L’ennemi de longue date d’Israël, Yahya Sinouar, nommé chef du Hamas à Gaza

Capture d’écran © EuroNews
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Une semaine après l’assassinat, à Téhéran, du chef du Hamas gazaoui Ismaïl Haniyeh, commandité par Israël, Yahya Sinouar est l’homme qui vient d’être désigné, mardi 6 août, par le mouvement islamique palestinien pour lui succéder. Cette nomination, « symbolique » selon Régis Le Sommier qu'a interrogé BV, et survenant dix mois après le début de la guerre asymétrique menée entre Israël et le Hamas, se veut « un message fort » adressé à « l’intransigeance » du gouvernement de Benyamin Netanyahou, souligne le journaliste et grand reporter. Une nomination « logique » et « attendue », estime quant à lui le Fatah du président palestinien Mahmoud Abbas, et soutenue par le Hezbollah, en guerre avec Israël au Sud-Liban.

Pour le ministre des Affaires étrangères israélien Israël Katz, l’« archi-terroriste » du Hamas à Gaza est une tête à « éliminer rapidement », tout comme son prédécesseur.

Un vétéran du mouvement islamiste palestinien gazaoui

Yahya Sinouar naît en 1962 dans le camp de refugiés de Khan Younès, situé au sud de la bande de Gaza. Enfant de la Nakba, issu d’une famille d’Arabes de Palestine ayant fui au lendemain de la création d’Israël en 1948, il étudie la littérature arabe à l’université islamique de Gaza, où il côtoie d’autres militants de la cause palestinienne sous l’influence d’Ahmed Yassine, cheikh charismatique qui fut l’un des fondateurs du Hamas (créé en 1987), alors qu’éclate la première Intifada entre Palestiniens des territoires occupés et l’État d’Israël. Yahya Sinouar cofonde alors la milice de renseignement Al-Madj, chargée d’éliminer les Palestiniens collaborant avec l’occupant israélien. Al-Madj deviendra le service de sécurité puis la branche militaire du Hamas.

En 1989, il est arrêté par le Shin Bet (service de renseignement intérieur israélien) et est emprisonné à Beer-Sheeva, au sud d’Israël. Captif pendant près de vingt-deux ans, de 1989 à 2011, il reprendra le combat au sein du Hamas, à Gaza, après avoir été libéré dans le cadre d’un échange de prisonniers entre l’État hébreu et le Hamas. Déclaré « terroriste international » en 2015 par le département d’État américain, il appelle les brigades d'Izz al-Din al-Quassam (branche armée du Hamas) à perpétuer les enlèvements de soldats israéliens afin d’obtenir d’autres libérations de prisonniers palestiniens.

Élu en 2017 à la tête du bureau politique du Hamas dans la bande de Gaza, tandis que son frère cadet, Mohammed Sinouar, est élu à la tête du Hamas à Khan Younès, Yahya Sinouar est l’un des cerveaux du 7 octobre. Depuis l’opération terroriste « Déluge d’Al-Aqsa », qui a déclenché la riposte sanglante d’Israël, Yahya Sinouar est un homme à abattre, « un mort en sursis ». « Nous trouverons Sinouar et nous l’éliminerons ! », promettait, en novembre dernier, le ministre de la Défense israélien Yoav Gallant. Au lendemain de l’attaque terroriste du 7 octobre, Yahya Sinouar exigeait de l'État hébreu la libération de « tous les prisonniers » palestiniens incarcérés.

Un chef charismatique, pragmatique et radical

Yahya Sinouar est d'abord un homme de l’ombre, passé maître dans l’art des actions souterraines. Réputé pour être un homme ascète, discipliné et imperturbable. Yaron Blum, ancien haut responsable du Shin Bet, le décrit comme un chef « charismatique, [incorruptible], modeste et […] qui prône l’action ». Partisan intransigeant de la ligne dure, Yahya Sinouar, surnommé « le boucher de Khan Younès » pour avoir exécuté de sang-froid douze Palestiniens pour intelligence avec l’ennemi lors de la première Intifada, rejette toute réconciliation avec Israël. Il promeut une stratégie « radicale sur le plan militaire (afin d’amener les autorités israéliennes sur la table des négociations) et pragmatique sur le plan politique (afin de mener à bien la réconciliation inter-palestinienne) », selon Leïla Seurat, chercheuse au Centre arabe de recherches et d’études politiques (CAREP) à Paris.

Pour Régis Le Sommier, cependant, sa nomination n’apportera pas de véritable changement, puisque l’homme, discret mais très actif, était déjà au cœur des négociations qui se déroulaient à Doha par personnes interposées, et ce, bien avant le 7 octobre. Un propos corroboré par le secrétaire d’État américain, Anthony Blinken, qui déclarait, ce 6 août, qu’Yahya Sinouar « a été et demeure le premier décisionnaire » et que « c’est à lui [qu’il revient désormais] de décider » d’une trêve à Gaza.

Yahya Sinouar entend surtout « préserver la survie politique du Hamas », souligne Régis Le Sommier auprès de BV. Un objectif qu’il compte poursuivre grâce au « zèle » du Hamas (« Hamas » signifie « zèle », en arabe) qui s’est arrogé la défense de la cause palestinienne, essentiellement par la violence.

Yahya Sinouar avait également « fait savoir qu’il punirait quiconque tenterait d’entraver [la] réconciliation< » entre le Hamas (bande de Gaza) et le Fatah (Cisjordanie), relève l'European Council on Foreign Relations. Minées par les dissensions et les rivalités de pouvoir, les deux autorités palestiniennes avaient jusqu’alors échoué à officialiser leur entente, à la faveur d’Israël. Son ambition : l’intégration des trois territoires palestiniens occupés par l’État hébreu sous une direction palestinienne unie (bande de Gaza placée sous l’autorité du Hamas, Cisjordanie sous l’administration du Fatah de Mahmoud Abbas et Jérusalem-Est).

Cet article a été mis à jour pour la dernière fois le 10/08/2024 à 12:29.
Anna Morel
Anna Morel
Journaliste stagiaire. Master en relations internationales.

Vos commentaires

21 commentaires

  1. Et ben, c’est bien plus rapide de trouver un nouveau chef du Hamas en Palestine, que de dénicher un chef de gouvernement en France ! Pourvu que Macron n’aille pas s’inspirer de ces terroristes !

  2. Les « Chefs » du Hamas se succèdent au rythme d’un « fauchage  » régulier par les Israéliens
    Netanyahou, lui, survit à tous les régimes et, est conforté dans son impunité , il maintien sa trajectoire!! tel un Trump-Bis !!!!

    • Vive ce Trump bis qui ne regarde pas les tragédies que vit son pays par la lorgnette en se cachant l’autre œil. Quand on est attaqué par des barbares, il faudrait se cacher dans quel trou ?

      • Depuis le 7eme siècle nous nous faisons attaquer et c’est par là force qu’on a toujours répondu, Poitiers 732 , les croisades les guerres contre les Ottomans puis contre les pirates barbares ce qui a abouti à la conquête de l’Algérie, ils n’ont que ça en tête nous envahir et nous dominer, donc la solution c’est la même depuis toujours, ce que fait Israël et ce que l’on va être obligé de faire chez nous, genre St Barthélémy du 21 ème siècle et l’utilisation des armes modernes pour calmer les pays belligérants comme l’on fait les américains envers les japonais pendant la 2eme guerre mondiale, ce qui les a définitivement calmés.

  3. Décidément, on en arrête un et la relève est assurée, sans aucun problème. N’est-ce pas plus qu’inquiétant ? Et c’est ça qui dirige la Palestine et règle la vie des Palestiniens ?

  4. Terrible pour les otages..mais quand kes israéliens en attrapent un ..comme celui là il faudrait le neutraliser immédiatement pour s’il ne puisse plus être  » echange » et retrouvé de nouveau sur le front…

  5. Les déclarations de ces personnages semblent plutôt inhumaines et propre à embraser la planète alors nous devons tous soutenir l’Israël par tout nos propres moyens, un pays ou toutes les violences barbares, c’est peut dire, ont commencées le 7 Octobre.

  6. Ils sont tous les ennemis d’Israël . Soutient aux juifs et ne riez pas , après eux ce sera nous .

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