Le Vol de l’aigle : 1er mars 1815, Napoléon débarque en France

napoléon golfe-juan

Le 1er mars 1815, il y a tout juste 210 ans, Napoléon posait le pied sur la plage de Golfe-Juan près d'Antibes, retrouvant ainsi le sol de France qu’il n’avait pas foulé depuis plus de dix mois, après son abdication et son exil sur l'île d'Elbe. Le 26 février, alors que l’Europe pensait en avoir fini avec lui, il avait embarqué sur L'Inconstant, escorté par six autre bateaux. L’Empereur déchu avait préparé en secret son retour. Cette évasion audacieuse allait marquer le début des Cent-Jours et bouleverser, une fois de plus, le destin du Vieux Continent. L’Aigle reprenait son envol.

 

La vie à l’île d’Elbe

Après sa défaite en 1814, les monarchies coalisées accordèrent à Napoléon la souveraineté de l’île d’Elbe, un modeste territoire de 224 km2 situé au large de la Toscane, en pleine Méditerranée. Malgré l’exiguïté de son nouveau royaume, l’Empereur ne demeura pas inactif : il organisa une cour autour de sa personne, renforça l’administration locale, développa les infrastructures et s’efforça de maintenir une armée de quelques centaines d’hommes. Mais très vite, il comprit que son règne serait éphémère.

Pendant ce temps, en France, le roi Louis XVIII était impopulaire et son autorité restait fragile. La France demeurait sous occupation étrangère, une partie de l’administration napoléonienne avait été maintenue et les soldats de la Grande Armée, humiliés, n’acceptaient pas leur défaite. Certains craignaient également que les Bourbons ne tentent de restaurer l’Ancien Régime et ses privilèges. Quant aux monarchies coalisées, absorbées par le congrès de Vienne, elles considéraient le cas Napoléon comme réglé et s’affairaient à redessiner la carte de l’Europe pour préserver l’équilibre des puissances. Voyant une chance dans ce contexte, Napoléon décida que l’heure de son retour avait sonné.

 

La fuite audacieuse du 26 février

L’Empereur précipita son départ lorsqu’il apprit que les pensions destinées à financer son petit royaume ne lui étaient plus versées, que son épouse ainsi que l’Aiglon ne le rejoindraient jamais et que des rumeurs faisaient état d’un possible transfert vers une île plus éloignée, peut-être dans le sud de l’Atlantique.

Bravant alors les risques, il embarqua le soir du 26 février 1815 à bord de sept petits navires avec 1.100 hommes.

L’Inconstant fut peint aux couleurs de la marine marchande pour éviter d’attirer l’attention. En effet, l’entreprise était périlleuse : la flotte anglaise croisait en Méditerranée et une interception aurait signifié sa capture, voire sa mort. Fort heureusement, Napoléon navigua sous de bonnes étoiles et aucun navire ennemi ne réussit à l’intercepter.

 

Le débarquement à Golfe-Juan

Après le débarquement à Golfe-Juan, pour remonter vers Paris, plutôt que de risquer une confrontation dans une Provence plutôt royaliste, Napoléon choisit une route plus sûre : la traversée des Alpes.

Afin de rallier ses anciens soldats et le peuple français, il fit distribuer un manifeste annonçant sa victoire future :

« Venez vous ranger sous les drapeaux de votre Chef. Son existence ne se compose que de la vôtre, ses droits ne sont que ceux du peuple et les vôtres ; son intérêt, son honneur et sa gloire ne sont autres que votre intérêt, votre honneur et votre gloire. La Victoire marchera au pas de charge, l’Aigle, avec les couleurs nationales, volera de clocher en clocher jusqu’aux tours de Notre-Dame. Alors, vous pourrez vous vanter de ce que vous aurez fait : vous serez les libérateurs de la Patrie ! »

 

La rencontre décisive avec le maréchal Ney

À Paris, la nouvelle du retour de Napoléon provoqua une véritable onde de choc. Louis XVIII ordonna alors au maréchal Ney, héros de l’Empire rallié aux Bourbons, de l’arrêter. Ney, sûr de lui, assura au roi qu’il ramènerait l’Empereur « dans une cage de fer ».

Pendant ce temps, l’Aigle poursuivait sa route. Le 7 mars, près de Laffrey, au sud de Grenoble, il fit face au 5e régiment d’infanterie, envoyé pour lui barrer la route. Napoléon, fidèle à son souhait d’éviter toute effusion de sang, s’avança seul et sans arme vers les soldats, qui pointaient leurs fusils sur lui. Ouvrant sa redingote, il leur lança avec défi : « Soldats du 5e, je suis votre empereur. Reconnaissez-moi ! S'il est parmi vous un soldat qui veuille tuer son empereur, me voilà ! »

Un silence pesant s’installa. Puis, soudain, un cri jaillit : « Vive l’Empereur ! » Les soldats, abandonnant leurs fusils, se précipitèrent vers Napoléon pour l’acclamer. Quelques jours plus tard, Ney, confronté à la même ferveur, déclara qu’on « ne peut pas arrêter l’eau de la mer avec les mains » et se rallia à son tour à l’Empereur. Désormais sûr de lui, Napoléon comprit que plus rien ne pouvait l’arrêter. Le vol de l’Aigle pouvait continuer jusqu’à Paris, où il arriva le 20 mars. Ainsi, il avait reconquis son trône ainsi que son peuple en vingt jours et sans que la moindre goutte de sang ne soit versée. Commençaient alors les Cent-Jours...

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Eric de Mascureau
Chroniqueur à BV, licence d'histoire-patrimoine, master d'histoire de l'art

Vos commentaires

Un commentaire

  1. Je suis fière d’avoir appartenu au Régiment de Navarre qui a été le premier a rallier l’Empereur , l’un des seul régiment (aujourd’hui dissous ) a n’avoir jamais eu sont drapeau pris par l’ennemi depuis sa création en 1558 , dissous en 1997.

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