Le variant indien, absent de France selon Véran, mardi, est arrivé jeudi chez moi, à Villeneuve-sur-Lot : aucun souci, dit l’ARS !

sortie aéroport

Ah, ce variant indien ! Il était arrivé en Suisse, en Belgique, partout en Europe, sauf en France. Il avait traversé la France en wagon plombé, comme Lénine, bien sagement. Car en France, Jean Castex nous l'a bien dit, il y a trois jours : les variants régressent. Et Olivier Véran l'a certifié : pas de variant indien en France ! Et grâce au plan de déconfinement parfaitement calibré de notre épidémiologiste de l'Élysée, le nombre de patients en réa baisse. L'heure est à la confiance, à l'optimisme.

Et puis voilà que l'on apprend, jeudi soir, que le variant indien a été repéré à… Villeneuve-sur-Lot, chez moi. Pas Marseille et ses bateaux venus du large. Pas Roissy. Non, ma sous-préfecture perdue, sans gare, sans autoroute. Mais comment est-ce possible ? Un couple de trentenaires de retour d'un voyage en Inde en mars…

Et là, je m'interroge : cela fait des semaines que je n'ai pas le droit de dépasser 10 kilomètres autour de Villeneuve-sur-Lot pour aller voir ma mère à 12km, mon cousin à 13, faire de la randonnée à 10,5. J'ai arpenté tous les chemins, visité tous les villages dans mon périmètre autorisé mais hop ! des Villeneuvois (ou des Indiens, peu importe) globe-trotterrisent tranquillou en Inde, en reviennent tout aussi tranquillou alors que la situation que l'on nous montre de l'Inde n'est pas née d'hier et qu'en mars, le variant devait déjà bien galoper ? Et l'Inde n'a été ajoutée à la liste noire des pays dangereux que le ... 24 avril ?! Et selon Rozenn Le Saint, dans son article de Mediapart intitulé "Des mesures trop tardives pour remonter aux sources du variant indien en France" , "Un afflux massif d’Indiens a été observé début avril, d’où une forte suspicion de présence du variant indien bien avant en France. Le retard à l’allumage est le principal trou dans la raquette de cette traque."

Au cas où vous seriez inquiets, un commando d'optimistes a été envoyé au front.

D'abord, le directeur de l'ARS Nouvelle-Aquitaine interviewé sur la chaîne TV7 et dans Sud-OuestMoi, je ne m'inquiète pas. » Et de détailler les procédures, les quarantaines, les tests. De multiplier, aussi, les messages : «Pas de cluster en cours », « Jusqu'ici tout va bien », « On contrôle la situation». Limite comique. Humour décalé. Un peu rétro : Buzyn 2019.

Ensuite, les épidémiologistes européens, notre Conseil scientifique en tête, viennent nous faire une piqûre anti-anxiété : « Face à ces inconnues [du variant indien], nombre de spécialistes mettent en garde contre les présentations trop anxiogènes du variant indien », rapporte Sud-Ouest. Même l'épidémiologiste qui conseille le gouvernement allemand, le virologue Christian Drosten, est mis à contribution, cité par le même journal : « Pour le moment, j’ai tendance à penser que le traitement qu’en font les médias est exagéré. »

Nouvel épisode de cette douche écossaise permanente à laquelle nous sommes soumis.

Donc, les milliers de morts de l'Inde, les cadavres brûlés sur les parkings, la pénurie d'oxygène, etc. : oubliez ! Ne regardez plus ! L'aide d'urgence qui afflue du monde entier ? Vous avez rêvé. Et puis quoi, les chiffres, les proportions, vous ne saviez donc pas que l'Inde, c'est 1,3 milliard de Terriens ? Donc 300.000 nouveaux cas, 5.000 morts, une pichenette. Arrêtez d'anxiogéner.

Libération est allé « fact-checker » ce discours relativisant et rassurant et confirme ce dont vous vous doutiez : « Ce raisonnement occulte un aspect fondamental du problème : l’importante – voire probablement très importante – sous-estimation du nombre des cas de Covid en Inde. » Les chiffres qui nous sont donnés ne sont que la partie émergée de l'iceberg. Libé enquête ensuite sur l'évaluation du coefficient multiplicateur à appliquer : « Un nombre de cas sous-estimé d’un facteur 2, 8, 20 ou 50 ? » Conclusion : « Il existe un consensus quant à une très forte sous-estimation des cas en Inde. »

Mais bon, en France, tout est sous contrôle : 5 cas. Rendons justice à Benoît Elleboode, notre directeur d'ARS : « Dans cette crise, toute vérité d'un jour peut être contredite le lendemain. »

Dans les ARS, on a l'art d'assurer ses lendemains.

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