Elle est où, l’Europe de la Défense, Monsieur Macron ?
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Après le Danemark, l'Italie, la Norvège, les Pays-bas et le Royaume-Uni qui ont déjà fait leur choix du F-35 américain pour moderniser leurs flottes d'avions de combat, l'Allemagne qui doit remplacer ses chasseurs Tornado - nés d'une association avec l'Italie et le Royaume-Uni début 1980 - porte le même intérêt à ce chasseur moderne made in USA, qui vient de lui être présenté cette semaine par le Pentagone. Et ce, en dépit de discussions entre le Président et la chancelière pour une future et incertaine coopération dans le domaine de la Défense, proposée par le premier.
Mais ce n'est pas, hélas, la fin de l'anti-saga européenne du Rafale français. La Belgique, avec laquelle la France a pourtant des accords en matière de formation des pilotes de chasse - qui vont précisément se terminer en 2019 -, s'intéresse au même avion de Lockheed Martin ainsi qu'à l'Eurofighter pour remplacer ses F-16 dont étaient, ou sont toujours équipés, neuf pays de l'Union européenne !
Une proposition non sollicitée du Rafale dans le cadre d'un "partenariat approfondi" a été menée ce mois-ci par le ministre Florence Parly, mais qui ne s'inscrit pas dans le cadre du "request for governement proposal" - sic - belge. D'ailleurs, le ministre de la Défense de ce pays, voisin et ami, n'a pas apprécié une proposition faite en français ! M. Steven Vandeput, flamand, ne comprend sans doute pas la langue officielle de la Communauté…
Le désamour des pays européens pour le fleuron des avions Dassault a plusieurs raisons qui tiennent au véritable besoin des forces aériennes, aux arcanes complexes de la politique, aux alliances ouvertes ou obscures, et sans doute au coût final.
Je rappelle qu'au début des années 1980, un programme de chasseur européen fut lancé mais que la pugnacité de l'avionneur tricolore pour être maître d'œuvre du programme fit capoter la coopération. Charles Hernu, alors ministre - PS - de la Défense, travaillé au corps par le constructeur sans doute soutenu par les ingénieurs militaires de la DGA, entérina le lancement du programme de chasseur polyvalent que devint le Rafale, dont l'entrée en service dans les forces aériennes n'intervint qu'en 2004, et au bénéfice prioritaire de l'Aéronavale…
L'armée de l'Air recevait sa première livraison deux ans plus tard.
La dotation, qui n'est pas terminée, comptera 180 unités de versions différentes et évidemment rénovées, dont 48 pour la Marine.
À ce jour, les seuls pays étrangers acheteurs sont l'Égypte, le Qatar et l'Inde, pour 84 avions au total.
Le parapluie de l'OTAN, dont le manche est toujours tenu par l'Amérique nonobstant les bougonnements épisodiques de Trump, est confortable à la plupart des pays de l'Union et fait de l'ombre aux intentions et propos de Macron pour une Europe de la Défense. Le prix à payer par les fans de l'Alliance est d'aller faire leur marché de l'autre côté de l'Atlantique. En outre, le coût est probablement plus modéré, étant donné l'effet d'échelle.
D'ailleurs, prudent ou conscient malgré son impétuosité réformiste, notre Président déclarait récemment : "En matière de Défense, notre objectif doit être la capacité d'action autonome de l'Europe, en complément de l'OTAN. Le socle de cette autonomie a été posé, avec des progrès historiques intervenus ces derniers mois. En juin dernier, nous avons posé les bases de cette Europe de la Défense ; une coopération structurée permanente, permettant de prendre des engagements accrus, d'avancer ensemble et de mieux nous coordonner ; mais aussi un Fonds européen de défense afin de financer nos capacités et notre recherche. Ce socle indispensable, nous sommes en train de lui donner un contenu, à travers les échanges des différents États membres qui souhaitent avancer en cette direction."
Conclusion : avant d'avoir trouvé un consensus, avec ce socle macronien, il faudra bien un quinquennat sinon plus. Et les chasseurs yankee bénéficieront encore de beaux ciels au-dessus du Vieux Continent pour y tracer des traînées arrogantes ou provocatrices…
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