L’enseignement de l’arabe à l’école : une bonne ou une mauvaise idée ?

livre arabe

Les enseignements de langue et culture d'origine (ELCO) seront supprimés à la rentrée 2021. Emmanuel Macron s'y est engagé ! Se fondant sur une directive européenne du 25 juillet 1977 visant à la scolarisation des enfants de travailleurs immigrés (pour faciliter leur retour dans leur pays d'origine...), ces enseignements sont soupçonnés de favoriser le communautarisme. Dont acte. Mais pourquoi avoir attendu si longtemps pour les supprimer, alors qu'ils échappent à un contrôle sérieux de l'État ? N'y aurait-il pas anguille sous roche ? Mieux vaut tard que jamais, diront les plus optimistes. En échange, on proposerait aux élèves l'enseignement de l'arabe, au même titre que d'autres langues étrangères : une bonne ou une mauvaise idée ?

Le Rassemblement national s'indigne – ainsi que Les Républicains, qui ne veulent pas rester à la traîne sur ce terrain sensible. Pour analyser cette question sans céder à la passion ni aux a priori, examinons, le plus objectivement possible, les arguments qui justifient ou infirment l'introduction de cet enseignement à l'école.

Jean-Michel Blanquer, invité de « BFM Politique », ce dimanche, a bien résumé la question en déclarant : « Nous avons besoin de jeunes Français qui parlent aussi l’arabe, pour nos relations avec les pays dont c’est la langue, pour le commerce, pour conquérir les marchés, pour notre influence dans cette partie du monde. » Il a également souligné qu'ils doivent le faire « dans l'école de la République » et non « dans des écoles coraniques ou toute sorte de structures dont l'objectif principal n'est pas linguistique, mais religieux ».

Constant dans cette opinion, il est sans doute plus crédible que d'anciens socialistes qui sont restés muets sous le mandat de François Hollande. Force est de constater, si l'on compare le nombre d'élèves choisissant l'option arabe au baccalauréat et le nombre d'élèves suivant des cours d'arabe en collège ou en lycée, qu'une grande partie d'entre eux apprend cette langue en dehors de l'Éducation nationale, dans des structures influencées par les islamistes. L'argument de Jean-Michel Blanquer est donc fondé. Considérer l'arabe comme les autres langues, avoir recours à des professeurs certifiés ou agrégés peut contribuer à réduire l'impact idéologique de cet enseignement.

Il reste que, s'il se fait dès l'école primaire, Steeve Briois, le maire RN d'Hénin-Beaumont, a raison d'objecter que « les élèves ne savent plus parler ni écrire correctement notre langue, le français », et que c'est cet enseignement qu'il faut privilégier. Quant au second degré, dans les collèges et lycées, pour assurer une instruction solide et impartiale de la langue arabe, encore faudrait-il que le ministère recrutât des personnels compétents. Ce n'est pas en offrant, en 2020, 4 postes à l'agrégation d'arabe, 6 au CAPES et 3 au CAFEP (enseignement privé sous contrat) qu'il y arrivera ! Rien ne permet de dire, en outre, que les familles musulmanes qui confient leurs enfants à des structures externes, noyautées par des islamistes, ne continueraient pas de le faire même si l'offre publique s'élargissait.

Faut-il s'étonner, dans ces conditions, que beaucoup mettent en doute la bonne foi d'Emmanuel Macron ? Ne s'agit-il pas de déclarations opportunistes, d'une communication politique qui ne sera pas suivie d'effet ? Il ne suffit pas, en effet, de dénoncer le séparatisme islamiste : il faut, par des actes, mettre à l'écart tous ceux qui, sous prétexte d'enseigner l'arabe, visent à endoctriner de jeunes élèves. C'est à ce prix que la langue arabe pourrait retrouver ses lettres de noblesse.

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Philippe Kerlouan
Chroniqueur à BV, écrivain, professeur en retraite

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