Lettre ouverte au ministre de la Culture pour la défense de la langue française
Madame le Ministre
Je voudrais aujourd’hui vous dire ma colère,
Et celle de tous les Français qui désespèrent :
Oui, combien d’entre nous ont l’âme consternée
Voyant comme leur langue est sans cesse agressée !
Et qui n’a vu partout ces dernières années,
Surgir de toutes parts de l’animosité
Contre des pans entiers de son vocabulaire,
Contre ses fondements, et contre sa grammaire :
Alors quousque tandem resterez-vous muette,
Indifférente aux violences qui lui sont faites ?
Oui, violence à la langue il n’est pas d'autre mot
Pour dire la fureur de préjugés nouveaux
Qui voudraient transformer, refaire le français
Ou par esprit sectaire en faire le jouet
De combats qui pour vouloir être gigantesques,
N’en finissent pas moins dans un parfait grotesque !
Notre langue, fille du grec et du latin,
Héritière et porteuse de l’esprit chrétien,
Qui naquit avec lui, avec ses cathédrales,
Et porta en tous lieux nos valeurs nationales,
Notre langue qui fut gothique puis classique,
Puis celle des Lumières et des romantiques,
Mais toujours aussi belle, on la voit barbouillée
Par les tags et les tocs de la stupidité.
Déjà elle croulait sous tous les anglicismes
Et le merchandising, et autres barbarismes
Commerciaux, les slogans, les sigles, les textos,
Le français des tweetos et les termes technos.
De la Culture et de ses administrations,
Ou du pédagogisme de l’Éducation,
De toute la novlangue et de ses Trissotin,
Elle avait pris le ton pédant, le baragouin ;
Mais comme on n’avait pas assez brouillé ses textes,
On lui flanque des « e » sous le moindre prétexte,
Au nom d’un féminisme et d’une égalité
Qui ressemblent à des clameurs de forcenés !
Emportés dans le flot d’obsessions maladives,
Des couillons/couillonnes la veulent inclusive
Certes on vit un temps où le n’importe quoi
Semble être en toutes choses devenu la loi,
Où l'idéologie, la politisation
Tiennent lieu de bon sens et d’argumentation ;
Mais quel mauvais procès de la dire machiste,
D’en faire un réservoir d’hystérie féministe,
Alors qu’académie est un mot féminin,
Que la langue française est terme féminin !
Jusqu’à quand faudra-t-il supporter ces fadaises,
Ces grands engagements dans des querelles niaises,
Et voir tout un chacun mettre des « e » partout,
Inventer des vocables à dormir debout ?
Madame, où allons-nous, si aujourd’hui, demain,
Tout un chacun se prétend académicien
Et refait le français, selon sa fantaisie,
Et comme bon lui semble, et selon sa manie :
Censeure, procureure, autrice ou proviseure,
Cheffe de cabinet, ministresse ou docteure,
Et pourquoi pas aussi plombière ou médecine,
Pompière, cantonnière, et pour finir clampine,
Ou bien maîtresse queux, et aussi bûcheronne ?
À la loge verra-t-on des franches-maçonnes ?
Et quant à la girafe, allons nous protester,
Et finir tous ensemble par nous affliger
De ce que le mari se dit au féminin ?
Et tous ces mots anglais-anglo-américains
Start-up, ou marketing, e-mail à dispatcher
Dumping, buzz, ou hashtags, hotspots pour réfugiés ?
Les Français au français ne comprennent plus rien !
Tout le monde voit bien qu’on y perd son latin !
Notre langue, parlée sur les cinq continents,
La langue de Rostand, et de Chateaubriand,
La langue de Hugo, de Claudel, de Voltaire,
De Musset, George Sand, Marivaux et Molière
Ou de Louise Labbé, de Germaine de Staël,
La langue de Balzac, de Flaubert, de Stendhal
Voulez-vous la laisser devenir un brouet,
Un fatras commercial, une soupe en sachet,
Un produit de l’outrance ou de l’utilité,
L’immense réservoir de l'imbécillité ?
Voulez vous qu’elle soit le Champ Catalaunique
D’un carnage verbal, d’un combat névrotique,
D’une obsession pathologique, égalitaire,
Qui transforme le monde en une termitière,
Et finisse par n’être plus qu’un charabia
Où du soir au matin la raison n’entre pas ?
Elle, l’esprit subtil du beau pays de France,
De la France éternelle et de l’intelligence
Allez-vous la laisser mourir par la sottise
De ces refondateurs qui nous la vandalisent
Madame, vous voilà, par la grâce du ciel
Devenue le représentant ministériel
De la Culture, et puisqu’où l’on vous a nommée
Vous avez pour ce faire toute autorité,
Défendez notre langue, c’est votre mission
Sacrée, c’est votre honneur, et votre élévation
Que notre langue à nouveau flamboie, et rayonne !
Saisissez à deux mains la chance qu’on vous donne,
Et prenant le bâton des anciens patriarches,
Madame, levez-vous et mettez-vous en marche !
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25 commentaires
Formidable, excellent poème, soutien à votre lettre. Avec vous dans ce partage pour notre langue mais, aujourd’hui même l’Académie écrit dans le sens de la féminisation de certains mots sur son site, alors…
Un régal d’alexandrins, bravo Monsieur Pélaez ! J’ai l’habitude de dire que vous êtes parmi mes plumes préférées de Boulevard Voltaire, mais aujourd’hui vous êtes vraiment à la toute première place ! Félicitations.
Rachida la langue française passe après sa course à la mairie de Paris. De toute façon, elle va adopter le même verbiage que son entourage, sinon elle saute.
Félicitations!
Mes sincères félicitations pour vos vers, votre vibrant plaidoyer pour la langue française ! Je déplore, comme vous, les attaques dont souffre notre langue. Mais je doute que la destinataire de votre supplique soit la bonne personne pour relever le défi… Encore Bravo !
Très beau texte mais son destinataire, Rachida Dati, se moque éperdument du sauvetage de langue française. Son seul objectif est de se faire introniser candidate à la mairie de Paris par Macron. Pour cela elle flatte l’électorat gaucho-bobo en mettant en avant la « culture » des banlieues (rap, hi-hop…). J’attends toujours sa réaction à la distinction de meilleur spectacle du monde décernée au Puy du Fou.
Si jusqu’alors, l’Académie Française réussissait à s’opposer à tous ces barbarismes, j’ai bien peur qu’avec l’intronisation sous sa coupole du Président du Conseil constitutionnel, la mode « woke » ne s’y invite. C’est donc à nous, Français attachés à notre langue de donner l’exemple à nos descendants en refusant d’adopter ces horreurs. Merci monsieur Pélaez pour ce billet.
Pas si facile ! Si je souligne des fautes d’orthographe dans les écrits de mon mari, il le traîte « d’emmerdeuse » s’ils se réalisait, il corrigerait de lui-memee. Encore que…. Si je cherche à rectifier certaines tournures utilisées par mes petits enfants, lui se met de leur côté lorsque ceux-ci me disent que je les embête. Incapable qu’il est de faire preuve de pédagogie, d’avoir quelques principes à défendre.
C’est décourageant !
Concentrez vos efforts sur vos petits enfants. Que ce soit en cachette, votre secret, un jeu entre eux et vous. Il faut parfois ruser pour parvenir à ses fins tout en évitant les conflits… Courage !