Les fonctionnaires, grands sacrifiés de la réforme des retraites

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Les masques sont en train de tomber et la réforme des retraites montre désormais toute sa nocivité. Le pouvoir assure que le niveau de pensions restera le même, mais c’est de la pure propagande ! En effet, les pensions seront réduites en cas d’interruption de carrière pour problèmes de santé, chômage ou années sabbatiques. Or, ces cas se produisent souvent et sont actuellement sans conséquences grâce à la règle des 25 meilleures années. Et, surtout, les pensions seront diminuées continuellement pour éviter les déficits des caisses de retraite et ajuster les recettes aux dépenses. Pratique pour le gouvernement, mais cette amputation se fera au détriment des retraités.

En outre, les fonctionnaires (un salarié sur cinq) vont tous, ou presque, perdre des sommes considérables avec le projet de M. Delevoye. Jusque-là, les pensions atteignaient, s’il n’y avait ni décote ni surcote, 75 % du dernier salaire (sans tenir compte des primes), du moment que le fonctionnaire avait perçu ce dernier pendant au moins six mois. S’y rajoutait un complément basé sur le calcul des points acquis, et qui était alimenté par un prélèvement indolore de 5 % (doublé par l’État) sur les primes. Souvent, un fonctionnaire en fin de carrière gagne 180 % de son premier salaire. Même s’il est très difficile, avec le nouveau système, de faire des prévisions, avec un taux de remplacement de 80 %, la pension d’un agent de l’État risque de n’être plus que de 64 % de son dernier salaire au lieu de 75 %.

Pour faire passer la pilule, le gouvernement agite la carotte des primes qui seront intégrées au salaire pour donner, elles aussi, des points pour la retraite. Mais le pouvoir se garde bien de préciser que la cotisation sera dorénavant de 28 % au lieu de 5 %, ce qui va induire une perte sèche et définitive d’un quart des primes. Une petite minorité de fonctionnaires touchent entre 30 % et 50 % de leurs salaires en primes ou en heures supplémentaire (hauts fonctionnaires, ingénieurs de l’État, professeurs de classe préparatoire, certains enseignants d’université, proviseurs…). Ceux-là perdront donc entre 7,5 % et 12,5 % de leur rémunération, mais garderont la même pension qu’actuellement.

Les autres (enseignants, agents hospitaliers ou des collectivités locales) qui ne touchent, en moyenne, que 10 % de primes perdront 2,5 % de rémunération, tout en voyant leurs pensions de retraite s’effondrer (250 euros de pertes pour les enseignants, selon leurs syndicats). Un pur désastre pour cinq millions de Français et ce « vol » aura un effet récessif sensible. S’y rajoute la fin, pour les personnels de santé, de la retraite à 57 ans et son report à 64 ans, le fameux âge pivot, sauf si, bien sûr, un nouveau dispositif remplace l’ancien. Pour compenser cette baisse drastique de pension et de revenus, les syndicats vont demander une augmentation de salaire, notamment pour les enseignants (les plus mal payés d’Europe). Mais ils n’ont guère de chance d’être entendus, vu le déficit vertigineux du budget.

Cette réforme des retraites, dont le pouvoir macronien ne cesse de nous vanter les mérites, n’a, je pèse mes mots, aucun avantage pour le salarié mais de nombreux inconvénients. Selon Challenges, le déficit actuel est minime (0,4 % du PIB en 2026) et il serait comblé rapidement par des mesures indolores. Un bon gouvernement, qui voudrait le bien de la population, le conserverait en l’améliorant sur la marge, mais nous ne sommes pas dans ce cas de figure.

Christian de Moliner
Christian de Moliner
Professeur agrégé et écrivain

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