'un homme brisé physiquement et moralement et qui ne voit pas d'autre porte de sortie, depuis les murs de sa cellule, que de raconter à ses bourreaux ce qu'ils ont envie d'entendre? KSM n'est certes pas un saint ; c'est même probablement un terroriste de la pire espèce. Il est sans doute, en effet, responsable de plusieurs centaines, voire de plusieurs milliers de morts. Mais on n'entend pas beaucoup de belles consciences s'émouvoir du traitement qui lui a été réservé, au mépris total du droit international, depuis 21 ans - tout comme aucun de ceux qui critiquent (à juste titre) les colonies pénitentiaires russes ne s'est ému du traitement réservé à Julian Assange, qui avait fait fuiter des documents secrets montrant notamment toute la duplicité des Américains avec leurs plus proches alliés.

Une opportune absence de procès

KSM va donc mourir en prison. Il aura le temps de réfléchir à ses crimes. Peut-être un accord a-t-il été passé sur la mise à l'abri de sa famille. Ceci expliquerait cela. Et le phare de la liberté pourra continuer à arracher des aveux dans de discutables conditions. La France s'est excusée pour beaucoup moins que ça, par la voix de Présidents transformés en serpillières de l’Histoire. L'absence de procès, cela dit, arrange peut-être tout le monde.

Arnaud Florac
Arnaud Florac
Chroniqueur à BV

Vos commentaires

34 commentaires

  1. moi je trouve qu’ils ont bien fait de le torturer…. Est ce que les terroristes se soucient des droits de l’homme ? ils s’en fichent; donc, pas besoin de les en faire bénéficier

  2. Un tiers des américains et toutes les personnes bien informées savent que le 11 septembre 2001 n’a jamais été un attentat islamiste. Pourquoi cet homme n’a pas fait l’objet d’un procès en règle devant une juridiction des USA ? La preuve que les grands médias occidentaux sont totalement sous contrôle d’une maffia.

  3. Comment en est-on encore à parler d’un « organisateur avec Ben Laden » de la destruction des tours jumelles dont il est aujourd’hui avéré que c’est un crime de l’état profond US contre ses propres citoyens pour justifier une guerre à venir.?? Je dois dire que j’ai du mal à comprendre. Déçu…

  4. Pour une fois, je ne désavouerai pas le choix des USA – de « ses décideurs de l’ombre » – de recourir à l’endroit de certains individus à des « techniques intrusives », même si leur abus entache les aveux d’un doute… Tout dépend de la « technicité de l’opérateur », dont le principal trait de caractère, outre le remisage d’empathie, sera de voir les limites de ses « clients »…
    De facto, de telles pratiques en France fuitant à dessein dans la presse, genre une crise cardiaque en cours d’interrogatoire, qui éveille des questions, auraient peut-être pour effet de calmer certaines ardeurs…

  5. Les USA…Grands défenseurs de la démocratie, pardon de leur démocratie…Je n’aime pas le général de Gaulle, mais il me semble qu’il s’en méfiait et, si c’est bien le cas, il avait bien raison. Depuis la fin du deuxième conflit mondial, les Américains, grands libérateurs du monde face aux nazis et aux Japonais, n’ont cessé de vouloir promouvoir leur vision de la démocratie. Ils auraient facilité notre éviction de l’Indochine, puis de l’Algérie, facilitant, par là, l’arrivée au pouvoir de régimes marxistes. Ils se sont embourbés dans le conflit sud-vietnamien qu’ils avaient contribué à créer. Ils ont voulu promouvoir la démocratie au proche orient et en orient et ont laissé derrière eux des pays exsangues livrés aux factions (Lybie, Syrie, Irak). Peut-être « découvrirons » nous un jour qu’ils ont facilité le sabotage des gazoducs North Stream. Je crains que leur seule volonté ne soit la suprématie du dollar dont ils ont dit que c’est leur monnaie mais notre problème. Il serait intéressant, d’ailleurs, de savoir quels contrats de reconstructions ils ont obtenus tout en nous vendant leur gaz de schiste (qui ne gêne pas nos écolos). Aujourd’hui, et depuis trop longtemps, notre cécité bien entretenue nous pousse à les considérer comme le « phare du monde » libre. Au regard du « temps long », ces gens n’ont pas d’histoire et peu d’expérience. La diplomatie et la vie de pays millénaires gagnerait à cesser de singer ces sales gamins qui, au nom de grands principes, sont capables de martyriser leurs ennemis. J’ai servi mon pays, j’ai appris que les questions et interrogatoires avaient leur légitimité mais que les lois de la guerre imposaient une retenue. Avec Guantanamo (et leurs autres centres d’interrogatoires) ils ne sont pas innocents, loin de là!

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