L’épineuse question des places en réanimation
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« Il ne suffit pas d’acheter des lits chez Ikea pour ouvrir des places en réanimation », déclarait Jean Castex à Ouest-France. Une « petite phrase » comme on les nomme dans le jargon journalistique, le genre d’expression dont il vaut mieux s’abstenir si on ne veut pas renvoyer l’impression de prendre ses administrés de haut. Ce genre de sortie peut énerver ou démotiver ses troupes, surtout en temps de crise. Olfa Hamzaoui, médecin-réanimateur au CHU Antoine-Béclère, à Clamart, a ainsi vivement réagi sur le plateau de BFM TV : « Ce n'est pas qu'un problème de lit, mais c'est surtout un problème de ressources humaines, de personnel qualifié comme des médecins ou des infirmiers. C'est le gros problème de la restructuration de nos services de réanimation. » Alors, certes, il faut du temps pour former du personnel compétent, mais « nos revendications remontent à une dizaine d'années pour dire qu'on n'est pas bien dotés de lit de réanimation par rapport à la population en France », tacle-t-elle.
Face à la saturation hospitalière de l’année dernière, le gouvernement a été pris de court. Personne ne connaissait l’ampleur du virus et il fallait improviser. Mais un an plus tard, tandis que se pose à nouveau la question du manque de lits à l’hôpital, la situation n’est plus imprévisible, loin de là. Nous citions déjà, la veille, le Dr Prudhomme, déplorant « moins de 1.200 lits de réanimation en Île-de-France pour l’une des premières métropoles mondiales et 12 millions d’habitants… »
Selon l’AFP, il y a environ 1.150 lits de réanimation ouverts en Île-de-France, en temps normal. Au printemps 2020, au plus fort de la crise, ce nombre avait été porté à 2.700 environ, mais au prix d’une déprogrammation de 80 % des autres opérations. « Avec le confinement très strict, on n’avait plus de polytraumatisés. La chirurgie s’était aussi effondrée : des malades, pourtant graves, avaient peur de venir à l’hôpital. Cette fois, il y a vraie compétition entre les Covid et non-Covid. Ce qui pose vraiment problème pour déprogrammer », souligne le Dr Constantin, chef de service anesthésie-réanimation à la Pitié-Salpêtrière, dans La Croix.
Si un réaménagement est en cours pour libérer des lits de réanimation Covid en Île-de-France, il est de moindre ampleur puisque « l'ARS a ainsi donné "l'ordre ferme" aux hôpitaux et cliniques franciliens de déprogrammer 40 % de leurs activités », indique l’AFP. Même si la baisse du nombre de lits hospitaliers en France est bien réelle (environ 100.000 suppressions de lits depuis vingt ans), contrairement aux rumeurs qui circulent (et notamment l’interprétation erronée d’un papier du Canard enchaîné), il n’y a pas eu 800 lits de réanimation fermés en un an en Île-de-France.
En revanche, la Cour des comptes vient de publier son rapport annuel. Si elle rappelle que les hôpitaux ont pu tenir au prix d'une improvisation organisationnelle et de déprogrammations massives, la situation n'est pas tenable. Le rapport met en lumière les carences du secteur de la réanimation et s’inquiète des conséquences des déprogrammations : « L'impact à long terme en matière de santé publique des déprogrammations intervenues durant l’épidémie de Covid-19 reste aujourd'hui inconnu et potentiellement considérable : son étude est indispensable et devra être engagée. »
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