L’enfant surdoué s’apprêtait à servir Daech…

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Un adolescent de 17 ans a été arrêté par la DGSI, le 12 juillet dernier. Inscrit dans une prestigieuse classe préparatoire aux grandes écoles, il ambitionnait tout à la fois de réussir le concours de l'ESCP, l'une des « trois parisiennes », c'est-à-dire l'une des meilleures écoles de commerce de France, et de partir combattre en Syrie. Particulièrement brillant, ce jeune homme surdoué avait été victime de harcèlement scolaire, puis, au contact d'un professeur particulier de mathématiques, s'était converti à l'islam à 13 ans. La suite est plus classique : radicalisation rapide, idéalisme sanguinaire, rencontre d'une jeune fille sur les réseaux sociaux, proposition de mariage en ligne... jusqu'à l'arrestation de ladite jeune fille, qui aura finalement permis de remonter jusqu'à lui. Y., c'est l'initiale de son prénom (nous apprend Le Parisien), envisageait de proposer ses services à l'État islamique - Daech, pour l'Occident - notamment en termes de connaissances financières et de gestion des cryptomonnaies.
Que retenir de cet invraisemblable gâchis ? Plusieurs choses, sur plusieurs plans. D'abord, qu'il ne fait pas bon être trop intelligent au pays des Lumières. Le harcèlement scolaire a probablement commencé chez nous le jour où le mot « intello » est devenu une insulte. Tout le monde aimant désormais l'argent et la réussite visible, la haine de classe s'est vraisemblablement déplacée vers le savoir. Ceux qui lisent sont des salauds. Logiquement, tant de haine pousse parfois à la radicalité. C'est la fameuse remarque du rappeur Akhenaton à Michel Houellebecq : pour ne pas aimer l'islam, il faut s'être fait voler son goûter par un musulman. Même chose en sens inverse, semble-t-il.
Au-delà de la bêtise triomphante du système scolaire à la française, que le monde entier nous envie, il y a l'inadaptation des enfants dits « à haut potentiel intellectuel » (HPI). Ce don, qui est en fait une malédiction, fait réfléchir différemment et beaucoup plus vite, mais rend également inadapté à la vie quotidienne. Ces enfants ont besoin, non pas de classes spécialisées ou d'une mise à l'écart, mais d'apprendre, dans la douleur du monde extérieur ou entourés d'amour familial, l'intelligence sociale et l'intérêt pour les petites choses dont ils manquent cruellement. Perpétuellement inemployés à leur juste valeur, ils se tourneront, quoi qu'il arrive, vers des choix extrêmes, mais cela peut être pour le meilleur comme pour le pire. Beaucoup de surdoués finissent dans des métiers grisâtres qui les rendent malheureux, mais sait-on, par exemple, qu'un pourcentage très important de HPI, sans distinction de nationalité, se retrouvent dans les unités dites « spéciales » des armées... et dans le crime organisé ? Ces enfants, à la fois brillantissimes et peu scolaires, cherchent des terrains à leur démesure.
Ce qui nous amène à la troisième leçon de ce fait divers, la plus importante, la seule importante peut-être. Y a-t-il, dans notre monde occidental dépressif, triste et laid, quelque chose de grand, de démesuré, qui vaille la peine de vivre et de mourir ? Au-delà du cas emblématique de ce jeune homme surdoué à la dérive, toute une jeunesse désœuvrée, qui cherche un idéal et se cogne contre des murs de médiocrité, fut hier tentée par le terrorisme d'extrême gauche, l'est aujourd'hui par l'activisme climatique, l'antifascisme d'opérette ou la radicalisation islamique. Qui redonnera à ceux qui, qu'on le veuille ou non, sont notre relève le goût de l'engagement total, de la mobilisation individuelle sans condition et même - osons le mot - d'un certain fanatisme ?

La réponse est évidemment individuelle. Elle part d'une autoformation au Bien et au Vrai, mais comment les discerner sans instruction, sans éducation, sans morale ? La question est abyssale. Souvenons-nous, en tous les cas, de cette phrase magnifique d'Ernst Jünger, dans Le Travailleur (1932) : « Ce qui importe n'est pas que nous vivions, mais qu'il redevienne possible de mener dans le monde une vie de grand style et selon de grands critères. On y parvient en aiguisant ses exigences. » Aiguisons donc nos exigences, pendant que l'État islamique aiguise ses couteaux. C'est le moindre des contrepoisons.

Arnaud Florac
Arnaud Florac
Chroniqueur à BV

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