Les incohérences de l’écolo-sociétalisme

écologistes

La France semble entrer dans un âge nouveau : celui de l’écolo-sociétalisme. À l’aune de l’épisode caniculaire de ces derniers jours ainsi que des derniers résultats électoraux – ceux des européennes révélant une certaine percée des écologistes et des animalistes (13,48 % des voix pour les premiers, 2,16 % pour les seconds) –, la société française se prépare-t-elle à une reconsidération profonde de son rapport avec la nature ?

Il faut noter que, si reconsidération il y a, celle-ci a été savamment provoquée, à l’échelle internationale, par le film de Davis Guggenheim et d’Al Gore (vice-président des États-Unis de 1993 à 2001), le premier à parler du réchauffement climatique (Une vérité qui dérange, sorti en 2006), mais aussi par les différentes actions médiatico-politiques de Nicolas Hulot, d’abord connu en tant qu’animateur-producteur de l’émission de télévision « Ushuaïa » (de 1987 à 1996), à l’échelle nationale. Dans les deux cas, l’écologisme est d’abord un business.

Pour autant, nul ne peut contester que des records de chaleur ont été, récemment, atteints dans des communes du sud-est de la France (par exemple, dans le Gard, 45,9 °C). Et les saisons intermédiaires ne semblent plus exister dans l’Hexagone depuis une quinzaine d’années. Alors, le catastrophisme se répand dans les esprits et est habilement utilisé pour détourner l’attention pour les préoccupations sociales. Une stratégie de communication, au final, contre-productive puisqu’elle oppose la prise de conscience à la liberté de conscience. En réalité, la France des centres-villes a des angoisses qui ne sont pas celles des anciens prolétaires relégués à l’arrière-plan de la Cité, celle-là ne se soucie plus que du monde face à ceux-là qui s’angoissent de perdre leur chez-soi. De fait, le nouvel internationalisme pose, en théorie, le primat de l’Homme – l’homme comme concept, et non point comme réalité concrète – sur les peuples. En pratique, la logique écolo-sociétaliste tend à survaloriser la faune, la flore et l’Autre, au nom des droits de l’homme, et ce, en dépit du devoir naturel de fraternité à l’endroit de ses compatriotes. Par ailleurs, la singularisation (logiquement excessive) de chaque plante, de chaque animal, voire de chaque genre, entre en conflit avec le respect pour l’universalité du vivant. « Une vie ne vaut rien, mais rien ne vaut une vie », disait André Malraux.

Mais encore, il ne faut plus de vie sur Terre, mais davantage de droits. Comble du paradoxe : au nom de la sauvegarde de l’humanité, certains choisissent de se stériliser tout en approuvant la PMA et la GPA. Toujours est-il qu’entre écologisme et technoscientisme, il convient de se déviriliser, de se rendre volontiers zombie ou bien légume vert. C’est l’histoire d’une obsolescence volontaire. Nietzsche avait relevé, dans le paragraphe 11 de la Troisième dissertation de La Généalogie de la morale, que « la terre est l’étoile ascétique par excellence ». Précisément, la mort de Dieu a rappelé, de façon lancinante, la vieille croyance ancestrale à la Mère Nature, mais sur l’autel de l’individualisme le plus radicalisé. Un selfie sur son smartphone ne polluerait-il pas, in fine, la planète ? Sans oublier qu’au nom de cette « collapsologie » ambiante, ces désirs viciés de pureté ne font, néanmoins, pas l’économie de la consommation de résine de cannabis, qui plus est avec ammoniaque et autres produits toxiques. Que d’éléments qui ne sont pas tant des paradoxes que des incuries !

Henri Feng
Henri Feng
Docteur en histoire de la philosophie

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