Les employés de la Banque de France sauvent en partie leur régime de retraite : explications

Selon le magazine Capital, les employés de la Banque de France viennent d’obtenir le maintien de leur caisse de retraite spécifique, la CRE, qui ne sera incluse qu’en partie dans la réforme à venir : la CRE dépend de la Banque de France. Elle est financée par les cotisations des employés (11,1 % des salaires depuis 2007, contre 16 % pour les fonctionnaires). Néanmoins, la Banque de France complète ce qui manque dans les caisses de la CRE pour assurer les pensions de ses 17.000 retraités et se charge de gérer les 14 milliards de réserve de ce fonds de pension spécifique (soit 50.000 euros par employé ancien ou actuel de la Banque de France, qui sont au total 27.000).

Ce financement du régime de retraite pèse de plus en plus dans les comptes de la Banque de France. Cette branche connaît, en effet, un taux catastrophique de 0,58 actif par retraité, contre 1,7 actif par retraité dans le reste de la France. Le salaire moyen des employés de la Banque de France étant de 33.000 euros par an, les seules cotisations des actifs ne permettraient de verser environ que 2.500 euros annuels par retraité. Les employés ont consenti de gros efforts depuis 2009 : ils ont renoncé à une surprime de 14 % qui leur était versée, le nombre de trimestres de cotisation nécessaires pour obtenir une pension complète est monté, progressivement, de 150 trimestres à 164. En outre, les employés ont accepté, depuis plus de dix ans, une modération de leur rémunération en échange du maintien du financement du CRE, les pensions étant vues comme un salaire différé.

Selon l’accord négocié et accepté par les syndicats, les agents qui prendront leur retraite avant le 31 décembre 2024 ne verront aucun changement. Ceux qui seront embauchés après le 1er janvier 2025 seront assujettis au régime commun. Les autres auront une partie de leur pension versée par la CRE proportionnellement au temps passé entre leur embauche et le 31 décembre 2024, le reste de leur revenu étant fourni par le régime commun. La CRE va donc entrer en extinction et sera supprimée lorsque son dernier bénéficiaire sera décédé.

L’État a accepté le maintien en partie du CRE, car ce système est lourdement déficitaire ; son absorption par le système commun aurait fortement pesé sur les comptes publics. Il s’agit donc d’une situation inverse de celle qui prévaut pour les avocats : la caisse de ces derniers étant excédentaire, l’État lorgne sur les réserves accumulées et sur les cotisations versées par les avocats. Celles-ci, ramenées au taux moyen et donc augmentées (on parle de les tripler dans certains cas), apporteraient des ressources non négligeables à la caisse commune. Néanmoins, en multipliant les exceptions après la police et l’armée, la réforme proposée par M. Macron devient illisible. Un homme politique lucide renoncerait à cette mascarade et se contenterait de démanteler progressivement les régimes spéciaux, comme on a commencé à le faire pour la Banque de France. Mais M. Macron semble dépourvu de tout sens politique.

Christian de Moliner
Christian de Moliner
Professeur agrégé et écrivain

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