Le professeur Delfraissy a des regrets. Et les Français ?

Delfraissy 2020-01-21 à 13.25.08

Ainsi, ce 1er août 2022, prend fin l’état d’urgence sanitaire. Certes, après quelques péripéties parlementaires, le gouvernement a réussi, avec la complicité des LR, à se garder quelques cartes en main qui lui permettront, par exemple, par simple décret, de restreindre la liberté d’aller et venir, notamment entre les outre-mer et la métropole, mais globalement, nous voici sortis de cette sinistre période où le pouvoir avait pu tester avec succès et à grande échelle le « debout-assis-couché ». Masque-pas masque, passe sanitaire qu’on n'imposerait jamais et qui, finalement, le fut, vaccin qui ne sera jamais obligatoire mais qui, dans les faits, le devint quasiment… Ils nous auront tout fait, ou presque. Il est vrai, aussi, qu’à l’époque, ils disposaient d’une Assemblée nationale aux ordres. Les choses ont un tantinet changé depuis. C’est donc l’heure des retours d’expérience, des bilans, des évaluations. Pas pour Emmanuel Macron, qui a toujours raison et qui, s’il a tort, nous fait comprendre que c’est la faute des autres.

À l’occasion de cette fin de l’état d’urgence et de la disparition du Conseil scientifique, son président, le professeur Delfraissy,a donné, samedi 30 juillet, une interview au Parisien. Reconnaissons-lui une certaine humilité face à ce phénomène qui a frappé le monde et notre pays, notamment lorsqu’il avoue : « Jamais je n’aurais cru qu’elle [la pandémie] durerait si longtemps. » Croire ne relève pas du domaine de la science, et pourta,nt le scientifique qu’est Delfraissy « n’aurait jamais cru »… Cela devrait faire réfléchir tous ces politiques et commentateurs de plateaux télé qui, pendant de longs mois, ont ramené leur science et leur rationalité, vouant aux gémonies ceux qui avaient l’outrecuidance d’émettre le moindre doute. La science, « idéal et méthode », pour Emmanuel Macron, érigée en véritable religion. Avec des décisions politiques qui étaient prises par un Conseil de défense sanitaire, dans le tabernacle du secret défense, après avis du Conseil scientifique, il semblait qu'une véritable théocratie était en train de s'imposer aux Français.

Autre déclaration particulièrement intéressante du professeur Delfraissy, évoquant les débuts de la crise en février 2020 : « On posait plein de questions simples aux Chinois avec qui on échangeait en visioconférence : "Quel masque utilisez-vous ?" "À partir de quel jour faut-il intuber les malades ?" Et ils répondaient toujours à côté ! Leur ambiguïté m’a fait penser que la crise était sûrement beaucoup plus grave que ce qu’on croyait. » Et le journaliste de demander : « Les Chinois ont donc caché la vérité ? » Réponse de Delfraissy : « À cette réunion, ils ne nous ont pas tout dit ! » À quand la réhabilitation des excommuniés pour cause de complotisme ? Car on se souviendra que, durant cette période, émettre la moindre hypothèse qui sortait de la doxa, c'était prendre le risque d'être inculpé pour « complotisme », variant du « populisme ».

Enfin, comment ne pas évoquer les regrets, sinon les remords, de Delfraissy. Un regret « profond » qui le suivra tout au long de sa vie, nous dit-il : « En juin 2020, lors du déconfinement dans les EHPAD, on a mis la santé avant tout, au détriment, peut-être, d’une forme d’humanité, ce qui a entraîné des syndromes de glissement, des personnes âgées qui se laissaient mourir d’ennui. » Le bon docteur Delfraissy oublie d’évoquer ces enfants, ces parents, ces grands-parents qui, au début de la pandémie, ont été enterrés pratiquement comme des chiens avec pour seul linceul une housse en plastique. Le très laïcard Mélenchon s’en était même ému dans un texte de belle tenue. « Aujourd’hui, le directeur de l’EHPAD note le dernier souffle et il sera le seul témoin de la mise en bière conformément à son contrat de travail… Ce monde si prompt à tout transformer en chose est parvenu au bout de ce qu’il est, au sens ultime du néant auquel il a voué la civilisation humaine et la nature qui l’entoure. » Que pensent aujourd’hui ces familles, qui ont souffert et souffrent sans doute encore dans leur chair et leur âme des décisions gouvernementales, des regrets du professeur Delfraissy ? Peut-être de la colère qui est aussi « une forme d’humanité ».

Georges Michel
Georges Michel
Editorialiste à BV, colonel (ER)

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