Les prisons françaises surpeuplées : au fait, pourquoi ?

Capture écran Le Figaro
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À en croire Le Monde, la surpopulation carcérale atteindrait des sommets, en France : « Les prisons françaises comptent à peine 62.000 places opérationnelles, ce qui établit la densité carcérale globale à 127,3 %. Plus de 3.600 détenus sont contraints de dormir sur un matelas posé au sol. » Fortuitement, il n’y avait guère besoin que cet oracle soit enfin rendu pour prendre la mesure de ce véritable désastre, de longue date dénoncé par d’autres voix que celles du vénérable quotidien vespéral.

Lequel s’appuie, évidemment, sur les chiffres du ministère de l’Intérieur évoquant une occupation des cellules dépassant les 200 % de capacité d’accueil. Sans surprise, Didier Migaud, ancien socialiste et nouveau garde des Sceaux, fait entendre une musique différente de celle de son actuel homologue de la Place Beauvau, Bruno Retailleau, affirmant, en matière de laxisme judiciaire supposé, que ce dernier « n’existe pas ».

Bonnes questions, mauvaises réponses…

Certes, mais là n’est pas véritablement le problème, ce dernier consistant avant tout à savoir si la délinquance explose ou non en France ; le trop-plein de prisonniers ne relevant, après tout, que de « simples » questions logistiques. Lesquelles ne sont pas anodines non plus, sachant que faute de nouvelles prisons, l’État n’en finit plus de réduire les budgets de ces hôpitaux psychiatriques, désormais contraints de relâcher dans la nature des individus manifestement dangereux qui, bien sûr, ne passeront pas tous forcément à l’acte mais demeurent néanmoins de véritables grenades dégoupillées.

Ce que confirmait déjà le très officiel site Santé mentale.fr, en septembre 2023 : « Un quart des établissements de psychiatrie ont fermé entre 11 et 30 % de leur capacité. »

Pareillement, les CRA (centres de rétention administrative) affichent complet, la durée de détention des immigrés clandestins étant passée de 7 jours, en 1981, à 90, depuis 2019. Une fois de plus, là n’est pas le problème : les garderait-on plus longtemps encore sans pouvoir les renvoyer en leurs pénates d’origine que ce même problème ne serait pas résolu.

Même Valérie Pécresse l'avait dit…

Le visage de cette population n’est pas non plus anodin ; les détenus étrangers n’étant pas loin d’en représenter un quart de la population carcérale, ce que même Valérie Pécresse, candidate malheureuse à l’élection présidentielle de 2022, reconnaissait : « Il y a un lien entre immigration et délinquance : 23 % des détenus dans nos prisons sont étrangers. Oui, il existe un lien entre intégration ratée et délinquance. »

Et c’est encore sans compter sur les prisonniers français d’origine étrangère. Le quotidien Libération, pas toujours connu pour son laxisme judiciaire et sa chasse au faciès, lâchait néanmoins le morceau dès 2015, dans un article de Sonya Faure daté du 4 février.

Morceaux choisis et signés du sociologue Didier Fassin, ayant « lui-même visualisé l’impressionnante présence des minorités ». Mais, poursuit-il, « ce qui est plus récent, c’est que ces minorités se définissent autant par leur couleur et leur origine que par la faiblesse de leur capital économique et culturel. Elles constituent un sous-prolétariat issu de l’immigration africaine. »

Faute de statistiques ethniques en France, Didier Cassin se contente donc des siennes : « Résultat : les hommes noirs et arabes représentaient les deux tiers de l’ensemble des détenus et même plus des trois quarts des moins de 30 ans. »

Surtout, ne pas stigmatiser...

D’où cet étrange aveu, mais qui n’étonnera finalement personne : « Lui-même a hésité à rendre publics les résultats de ses statistiques : le silence et la cécité que l’on entretient depuis longtemps autour de la composition démographique de la population pénale sont maintenus en partie pour de bonnes raisons, à savoir l’intention de ne pas stigmatiser, mais ont pour conséquence de ne pas permettre de s’interroger. »

De fait, la seule interrogation qui vaille ne consiste donc pas forcément à savoir pourquoi il n’y a pas assez de places disponibles dans nos prisons. Mais pourquoi ces dernières ne parviennent plus à accueillir cet afflux de délinquants et criminels. Et surtout, une fois encore, pourquoi ceux-là sont-ils en grande partie étrangers ou d’origine étrangère.

Y aurait-il eu comme un échec de l’assimilation des populations étrangères, ces décennies dernières ? Et quelque aveuglement vis-à-vis de la submersion migratoire ?

Ce n’est pas forcément en édifiant de nouvelles prisons à grands tours de bras qu’on y répondra.

Nicolas Gauthier
Nicolas Gauthier
Journaliste à BV, écrivain

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