Le progressisme est l’ennemi du progrès
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Covid-19 oblige, les « gestes barrières » sont une formule récurrente à laquelle nous nous accoutumons, comme nous avons été habitués aux « valeurs de la République » et aux « valeurs de gauche ». Elle me paraît en passe de finir comme ces expressions chéries : un ensemble d'éléments dont on sait mal l’étendue et s'il y en a de plus importants que d’autres mais que le peuple est censé avoir bien intégrés. Les valeurs de la République sont sûrement différentes de celles de la gauche ou de celles de la France, puisque la France existait bien avant la République et que nos députés n’occupent pas que la gauche de l'Hémicycle. Pourtant, ces expressions sont si vagues qu’un non-spécialiste ne peut qu’être confondu.
Les gestes barrières deviennent aussi ésotériques. Il y a un an, masques et frontières n’étaient pas considérés comme des barrières efficaces pour protéger la population. Cela a changé avec, tout de même, en haut lieu, bien des réticences à fermer les frontières.
La distanciation sociale préconisée est chiffrée. Parfois 1 mètre, parfois 2, elle change maintenant avec le variant du virus, en attendant peut-être un ajustement à l’âge ou au type de masque ?
Durant la pénurie de masques, nous étions inondés d’informations sur leur port. C’était compliqué et, une fois posé, il ne fallait pas y toucher ou alors en changer de suite. La porte parole du gouvernement s'était elle-même déclarée incapable d’en utiliser un correctement. Depuis que chacun a des masques, silence sur leur bon emploi, il va de soi.
Je croise encore moult gens masque sous le nez voire sous le menton, façon écharpe, y compris des vieillards ainsi non protégés. Plutôt que de dénoncer autant que possible ces entorses au bon sens, les médias ont diffusé la recommandation de l’Académie de médecine de ne pas parler au téléphone dans les transports en commun. L’Académie a bien raison : si on parle fort, on postillonne davantage et le risque de contaminer les voisins est accru. Cet apport est donc un progrès. « Le progrès ne s’arrête pas. » Je pense qu’on peut déjà demander aux voyageurs, pendant deux semaines, de ne pas parler du tout durant leur trajet. Si les autorités trouvent l’essai concluant, on pérennisera cette mesure, comme le couvre feu. Ou bien, si cela ne suffit pas, on pourra l’étendre en demandant à tous de fermer la bouche et limiter ses paroles, comme les commerces, « à l’essentiel ». Mais nos autorités n’écriront, bien sûr, jamais que le peuple doit fermer sa gueule.
Le virus se transmet beaucoup par les mains. Elles prennent le virus, tombé par exemple sur un Caddie™ de supermarché ou une barre de métro, et l’inoculent en le portant au nez ou à la bouche. La désinfection des mains paraît un excellent moyen d’éviter la transmission. Mais voyez-vous grand monde se désinfectant les mains en entrant dans les supermarchés ou le métro pour réduire le risque de contaminer les autres ? Souvent, quand il y en a un, le distributeur de gel hydroalcoolique est vide, cassé ou peu ragoûtant.
Ces gestes barrières sont contraignants et on entend que l’épidémie progresse malgré leur instauration. On comprend donc que les Français soient démotivés et que 64 % souhaitent un reconfinement.
L’avertissement diffusé par Voltaire, « le mieux est l’ennemi du bien », est piétiné. Les autorités prônent le mieux, perfectionner toujours les gestes barrières, mais, en réalité, oublient le bien car les gestes les plus basiques - bon port du masque, et surtout désinfection systématique des mains -, ne sont pas sous contrôle.
Ce proverbe ne signifie pas qu’il ne faut rien changer mais qu’il faut s’efforcer de bien faire ce qu’on fait. Cet effort est délaissé partout. Contre la criminalité croissante, par exemple, au lieu d’abord de bien appliquer les sanctions prévues, certains ont l’idée première de les changer. Nous sommes, ainsi, dans une fuite en avant perpétuelle qui ne peut rien résoudre. Ne confondons pas progressisme, idéologie et progrès, véritable avancée vers le Bien. Le progressisme est l’ennemi du progrès.
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