Le Président en pleine campagne !

macron montcornet

En un rien de temps, il troque la casquette pour la gapette, le salon pour l’agriculture, le viral pour le rural. Qu’on se le dise, le candidat Macron a revêtu ses habits de campagne. Chargé de réfléchir à l'image présidentielle, un conseiller de l'Élysée déclarait, sur Europe 1 : « On a échoué jusqu’à présent à ancrer le Président dans le terroir, alors qu’il est un provincial. Il est perçu comme faisant partie de l’élite, hors-sol. » Voilà comment, d'un tour de baguette sous le bras, notre Président mondialiste va raconter sa France.

Il y a quelques jours, le président de la République, sous les ors de l’Élysée, s’esclaffait sur YouTube au jeu des devinettes avec deux larrons en foire lui faisant la grimace. C’était cela, la France : une nation de jeunes, par les jeunes, pour les jeunes. Avec, à sa tête, un Président capable alternativement de mentir et de dire vrai, avec l’air le plus sérieux du monde. Malgré son indéniable talent, Emmanuel Macron a perdu son duel et devra poser sur son bureau les photos grotesques des deux hurluberlus, lors de son allocution du 14 Juillet.

Nouveau jour, nouveau segment pour l’hyperprésident en campagne, engagé frénétiquement dans la reconquête des marchés politiques perdus. Ni une ni deux, le voici prenant, ce mercredi, un nouvel habit. Dans une interview fleuve au magazine Zadig, le chef de l’État vise une nouvelle cible et adopte un nouveau ton. Enraciné, posé, grave. Qu’ils sont loin, tout à coup, McFly et Carlito. C’est du Barrès, c’est du Péguy. Il observe la France éternelle, s’en fait une certaine idée, ne se reconnaît pas dans sa génération, se souvient de ses racines provinciales et parcourt, en esprit, la France des terroirs et des jacqueries - le Lot, Marseille, le Nord –, incarnant la renaissance d’un pays encore habité par ses peurs médiévales. Il prend les départementales à la veille des départementales, célèbre la France régionale à la veille des régionales et porte un regard présidentiel à la veille de la présidentielle. C’est donc cela, la France, un vieux pays, de vieux, par les vieux, pour les vieux. « J’ai grandi dans les souvenirs de ma grand-mère. J’ai donc une vision de la France qui n’est pas du tout celle de ma génération, je dois bien l’avouer. Je suis comme désynchronisé. »

Mais fidèle à son fameux mantra, en même temps, le Président multiculturaliste reconnaît que « la France, c’est une volonté de chaque jour, ce n’est pas une identité figée » et évoque « la réinvention d’une civilisation ». Aux Français issus de l'immigration africaine, il déclare : « Vous êtes une chance pour notre pays. » Il déclare son amour au 93, « le département le plus jeune de France, avec deux aéroports internationaux, le plus important stade sportif français et le plus grand nombre de créations de start-up par habitant. Il ne manque que la mer pour faire la Californie… »

Il faut, pour tenir en quelques jours tous ces rôles diamétralement opposés, un grand talent de comédien. Ou de politicien. Ou avoir bénéficié, depuis son plus jeune âge, de cours du soir avec un professeur de français qui aimerait le théâtre. Reste à savoir, côté public, si l’on veut sans cesse revoir la même pièce, avec ses deux faces. Ou si l’on préfère qu’enfin tombent les masques et le rideau sur un spectacle devenu plus tragique que comique.

Iris Bridier
Iris Bridier
Journaliste à BV

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