Les dessous du projet de « Grande Sécu »
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À peu de mois de la présidentielle, voici qu’ Olivier Véran, ancien élu PS passé ministre de la Santé de Macron, agite l’idée d’une (encore un peu plus) « grande Sécu », censée simplifier le système actuel, et un petit survol historique s’impose pour comprendre comment nous en sommes arrivés là.
Après la guerre, l’assurance maladie fut assise sur les cotisations des travailleurs et des entreprises, et gérée paritairement par les syndicats et les employeurs. La part non remboursée par l’assurance maladie (un tiers environ, appelé ticket modérateur) pouvait l’être par des mutuelles, aux offres et tarifs variables, auxquelles on cotisait volontairement.
Devant le déficit structurel et croissant du système, Rocard créa la CSG, qui élargit le financement par un prélèvement sur l’ensemble des revenus, ôtant ainsi une bonne partie de son sens à la gestion paritaire.
Ce que le « plan Juppé » finalisera cinq ans plus tard par un hold-up étatique de l’assurance maladie en 1996 : c’est le gouvernement qui nomme le patron d’une CNAM désormais soumise aux commandements incessants de l’État.
Mais il ne laisse pour autant pas les mutuelles en repos, puisque progressivement, il va les rendre non seulement obligatoires pour toutes les entreprises, mais aussi « solidaires » et « responsables », interdisant les questionnaires de santé, imposant de toujours laisser un reste à charge, etc., pour ne leur laisser comme argument concurrentiel que la prise en charge des chambres particulières, de la patamédecine des dingothérapeutes (et peut-être, demain, des astrologues), mais surtout le volume de leur communication publicitaire. Une part non négligeable de leurs frais de gestion, qu’un monopole d’État - qui peut, lui, en faire l’économie - ne manque jamais de lui reprocher…
Notons que si les salariés bénéficient d’une mutuelle d’entreprise peu chère grâce à la mutualisation des risques et avec de bons niveaux de remboursement, les retraités sont contraints de souscrire un contrat individuel souvent plus coûteux, et les chômeurs doivent souvent renoncer à une complémentaire au-dessus de leurs moyens.
À ce manque d’équité s’ajoute un système de remboursement à double détente dont la simplification est, pour Véran, une justification supplémentaire commode pour une mainmise totale de l’État, modèle NHS britannique, qui est le rêve secret de tout bon socialiste. Et qui conduirait tout droit à la mort du peu qu’il reste de la médecine libérale.
Mais les Français sont « si attachés à leur système de protection sociale » que la liberté d’assurance dans le domaine de la maladie - qui fonctionne fort bien dans nombres de pays comparables - n’est jamais envisagée par personne. Et encore moins une lutte sérieuse contre la fraude sociale, dont le caractère systémique révélé par le magistrat Charles Prats vaut aujourd’hui à ce dernier des poursuites disciplinaires…
Parce qu’il va falloir en trouver, des sous, pour mettre en œuvre la « Grande Sécu » (au cours d’un second quinquennat, bien sûr) : d’après le Haut Conseil pour l’avenir de l’assurance maladie, ce serait 22 milliards d’euros de dépenses publiques supplémentaires, les spécialistes se renvoyant déjà la balle pour savoir où les trouver, tandis que chacun sent bien qui sera le payeur final !
Nous en sommes exactement au point lumineusement prévu par Frédéric Bastiat, il y a 170 ans, celui de la mainmise de l’État sur les « sociétés de secours mutuel » : « Ils n'admettront pas pour elles l'impossibilité de payer, et ne seront jamais contents des répartitions. L'État se verra contraint de demander sans cesse des subventions au budget. Là, rencontrant l'opposition des commissions de finances, il se trouvera engagé dans des difficultés inextricables. Les abus iront toujours croissants et on en recalculera le redressement d'année en année, comme c'est l'usage, jusqu'à ce que vienne le jour d'une explosion. Mais alors, on s'apercevra qu'on est réduit à compter avec une population qui ne sait plus agir par elle-même, qui attend tout d'un ministre ou d'un préfet, même la subsistance, et dont les idées sont perverties au point d'avoir perdu jusqu'à la notion du Droit, de la Propriété, de la Liberté et de la Justice. »
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