Les supplétifs des toxicomanies surfent sur la Covid-19
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Comme cela était prévisible, le confinement imposé par la Covid-19 a amplifié les consommations d’alcool et de tabac ; la « puissance publique » ayant laissé ouverts les débits de tabac et les magasins vendant des boissons alcooliques. Ces consommations en milieu confiné ont contribué au recrutement de nouveaux consommateurs ; elles ont ramené à ces drogues plusieurs de ceux qui, au prix de gros efforts, s’en étaient presque détachés ; elles ont vraisemblablement accru le tabagisme passif (à l’origine de 3.000 morts annuelles dans notre pays) ; elles ont, par la désinhibition alcoolique et l’ivresse, provoqué des violences conjugales et familiales. Enfin, le « déconfinement » lui-même a été l’occasion de grandes libations.
L’Agence nationale de sécurité du médicament avait mis en garde contre les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) ainsi que les corticoïdes anti-inflammatoires. Ces médicaments, en affaiblissant la réponse immunitaire qu’oppose l’organisme à l’invasion virale, sont susceptibles d’aggraver la Covid-19. D’une façon incompréhensible, en France, pays d'Europe le plus grand consommateur de cannabis comme le rapporte France Info, la mise en garde n’a pas englobé cette drogue qui, pourtant, déprime l’immunité. Serait-ce parce que le nouveau ministre de la Santé, Olivier Véran, encore député quelques semaines auparavant, se faisait, à l’Assemblée nationale, le héraut du « cannabis thérapeutique » ?
Le cannabidiol/CBD, promu dauphin du tétrahydrocannabinol/THC, a été hâtivement paré d’une douzaine d’effets à prétentions thérapeutiques. N’y suffisant pas, il s’est vu, tout extemporanément, doté d’une efficacité « remarquable » contre la Covid-19.
La nicotine du tabac vient d’être présentée comme protectrice vis-à-vis du coronavirus. Il est pourtant évident que les produit de combustion du tabac - les goudrons (irritants pour l’appareil respiratoire) et l’oxyde de carbone (qui perturbe le transfert de l’oxygène (O2) des poumons vers les tissus) - joints à l’état délabré des poumons des fumeurs ne peuvent qu’aggraver les conséquences de l’infection par le coronavirus ; mais qui l’a dit ?
Les craintes légitimes que suscite la Covid-19 sont l’occasion de comparer la létalité dont elle est responsable à celle résultant des toxicomanies. La coronavirose sera responsable, en France, de beaucoup moins de décès que les 120.000 imputables au tabac et à l’alcool (75.000 + 45.000). Seule l’Académie nationale de médecine a effectué une telle comparaison dans un de ses communiqués. N’est-ce pas, aussi, l’occasion de souligner que les handicaps qu’endureront ceux qui ne mourront pas de ces deux drogues seront très supérieurs à ceux qui résulteront des formes non létales de l’infection virale. Ces éléments de communication rassureraient les plus anxieux à propos de cette dernière et seraient une pédagogie opportune en direction des alcoolo-tabagiques sur le mode : « Vous avez peur de mourir de cette grave infection ? Alors soyez encore plus attentifs à vous préserver des toxicomanies qui sont les toutes premières causes de morts évitables. »
Les habituels pétitionnaires en faveur des drogues et pour la légalisation du cannabis ont ressurgi. Essayant, sans vergogne, de tirer parti du drame des seniors qui ont payé un lourd tribut au coronavirus, ils demandent au gouvernement, avec des trémolos dans la voix, d’autoriser dans les EHPAD le recours au cannabis : « Nous le devons bien à celles et ceux qui ont déjà payé un si lourd tribut à la pandémie et qui vivent dans l’angoisse ou le désespoir. » Forçant à peine le trait, traduisons : ne pourrait-on pas « shooter » nos vieux ?
Le ministre Véran, pleinement dans sa fonction, remet les pendules à l’heure en rappelant (à propos de l’hydroxychloroquine) qu’une substance, même inscrite à la pharmacopée, pour être utilisée dans une nouvelle indication, doit être justifiée par des études cliniques rigoureuses (randomisation, double aveugle, groupe témoin, comparateur, grand nombre de patients…). Aussi, en souscrivant à ces critères usuels, le ministre devrait siffler la fin du simulacre d’études lancées sur le « cannabis thérapeutique ». Le protocole annoncé est aux antipodes des critères précités. Des études recevables doivent être menées avec sérieux et discrétion ; sans que s’en mêlent la représentation nationale, les médias, pas plus qu’un comité temporaire constitué spécifiquement sur mesure.
Des crise de l’importance de la Covid-19, derrière les peurs et les drames, mettent à jours des appétits, des subterfuges, des non-dits, des malversations. Puissent-elles inciter à de salutaires aggiornamentos et neutraliser tous ces Rapetou. De l’intensité de la chute peut naître la puissance du rebond. Sinon, à continuer « comme avant », on ne pourra qu’aggraver une situation déjà très dégradée.
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