Le pouvoir d’achat des plus pauvres va encore baisser avec l’interdiction des promotions trop fortes !

On ne verra plus de ruées sur le Nutella® comme celles qui ont défrayé la chronique l’an dernier en provoquant des bousculades dans les Intermarché. Désormais, depuis le 1er janvier, un supermarché ou un hypermarché ne pourra proposer qu’un rabais maximal de 33 % sur ses produits alimentaires. Au mieux verra-t-on en rayon des promotions du type "2 produits achetés, 1 offert" et non plus "4 pour 2".

Cette mesure a été, paraît-il, prise pour préserver les producteurs qui sont souvent maltraités par les centrales d’achat. Ils voient leurs marges rognées et, souvent, n’y arrivent plus, car le prix de vente ne couvre plus, dans beaucoup de cas, les frais avancés. Cette situation est donc intolérable et doit être corrigée. Mais qui, pour finir, seront les perdants et les gagnants de cette nouvelle loi ? Les producteurs feront peut-être partie de la seconde catégorie, mais rien n’est moins sûr. Les centrales d’achat auront toujours les mêmes moyens de pression et, en jouant sur la concurrence, elles continueront à faire baisser les prix qu’elles payent aux producteurs. Et ceux-ci, toujours coincés, seront bien obligés d’accepter les conditions de misère qu’on leur offrira. Pour éviter de vendre à perte, ils devront « truquer » leurs comptes.

Les grands gagnants seront les hypermarchés et les supermarchés, dont les marges vont remonter en flèche grâce à ce coup de pouce providentiel de l’État. Bien sûr, ils garderont le droit de faire des rabais sur les produits non alimentaires (lessives, savon, produits ménagers, papier toilette…). Ils ne s’en priveront pas, iront jusqu’à 80 % pour communiquer et attirer les chalands, mais le volume des ventes de ces produits étant inférieur à celui de l’alimentaire, les grandes chaînes se frottent les mains. D'autant plus que, le 1er mars, entrera en vigueur une nouvelle restriction : un magasin ne pourra mettre que 25 % de ses marchandises en promotion.

Les principaux perdants seront les classes défavorisées, celles qui n’achètent que le strict minimum pour survivre sans luxe superflu. Eux chassaient les remises, qu’ils prenaient en exclusivité sans rien acquérir aux « vrais « prix. Ces 10 % de Français risquent de voir leurs dépenses croître brutalement de 5 %. Une catastrophe pour eux !

Le reste des Français payait les promotions aux magasins d’alimentation en achetant bien plus cher les produits sans remise. Il est connu que les hypermarchés sont inflationnistes. Quelques prix sacrifiés (pas trop) attirent les chalands. On augmente les marges sur la majorité des autres marchandises et le consommateur floué et hypnotisé par les promotions ne voient pas « le vol » qu’il subit. En général, les supermarchés sont moins chers que les hypermarchés ! Ces derniers sont sûrs d’attirer des clients et peuvent proposer plus de promotions que leurs concurrents plus petits, aussi font-ils fort peu d’efforts sur l’ensemble de leurs marges. Peut-être devront-ils, désormais, changer d’attitude, ce qui rétablira l’équilibre. Normalement oui, mais on verra à l’usage ce qu’il en est.

En résumé, rien ou presque ne changera pour la majorité des producteurs et pour 90 % des Français ; en revanche, les 10 % des plus pauvres, ceux dont le porte-monnaie est vide dès le 15 du mois, verront leur petit pouvoir d’achat une nouvelle fois rogné. La limitation des promotions à 33 % n’est vraiment pas une mesure sociale !

Christian de Moliner
Christian de Moliner
Professeur agrégé et écrivain

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